Anne Hidalgo relance la polémique sur le diesel, spécialité de Renault et PSA

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  875  mots
Les modèles diesel ne représentent plus que 67,3% du marché tricolore total. La décrue est amorcée. Les voitures neuves à gazole pesaient 73% du marché hexagonal l'an dernier... et 77% en 2008
L'adjointe de Bertrand Delanoé et candidate à la mairie de Paris, Anne Hidalgo, s'en prend au diesel. Problème: les modèles à gazole sont certes plus polluants, mais favorisent la lutte contre les émissions de CO2, car ils consomment moins!

La polémique sur le diesel rebondit. Cela faisait longtemps. En campagne électorale, Anne Hidalgo, candidate (PS) à la mairie de Paris, a accusé sa rivale de l'UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet, d'avoir été la "ministre du diesel" et  dénoncé une "politique inconsciente" . L'épisode de pollution actuellement observé en Ile-de-France, à cause de la persistance de l'anticyclone, "n'est pas un échec de la Ville de Paris", a-t-elle affirmé dans un plaidoyer pro domo, pour dédouaner l'actuelle gestion du maire Betrand Delanoé dont elle est partie prenante.

"C'est la conséquence d'une politique totalement inconsciente, irresponsable, des dirigeants, notamment du gouvernement précédent, qui ont tout misé sur le diesel. Le diesel émet des particules fines qui sont cancérigènes, il y a des études de l'OMS qui le prouvent", a déclaré Anne Hidalgo sur France Info...

Lutte anti-CO2 et diesel

"Les mesures d'Airparif (...) ont indiqué (...) que les efforts entrepris pour réduire la circulation, pour pousser vers les transports en commun ou les véhicules propres ou électriques, ont été en partie atténués par une politique de +diesélisation+ du parc automobile français qui a été notamment la politique poursuivie par Mme Kosciusko-Morizet lorsqu'elle était ministre de l'Environnement", a argué la première adjointe de Bertrand Delanoë.

Elle oublie pour la circonstance que la lutte anti-CO2 sous forme de bonus-malus automobile avait été poursuivie par l'actuel gouvernement socialiste, lequel a également décidé de ne pas aligner les taxations sur le litre à gazole au niveau de celles pesant sur le litre de sans-plomb. Mais, bon, en politique, tous les coups sont permis...

Les véhicules à gazole consomment 15 à 20% de moins que des modèles à essence

"Ils ont fait une fiscalité qui a incité les Français et les constructeurs (...) à favoriser le diesel là où partout en Europe on était en train de revenir sur cette politique", a accusé Anne Hidalgo, alors même que les futures normes européennes pour déduire le CO2 favorisent de facto le diesel, puisque les véhicules à gazole consomment 15 à 20% de moins que des modèles à essence, et donc rejettent autant de CO2 en moins au kilomètre. Consommations et émissions de gaz à effets de serre sont étroitement corrélées...

"Aujourd'hui, nous sommes environ à 70% du parc automobile français au diesel", a souligné  Anne  Hidalgo, ressortant le chiffre extrêmement controversé de "40.000 morts prématurés par an en France, liés notamment à la pollution atmosphérique", alors que cette étude est ancienne et ne tient pas compte des récentes évolutions des moteurs diesel, notamment avec le filtre à particules inventé par PSA...

La part du diesel baisse

En plein marasme, Renault et PSA se passeraient en tous cas de cette nouvelle polémique sur le diesel, lequel est leur spécialité, puisque les gouvernements français de droite comme de gauche ont toujours favorisé cette motorisation, pour réduire notamment la consommation. Après une ascension irrésistible en France et en Europe, les voitures à gazole marquent de toutes façons le pas face aux véhicules à essence. En novembre dernier, les immatriculations de voitures neuves à gazole ont chuté de 12,5 % en France. 

Sur onze mois, elles reculaient même de 14,3% à 1.087.235 unités. Les modèles diesel ne représentent plus que 67,3% du marché tricolore total. La décrue est amorcée. Les voitures neuves à gazole pesaient 73% du marché hexagonal l'an dernier... et 77% en 2008 !

"Ce rééquilibrage naturel est durable et nous confirmons notre prévision d'un marché automobile à 50% essence, 50% diesel en 2020", pronostique le CCFA (Comité des constructeurs français d'automobiles). Du coup, "le parc automobile dans son ensemble va suivre cette évolution avec un décalage de sept ans", précise le CCFA.

Des modèles de plus en plus chers

Les véhicules diesel se sont beaucoup renchéris avec le recours à des technologies ultra-sophistiquées. Tel le filtre à particules, obligatoire dans l'Union européenne depuis janvier 2011 avec la norme Euro V. Et ce n'est pas fini. Avec la future norme Euro VI d'anti-pollution en 2014, les moteurs diesel ne bénéficieront plus de dérogations par rapport aux mécaniques à essence comme c'est le cas actuellement.

Ce qui obligera les motoristes à traiter définitivement le problème des rejets de NOx (oxydes d'azote). Ce qui rendra les modèles diesel de plus en plus chers. D'où le freinage attendu sur le marché.

Et, après la dure norme Euro V, Euro VI va rendre les véhicules à gazole encore plus complexes, les renchérissant de plusieurs centaines d'euros selon les experts. Ce qui risque tout bonnement de condamner les motorisations diesel sur les petits véhicules d'entrée de gamme. Or, comme le marché français s'oriente de plus en plus vers des petits véhicules, cela fera mécaniquement baisser la part des diesels dans les ventes globales.

Quant aux fameux modèles propres électriques, tant vantés par Anne Hidalgo, leur essor est freiné par l'absence de politique gouvernementale pour développer les bornes de recharge. Dotés d'une autonomie très réduite et obligeant à des temps de recharge très longs (une dizaine d'heures), les modèles électriques ne représentent encore qu'une part infinitésimale du marché... Ils se prêtent mal à une utilisation en-dehors des flottes.