Pourquoi l'Etat lance une opération commando dans le capital de Renault

Par Michel Cabirol  |   |  489  mots
L'Etat a annoncé ce jeudi l'achat de 4,7% supplémentaires du capital du constructeur automobile tricolore dans le cadre de la loi Florange.
L'Etat renforce son influence au sein du capital de Renault. Car il veut absolument contrer une résolution prévue lors de l'assemblée générale du constructeur, visant à empêcher l'acquisition de droits de vote doubles par les actionnaires détenant des titres depuis plus de deux ans.

Opération commando de l'État dans le capital de Renault. Pour contrer une résolution visant à empêcher l'acquisition de droits de vote doubles par les actionnaires détenant des titres depuis plus de deux ans, le bras armé de l'Etat, l'Agence des participations de l'Etat (APE) a annoncé ce jeudi l'achat de 4,7% supplémentaires du capital du constructeur automobile tricolore dans le cadre de la loi Florange, portant sa participation à 19,7% et à 23,2 % des droits de vote (contre 17,6% actuellement). Suffisant, estime un responsable de l'APE, pour rejeter cette résolution. A côté de l'Etat, Nissan détient 15%, Daimler 3,1%, les salariés 3,06% et enfin Renault 1,37% (auto-détention) tandis que le flottant s'élève à 62,46%.

Sans cet achat de près de 5% du capital de Renault, "nous n'étions pas sûrs de quel côté la pièce allait tomber", estime un responsable de l'APE pour expliquer cette opération. Grâce à elle, "nous sécurisons le vote même si cela dépendra du quorum de l'assemblée générale", prévue le 30 avril. Mais, il s'est voulu rassurant sur le succès du rejet de cette résolution. Avec cette opération estimée entre 814 millions et 1,23 milliard d'euros, "cela renforcera l'influence de l'État chez Renault. C'est pour cela qu'on le fait", explique-t-il. Elle "illustre également l'importance stratégique que revêt aux yeux du gouvernement la participation de l'État au capital de Renault". Pour autant, "elle ne préfigure en aucun cas un mouvement durable à la hausse ou à la baisse sur sa participation au capital de l'entreprise".

Dans la lignée de la loi Florange

La loi Florange ou "loi visant à reconquérir l'économie réelle du 29 mars 2014 prévoit que sauf décision contraire des assemblées générales, les actionnaires qui conservent leurs titres pendant au moins deux ans sont récompensés par l'octroi de droits de vote doubles: au bout de deux ans, chaque action qu'ils détiennent leur donne deux voix lors des assemblées générales", est-il rappelé dans un communiqué de l'APE. Les droits de vote doubles sont d'ores et déjà aujourd'hui une réalité dans plus de la moitié des entreprises du CAC 40, a indiqué l'APE.

Et qu'en pense le PDG de Renault, Carlos Ghosn, renouvelé il y a un an environ ? Il a été mis dans la confidence. L'Etat n'a pas souhaité faire cette opération dans le dos de la direction, qui serait, selon l'APE,"agnostique" par rapport à cette initiative, selon l'APE. "Il a joué le jeu", assure un responsable de l'APE, qui fait observer que l'Etat partage la "même vision" que la direction de Renault et qu'il est bien "dans la lignée de la stratégie" du constructeur automobile en dépit de "quelques rares sujets de divergence". Et pour clore le sujet, "nous n'aurions pas récemment renouvelé Carlos Ghosn si nous n'étions d'accord".