François Hollande douche les espoirs de Renault et PSA de revenir rapidement en Iran

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  788  mots
François Hollande et Barack Obama ont mis en garde les entreprises qui prospectent en Iran.
Le président français a mis en garde les entreprises tricolores qui se sont rendues en Iran, faisant référence à une délégation de 116 représentants de sociétés hexagonales menée par le Medef International. Renault et PSA espèrent toutefois renouer avec ce pays où ils étaient très fortement implantés.

Ces "contacts" ne peuvent "pas déboucher aujourd'hui sur des accords commerciaux", a affirmé mardi François Hollande aux Etats-Unis, faisant allusion à une délégation de 116 représentants d'entreprises françaises menée par le Medef International, qui se sont rendues en Iran début février.

Le président de la République, en visite outre-Atlantique, a mis en garde ces entreprises, alors que son hôte,  le président américain Barack Obama avait prévenu que les sociétés étrangères qui prospectaient en Iran le faisaient à "leurs risques et périls", promettant "une pluie de sanctions" sur ceux qui rompraient l'embargo international... La visite de la délégation du Medef International avec l'aval du Quai d'Orsay et de l'Elysée avait été, il est vrai, très mal vue par Washington !

PSA et Renault aimeraient revenir

Avec ces déclarations, François Hollande douche - provisoirement, du moins - les espoirs des constructeurs automobiles français de revenir rapidement dans un pays où ils étaient très implantés avant les sanctions. Pour répondre à une demande expresse de General Motors, PSA avait dû renoncer à l'Iran en 2012 lors de son alliance avec l'américain, laquelle a en grande partie avorté depuis. Renault a dû aussi l'an dernier se conformer auxdites sanctions, de peur des représailles américaines éventuelles sur son allié japonais Nissan, très présent aux Etats-Unis.

Même s'ils ne fournissent plus de pièces, Renault et Peugeot sont encore présents indirectement. Car les composants déjà fournis continuent d'alimenter la production locale. Selon les statistiques officielles iraniennes, il s'est vendu  59.300 Peugeot 405 l'an dernier en Iran et 27.800 unités de la 206,  39.500 Renault Tondar (Logan).

Interrogé la semaine dernière dans le cadre du salon indien de New Delhi, Gilles Normand, directeur de Renault pour la zone Asie-Pacifique, nous affirmait toutefois entrevoir une embellie sur l'Iran. Le groupe y fabrique en effet depuis quelques années sa Tondar, dont il a écoulé 100.000 unités en 2012.

"La levée des sanctions américaines le 20 janvier 2013 pour six mois renouvelables génère un meilleur environnement. Ce marché a pesé 1,4 million d'unités avant les sanctions. On a réussi à en occuper 10%. Et ce marché a un potentiel pour monter à deux millions", assurait le dirigeant de Renault, gourmand, qui ajoutait : "on peut recommencer les ventes cette année".

Il reste toutefois à s'assurer que "la levée des sanctions sera durable et permettra de fluidifier la disponibilité en devises (ndlr : pour acheter des pièces à Renault afin de produire sur place)", notait Gilles Normand. La firme au losange affirme avoir 350.000 véhicules qui roulent en Iran. Un beau parc, même s'il est très inférieur à celui des Peugeot

Co-entreprise où Renault est majoritaire

Le constructeur de Boulogne-Billancourt dispose d'une co-entreprise industrielle et commerciale locale. Renault possède 51% de cette société commune, laquelle distribue les composants aux deux groupes industriels locaux et gère les paiements. Renault livre ainsi ses pièces à Iran Khodro et Pars Khodro, pour l'assemblage des véhicules.

PSA avait vendu pour sa part plus de 313.000 véhicules en 2012, essentiellement des Peugeot 206 et 405 assemblées localement par Iran Khodro, près de Téhéran. En reprenant Chrysler Europe en 1978, le français avait trouvé dans la corbeille de mariée les fournitures de pièces pour le modèle Hillmann Hunter de 1966, un véhicule créé par le groupe britannique Rootes devenu entretemps Chrysler UK. Ouf! La Hunter a été assemblée sous licence par Iran Kodro sous le nom de Paykan depuis la fin des années 60 jusqu'à une date récente Tout en continuant à livrer des pièces pour la Paykan, Peugeot a progressivement ajouté sa 405 (de 1985). 

Les asiatiques ont continué

La firme tricolore a aussi introduit sa 206, notamment dans une version spécifique à quatre portes et coffre séparé. L'Iran était le deuxième  débouché du groupe PSA avec 467.000 unités en 2010, 457.900 en 2011 ! La marque Peugeot, s'octroyait avant les sanctions grosso modo 30% du marché iranien.

D'où l'intérêt des groupes français à renouer avec un marché prometteur où ils étaient arrivés en force. D'autres constructeurs, notamment coréens et japonais, ont continué tranquillement, pendant ce temps-là, à commercer avec l'Iran ! Et les américains aimeraient bien in fine revenir à la place des... Français.

L'arrivée d'Hassan Rohani à la tête de l'Iran et l'impact des sanctions internationales ont permis la signature d'un accord, le 24 novembre dernier, sur le dossier du nucléaire. En échange d'une suspension du programme d'enrichissement promise par les autorités iraniennes, la communauté internationale s'est engagée à lever une partie de ces sanctions économiques. Mais on n'en est qu'au début du processus.