Renault-Nissan : pourquoi le rééquilibrage était devenu inéluctable

Par Nabil Bourassi  |   |  506  mots
Carlos Ghosn a tout fait pour préserver les termes de l'alliance. Celle-ci est toutefois remise en cause...
Renault pourrait baisser sa participation dans le capital de Nissan sous la barre des 40%, d'après le journal japonais Nikkei. Un événement directement lié à la montée de l'Etat français dans le capital de Renault. En réalité, cela traduit surtout le nouveau rapport de force au sein de l'alliance largement défavorable à Renault...

Carlos Ghosn ne serait pas parvenu, comme il l'avait promis, à préserver les termes capitalistique qui lient Renault à Nissan depuis 1999. D'après le journal économique japonais Nikkei, le groupe français pourrait prochainement passer sous la barre de 40% du capital de Nissan.

Il s'agirait d'une conséquence directe de la montée de l'Etat français dans le capital de Renault. En avril dernier, le gouvernement annonçait qu'il passait sa participation de 15 à 19,7% du capital afin d'imposer les droits de vote double lors de l'assemblée générale des actionnaires.

L'Etat a revendu ses actions, mais le mal était fait

Cette annonce avait troublé le partenaire de Renault qui, lui, possède 15% de son capital mais sans pour autant en détenir des droits de vote conformément au droit français.

Pourtant, le gouvernement français est revenu à sa position de 15% du capital de Renault en revendant les actions acquises. Mais une fois les droits de vote double adoptés en assemblée générale des actionnaires, le mal était fait. Pour Nissan, la situation est devenue ubuesque, le groupe japonais ayant ainsi le sentiment d'être sous le contrôle de l'Etat français. Et ce malgré les déclarations de Carlos Ghosn, qui jurait alors que cet événement ne changerait pas la structure de l'alliance.

Un nouveau rapport de force

En réalité, l'équilibre capitalistique de l'alliance est depuis longtemps remis en question. Lorsque Renault entre dans le capital de Nissan en 1999, il trouve une société moribonde et au bord de la faillite, mais surtout d'une taille à peu près équivalente à la sienne. Depuis, le Japonais a doublé de taille et pèse désormais les deux tiers des immatriculations de l'alliance. Il fournit l'essentiel des bénéfices de Renault dans les comptes consolidés. Pis : pendant les années de crise, la participation de Renault dans Nissan pesait plus lourd que la capitalisation boursière même du constructeur français.

Une modification capitalistique pourrait ainsi refléter le réel rapport de force entre les deux constructeurs. Il éloignerait de facto Renault d'une prise de contrôle totale qui aurait permis de passer du stade d'alliance à un projet de groupe intégré. En interne, on se défend d'avoir jamais songé à ce scénario considérant que dans le monde automobile, les cas de fusions réussies sont rarissimes. Le divorce récent de Volkswagen et Suzuki est là pour le rappeler.

Une alliance qui doit encore être consolidée

Il n'empêche que Carlos Ghosn doit encore consolider l'alliance entre les deux constructeurs en accélérant les synergies industrielles, les partages de plateformes ou encore les transferts de technologies (motorisations diesel, essence, électriques...). Mais au-delà de la consolidation industrielle, le défi de Carlos Ghosn qui est également PDG de Nissan, sera de pérenniser le management de l'alliance. Or, pour le moment, il n'a aucun dauphin désigné et ce dernier devra obligatoirement être adoubé par le très exigeant partenaire japonais.