L'Europe cherche à décupler les capacités des éoliennes en mer du Nord d'ici à 2050

Un sommet réunit ce lundi en Belgique neuf pays européens pour sceller l'ambition commune de décupler leurs capacités d'éoliennes en mer du Nord. Les dirigeants de sept pays de l'Union européenne (France, Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Irlande, Danemark et Luxembourg - grand financeur de projets), de la Norvège et du Royaume-Uni seront présents. Emmanuel Macron, le chancelier allemand Olaf Scholz ou encore le Premier ministre néerlandais Mark Rutte font le déplacement.
L'industrie européenne devrait fabriquer d'ici cinq ans l'équivalent de 20 GW d'éoliennes offshore par an, contre une capacité d'environ 7 actuellement.
L'industrie européenne devrait fabriquer d'ici cinq ans l'équivalent de 20 GW d'éoliennes offshore par an, contre une capacité d'environ 7 actuellement. (Crédits : Ben Barden / Vattenfall)

[Article publié le 24 avril et mis à jour à 13H45]

C'est en Belgique, à Ostende, au bord de la mer du Nord, que neuf pays européens se réunissent ce lundi pour notamment évoquer le développement de l'éolien en mer. « L'essentiel n'est tant pas d'énoncer des objectifs ambitieux que la rapidité d'exécution », a déjà indiqué le Premier ministre belge Alexander De Croo, à l'initiative du « sommet mer du Nord », en appelant à renforcer « la normalisation » technologique pour construire plus vite et à « mieux aligner les appels d'offres » pour ne pas saturer les chaînes d'approvisionnement.

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Ambition : 300 gigawatts (GW) d'ici à 2050

« Notre objectif commun d'énergie éolienne en mer du Nord est de 120 gigawatts en 2030, et d'au moins 300 GW en 2050 », ont d'ores et déjà déclaré les dirigeants des neuf pays dans une tribune publiée ce lundi par le site Politico. Les capacités actuelles cumulées sont d'environ 30 GW. « Notre chemin est tout tracé. Il s'agit maintenant d'accélérer le rythme », résument-ils. «

En mer du Nord, peu profonde, des éoliennes « peuvent être installées en nombre important » pas trop loin des côtes, « dans des conditions de vent permettant de produire beaucoup d'énergie » verte à un coût « particulièrement compétitif », a-t-on fait valoir de son côté l'Elysée, ajoutant que « les ordres de grandeur sont gigantesques (...) Chez nous comme chez nos voisins, l'éolien en mer sera vraisemblablement entre 2030 et 2050 la principale source de production d'énergie renouvelable, loin devant le solaire et l'éolien terrestre ».

En effet, si le Royaume-Uni compte 14 GW d'éolien en mer et l'Allemagne 8 GW, les capacités du Danemark, de la Belgique et des Pays-Bas s'établissent entre 2 et 3 GW, et celles en France et Norvège à environ 0,5.

Sabrer une dépendance aux énergies fossiles

Après une première réunion de quatre pays en mai 2022, ce second « sommet mer du Nord » s'inscrit dans les objectifs climatiques de l'Europe comme dans la volonté de sabrer sa dépendance aux énergies fossiles importées à la suite de la guerre en Ukraine. L'UE s'est récemment entendue pour doubler la part des renouvelables dans sa consommation énergétique d'ici 2030 pour la faire grimper à 42,5%, notamment en accélérant les procédures d'autorisation des infrastructures. Bruxelles a également proposé mi-mars des allègements réglementaires pour les industries vertes.

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« Il manque une mobilisation des financements »

Les objectifs d'Ostende sont réalisables « car l'Europe a un leadership technologique et industriel sur l'éolien offshore », mais « il manque une mobilisation des financements » pour soutenir la montée en puissance des chaînes de production, a prévenu Pierre Tardieu de la fédération industrielle WindEurope. Nacelles, pales, câbles... « On ne produit pas assez de certains éléments cruciaux aujourd'hui. Pas mal de financements vont à l'innovation, mais l'enjeu est d'investir dans des structures de production existantes dont il faut doubler, tripler la capacité. Les turbiniers fonctionnent actuellement à perte, frappés durement par les dérèglements logistiques suite au Covid, il faut un soutien public ponctuel », explique-t-il. Ce dernier pointe aussi les besoins massifs de formation et de recrutement : l'éolien en mer nécessitera 250.000 emplois en 2030, contre 80.000 aujourd'hui.

Autre difficulté : la dépendance européenne aux importations de composants critiques (terres rares...), notamment de Chine. L'industrie européenne devrait fabriquer d'ici à cinq ans l'équivalent de 20 GW d'éoliennes offshore par an, contre une capacité d'environ 7 actuellement... au risque d'usines saturées et de goulots d'étranglement sur les composants. Dans la tribune publiée ce lundi, les neuf pays résument ainsi leurs ambitions : accélérer les procédures d'autorisation, mieux coordonner les appels d'offres, « renforcer » les chaînes de production, diversifier les approvisionnements de composants critiques pour réduire leur dépendance à la Chine...

Le coût total s'annonce colossal : fin 2020, Bruxelles chiffrait à 800 milliards d'euros les besoins d'investissements si l'UE seule visait 300 GW d'éolien offshore d'ici 2050. Les ONG environnementales appellent, elles, à ne pas précipiter les études d'impact sur la biodiversité marine, et WindEurope pointe les contraintes liées à la pêche et au transport. Pour Pierre Tardieu, la réalisation des objectifs d'éoliennes demande l'utilisation de 7 à 10% du bassin maritime.

La France vise 40 gigawatts d'éolien offshore en raccourcissant les délais des appels d'offres

La France vise 40 gigawatts d'éolien offshore en service en 2050 sur l'ensemble des côtes. Pour l'heure, elle n'a inauguré qu'un seul parc offshore à Saint-Nazaire, avec 80 éoliennes qui doivent assurer l'équivalent de la consommation électrique annuelle de 700.000 personnes. Trois autres sont en construction, à Saint-Brieuc, Fécamp et Courseulles-sur-Mer. Fin mars, Emmanuelle Wargon, la présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), qui instruit les dossiers, expliquait vouloir faire évoluer les procédures. « Si on fait un appel d'offres tous les deux ans appelant entre 500 MW et 1 GW de puissance, on ne va pas aller assez vite. Ce serait donc bien d'appeler plus de puissance d'un coup, à la fois pour aller plus vite et pour diversifier ». Elle précise : «  aujourd'hui, le gouvernement suit une procédure de « période concurrentielle » : il y a d'abord un appel à qui peut concourir, puis la liste des compétiteurs potentiels, puis une discussion avec eux sur le contenu du cahier des charges, puis la publication de ce cahier des charges, et enfin l'appel d'offres lui-même. Je considère qu'on n'a plus besoin de faire ça: on pourrait publier directement un cahier des charges, ce qui nous ferait gagner environ six mois, et cette réforme pourrait s'appliquer dès les prochains appels d'offres ».

 (Avec AFP)

Retrouvez notre dossier LA REVANCHE DU NUCLEAIRE

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Commentaires 7
à écrit le 24/04/2023 à 18:24
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l'eolien comme le solaire sont des trompe l'oeil trop dependants du temps il ne faut pas negliger le nucleaire qui lui fonctionne par tout les temps s'il est bien entretenu maintenance oblige pensons bien que l'on consomme de plus en plus de jus e...

à écrit le 24/04/2023 à 16:16
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Ces 300 GW d'éolien en Mer du Nord ne produiront plus que ... 0 MW en cas d'anticyclone. Ceux qui auront misé à fond sur ces énergies aléatoires, comme les allemands auront besoin de solutions de secours (les backups). A tous les coups, puisqu'ils o...

à écrit le 24/04/2023 à 14:58
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C'est en Europe qu'on veut le plus sauver la planète avec les EnR, mais c'est aussi en Europe que les fabricants d'éoliennes : Vestas, Nordex, Siemens Gameça, ont des problèmes. Sans parler des fabricants de cellules photovoltaïques disparus depuis l...

à écrit le 24/04/2023 à 12:47
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Il faut bien sûr développer l’éolien offshore (supprimer tout l’éolien terrestre et ses taux de charge ridicules) -la France est un nain, il suffit de comparer à la Belgique, et c’est honteux car cela fait 20 ans que l’on en parle-, mais ne nous trom...

à écrit le 24/04/2023 à 8:55
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Derrière chaque éolienne vieille une centrale à gaz, personne ne parle de celle installée au centre de la Bretagne de 450MW. Par manque de clairvoyance nous assistons à une fuite en avant vers l'éolien pour éviter la solution du tout Charbon pour pro...

le 24/04/2023 à 15:01
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@Albert Il y a 40 ans, les Bretons ont refusé la centrale nucléaire de Plogoff au nom de la pureté écologique. Maintenant, ils n'ont pas assez d'électricité (d'où la centrale à gaz construite en vitesse), et les algues vertes : bravo, les mecs !

à écrit le 24/04/2023 à 7:50
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Sans politique de décroissance, vous pourrez toujours créer de l'énergie pour produire plus, mais cela vous emmène et nous emmènera par conséquent vers une ressource en eau de plus en plus misérable. Boire ou produire, il faut choisir....

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