Éolien en mer : le gouvernement va lancer des concertations en réponse à la grogne des riverains

Par latribune.fr  |   |  783  mots
Le premier, et seul parc commercial en fonctionnement actuellement en France, se situe au large de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) et a été inauguré fin 2022. (Crédits : STEPHANE MAHE)
Le gouvernement a donné l'ordre aux préfets d'organiser des concertations locales, qui devront se tenir à l'automne 2023, en vue du développement de parcs éoliens marins en France. L'exécutif souhaite développer son parc en mer mais fait face à la colère des riverains et des professionnels de la mer. Ces discussions auront donc pour but de tenter d'apaiser les tensions et de trouver des conciliations.

Feu vert pour les concertations territoriales avec les acteurs de la mer au sujet de l'éolien en mer - « offshore » dans le jargon. Les préfets ont reçu, mercredi, une circulaire leur demandant de les lancer, ont indiqué les ministères de la Mer, des Transitions écologique et énergétique ce jeudi 8 juin.

Le gouvernement français veut accélérer les projets, en témoigne le projet de loi adopté en début d'année qui envisage de déployer 50 parcs éoliens en mer à horizon 2050 pour atteindre les 40 GW de production.  L'État livre dans sa circulaire des fourchettes de production proposées par façade. À horizon 2033, 7 à 11 GW pourraient être déployés en Manche-Mer du Nord, 6 à 9,5 GW sur la zone Nord Atlantique Manche Ouest, 2,5 à 5,5 GW sur le Sud Atlantique et 3 à 4,5 GW en Méditerranée. La France veut ainsi lancer 18 GW de projets nouveaux d'ici 2033, et 14 GW supplémentaires d'ici 2050.

Rassurer les citoyens sur la pêche et la protection de la biodiversité

Pour tenir ces objectifs, les préfets devront d'abord réunir les acteurs de la mer au sein des conseils maritimes de façade, afin de préparer d'ici l'automne 2023 la tenue, pour la première fois et en simultané, de débats publics sur les quatre façades maritimes du pays. Ces débats auront notamment pour objet l'identification de « zones prioritaires de développement de l'éolien en mer » jusqu'en 2033 puis jusqu'en 2050.

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« La planification doit porter une vision stratégique des enjeux socio-économiques et environnementaux mais aussi donner de la visibilité à tous les acteurs du maritime ainsi qu'aux citoyens », soulignent les trois ministères.

Ils appellent aussi « à faire des débats publics régionaux une opportunité pour poser les enjeux d'avenir de tous les acteurs maritimes (pêche, transport maritime, nautisme, conchyliculture, construction navale...) ».

Le gouvernement prévoit aussi la définition de « zones de protection forte » pour répondre aux enjeux de préservation de la biodiversité et de compatibilité avec des activités économiques. Ces « ZPF » représenteraient à terme 5% de la surface à l'échelle des zones économiques exclusives.

La France très en retard sur l'éolien en mer

De complications administratives en recours systématiques, le pays ne compte à ce jour qu'un seul parc commercial en fonctionnement, au large de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Il a été inauguré fin 2022, 10 ans après son attribution. Ses 80 éoliennes doivent assurer l'équivalent de la consommation électrique annuelle de 700.000 personnes. Sept autres sont dans les tuyaux, à des stades plus ou moins avancés. S'ils ont été confiés à différents opérateurs, EDF domine largement puisqu'il en a cinq. Le plus grand prévu à ce jour doit prendra place au large de la Normandie d'ici à 2031 et alimentera 800.000 foyers en électricité.

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Développer la concurrence sera d'ailleurs essentiel dans le futur pour accélérer le déploiement de ce type de projet, comme l'indiquait en mars Emmanuelle Wargon, la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE). La France est actuellement en position de retard par rapport à ses voisins allemand, britannique ou scandinaves.

Selon elle, il faut aussi raccourcir l'instruction. « Aujourd'hui, le gouvernement suit une procédure de "période concurrentielle" : il y a d'abord un appel à qui peut concourir, puis la liste des compétiteurs potentiels, puis une discussion avec eux sur le contenu du cahier des charges, puis la publication de ce cahier des charges, et enfin l'appel d'offres lui-même. Je considère qu'on n'a plus besoin de faire ça : on pourrait publier directement un cahier des charges, ce qui nous ferait gagner environ six mois », indiquait-elle.

Les prochaines années seront cruciales

Étant donné l'actuelle lenteur pour déployer les projets, l'Etat souhaite maintenant appuyer sur l'accélérateur. D'autant plus que la consommation d'électricité en France est attendue en augmentation dans les années à venir, plus rapidement qu'attendu jusqu'à présent, selon le gestionnaire du réseau de haute tension RTE.

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Cette accélération de la consommation va contraindre le pays à doubler sa production d'énergies renouvelables d'ici à 2035, d'après l'organisme. « L'urgence » est de déployer l'éolien terrestre et le solaire, « qui peuvent être mis en œuvre dans des délais courts », selon Thomas Veyrenc, directeur exécutif de RTE. L'éolien en mer pourra ajouter sa contribution, « sous réserve que la France parvienne à attribuer massivement des parcs entre aujourd'hui et 2025 », prévient-il.

(Avec AFP)