Même à 20 dollars le baril, l'Arabie Saoudite ne baissera pas sa production

Par Nabil Bourassi  |   |  426  mots
Ali al-Naimi, ministre saoudien du pétrole depuis 1995, est considéré comme l'homme le plus influent de l'industrie énergétique.
Le ministre saoudien du pétrole a affirmé que son pays ne changera rien à son rythme de production y compris si le cours du baril baissait à 20 dollars. Il estime que le monde ne reverra plus un brent à 100 dollars.

"Il n'est pas dans l'intérêt des producteurs de l'OPEP de baisser leur production, quel qu'en soit le prix", a déclaré Ali al-Naimi, le ministre saoudien du pétrole. Dans une interview qualifiée par le Financial Times d'"inhabituellement franche", celui qui est considéré comme la figure la plus influente de l'industrie énergétique mondiale a écarté toute baisse de la production de brut y compris si le prix du baril atteignait 20 dollars. "Même s'il descend à 20, 40, 50, 60 dollars, c'est hors-de-propos", a-t-il ajouté.

Le baril à 100 dollars, c'est fini

Ali al-Naimi s'est ainsi confié à la revue spécialisée Middle East Economic Survey qui a publié cette interview lundi 22 décembre. Selon lui, le monde ne devrait pas retrouver un baril de pétrole à 100 dollars, insinuant ainsi que la situation actuelle devrait perdurer sur le long terme.

Si l'Arabie Saoudite se mettait à baisser sa production, "les prix repartiraient à la hausse, et les Russes, les Brésiliens et les producteurs américains de pétrole de schiste prendraient notre part", a affirmé le ministre saoudien.

Il a également expliqué que l'Arabie Saoudite comme d'autres pays du Golf pouvait aisément supporter un prix du baril de pétrole extrêmement bas puisque le coût de production est de 4 à 5 dollars pour eux. À l'inverse, le coût de production du pétrole de schiste américain est estimé entre 70 et 80 dollars. "Ils seront blessés avant que nous ressentions la moindre douleur", a-t-il lancé englobant également les forages en arctique, en Afrique de l'Ouest et au Brésil.

Une période alarmante

Pour les analystes, l'Arabie Saoudite est en train de marquer un tournant dans sa stratégie menée depuis les années 1970. Cité par le Financial Times, Jamie Webster, analyste chez IHS Energy explique:

"Nous sommes entrés dans une période alarmante pour le marché du pétrole pour les prochaines années, nous allons devoir nous habituer à beaucoup de volatilité."

Depuis juin, le cours du brent a perdu près de 50% de sa valeur. Il est ainsi passé de 113 dollars le baril à 60 dollars aujourd'hui, voire moins de 55 dollars ces dernières semaines, soit des niveaux jamais vus depuis le plus haut de la crise financière en 2009. Pour expliquer cette chute, les analystes estiment que les mauvaises perspectives vont faire baisser la demande, tandis que le monde dispose d'une offre abondante notamment avec le boom de la production du pétrole de schiste américain. D'autres, enfin, expliquent que la hausse du dollar tire les cours du pétrole vers le bas.