Electricité : Pas de « black out » mais des « coupures ciblées » possibles en janvier

Par latribune.fr  |   |  1032  mots
« On a une forme d'inquiétude ou de vigilance pour janvier », a averti la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), Emmanuelle Wargon, (Crédits : CHARLES PLATIAU)
Si la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), Emmanuelle Wargon s'est voulue rassurante, excluant toute perte totale de contrôle du système électrique, elle n'a pas écarté « des coupures ciblées, décidées, et qui tournent d'une ville à l'autre » en janvier en cas de météo trop froide et si les consommateurs ne réduisent pas leur consommation lors des alertes.

« On a une forme d'inquiétude ou de vigilance pour janvier », a averti la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), Emmanuelle Wargon, ce samedi matin. « On pensait que les risques commenceraient dès novembre ou décembre, et maintenant on est plus tranquille, on est vraiment rassuré sur novembre et décembre, en revanche comme il y a eu des décalages (de remise en production de certaines centrales nucléaires, NDR) chez EDF », a-t-elle indiqué sur France Info. Près de la moitié des 56 réacteurs d'EDF sont, en effet, à l'arrêt, pour des maintenances programmées ou des problèmes de corrosion avérés ou soupçonnés. La production d'électricité nucléaire devrait ainsi atteindre cette année un plus bas historique, entre 275 et 285 térawattheures (TWh).

Selon les prévisions publiées vendredi par le gestionnaire du réseau électrique RTE, le « scenario le plus probable » est celui de seulement environ 40 gigawatts (GW) de puissance du parc nucléaire disponibles début janvier, soit environ 65% de la capacité nucléaire installée. La perspective d'atteindre 45 GW comme initialement prévu le 14 septembre par RTE dans la présentation de son scénario hivernal, apparaît désormais « improbable », mais « pas impossible», selon Thomas Veyrenc, directeur exécutif en charge de la stratégie, de la prospective et de l'évaluation de RTE. EDF, de son côté, prévoit dans son calendrier officiel une disponibilité de 48 GW au 1er janvier, selon l'analyse de l'AFP. « Nous avons constaté un petit écart, mais réel par rapport à notre scenario central, un retard de l'ordre de deux semaines », sur la prévision de disponibilité du parc nucléaire, un écart qui pourrait être « plus significatif » en janvier, a encore indiqué RTE qui explique que cet écart est dû aux « mouvements sociaux » de septembre et d'octobre, qui ont mis un coup d'arrêt à des travaux ainsi qu'aux « retards et aléas techniques » dans la maintenance courante. En revanche, cette situation n'est pas liée aux travaux pour régler les problèmes de corrosion sous contraintes, programmés sur 16 réacteurs considérés comme « sensibles ou fortement sensibles » à ce phénomène.

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Pas question de « black out », mais des « coupures ciblées » possibles

Pas question pour autant de craindre un « black out », une perte totale de contrôle du système électrique, rassure la présidente de la CRE. « Le système qui saute, ça ne se produira pas ». Au-delà des centrales nucléaires, EDF peut en tout cas compter sur de meilleurs stocks hydrauliques pour faire tourner ses barrages, et sur le bon niveau de remplissage des réserves de gaz. « Le pire qui peut se produire, ce sont des coupures ciblées, décidées, et qui tournent d'une ville à l'autre » en cas de météo trop froide et si les consommateurs ne réduisent pas leur consommation lors des alertes, a-t-elle ajouté, voulant croire à la bonne volonté des Français en matière d'économies d'énergie. « Je suis très convaincue que le premier jour Ecowatt (dispositif d'alerte, ndlr) rouge tout le monde prendra ça au sérieux » pour réduire ponctuellement sa consommation et ainsi éviter une coupure, a-t-elle poursuivi.

Des alertes rouges Ecowatt pour réduire sa consommation

Une alerte rouge, d'Ecowatt signifie que le système électrique est très tendu (autrement dit, que la production et les importations ne suffiront pas à couvrir l'ensemble de la consommation) et qu'une coupure d'électricité, sous forme de délestage, est inévitable. Sauf, si la consommation baisse de manière volontaire et substantielle, grâce aux écogestes des consommateurs, particuliers et entreprises. Cette alerte se matérialisera par un SMS, email ou notification, envoyés trois jours à l'avance, et ce, seulement aux personnes qui se seront inscrites préalablement sur le site Ecowatt. L'alerte les invitera à réduire leur consommation de manière très ponctuelle, en baissant le chauffage d'un degré supplémentaire ou en remportant l'utilisation d'un équipement électrique dans la journée par exemple. Ces écogestes permettraient d'économiser jusqu'à 4 GW entre 8h et 13h et jusqu'à 5 GW entre 18h et 20h, selon RTE.

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Ce dernier a averti, la veille, des dangers qui pèsent sur le réseau électrique en janvier. Il estime que le risque de recours au dispositif Ecowatt, et en particulier au signal d'alerte rouge, apparaît « élevé sur le mois de janvier », même s'il « dépendra largement des conditions climatiques et de la possible survenue d'une vague de froid même modérée ». En d'autres termes, le risque que RTE appelle les Français à réduire leur consommation électrique en janvier, sous peine de coupures de courant, a augmenté. « Le mois de janvier concentre à présent davantage de risques » que dans son analyse antérieure, écrit RTE qui se dit, comme la CRE, confiant sur la tenue du réseau électrique pour la fin de l'année. Et ce, grâce à la baisse de la consommation électrique observée depuis plusieurs semaines (-6,6% sur 4 semaines par rapport à la moyenne de 2014 à 2019) qui « réduit le risque sur la sécurité d'approvisionnement » électrique pour l'hiver.

Pour autant, « le niveau de risque quantitatif est inchangé sur l'ensemble de l'hiver. Mais, il va se répartir un peu différemment : moins de risque en décembre, plus en janvier, moins fin février et mars. Mais, quantitativement sur l'hiver, c'est le même risque et donc le nombre de jours Ecowatt rouges attendus n'est pas modifié par rapport à ce que nous avons publié en septembre », a expliqué Thomas Veyrenc. En cas d'hiver normal, le nombre d'activations du signal Ecowatt rouge est estimé de 0 à 2, et de 0 à 5 en cas d'hiver froid, a dit RTE. « Nous engagerons tous les moyens de production », y compris à partir de fossiles (gaz et charbon) « avant de délester », a néanmoins assuré Jean-Paul Roubin, directeur exécutif clients et opération du système électrique de RTE.