Le pétrole à 20 dollars : fortement endetté, le géant du schiste Occidental se met au régime sec

Par Jérôme Marin  |   |  637  mots
(Crédits : iStock)
Le géant américain du pétrole de schiste va baisser les salaires de ses employés et réduire ses investissements. Il a également cédé aux exigences de l'investisseur Carl Icahn.

Plus encore que pour les majors pétrolières, la chute des cours du brut représente une menace existentielle pour Occidental Petroleum. Fortement endettée, la société texane spécialisée dans le pétrole et le gaz de schiste, a annoncé mercredi d'importantes mesures d'économies. "Cela va nous aider à résister aux prix bas des matières premières et aux pressions macroéconomiques", justifie Vicki Hollub, sa PDG.

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Baisse des salaires

Occidental va d'abord fortement réduire ses investissements, qui ne seront plus compris qu'entre 2,7 et 2,9 milliards de dollars en 2020. Initialement, la société projetait de dépenser plus de 5 milliards de dollars, en particulier pour poursuivre ses forages dans le bassin permien. Elle avait déjà revu à la baisse ses ambitions début mars. Elle table, par ailleurs, sur une baisse de 6% de sa production sur l'ensemble de l'année.

L'entreprise prévoit également d'accentuer la réduction de ses dépenses opérationnelles: au 1,1 milliard de dollars déjà prévu, s'ajouteront 600 millions d'économies supplémentaires. Cela passera notamment par une baisse des salaires des employés, pouvant atteindre jusqu'à 30%. La rémunération des équipes dirigeantes sera réduite de 68% en moyenne. Occidental espère ainsi ramener ses coûts de production à 7 dollars le baril, mais ne précise pas son point mort, le prix du brut qui lui permet d'être rentable.

Le schiste en péril

Retombé la semaine sous la barre des 20 dollars à New York (avant de repartir un peu à la hausse), le baril de pétrole n'avait plus évolué à de tels niveaux depuis 2002. En janvier, le brut cotait à plus de 60 dollars. Les cours sont victimes d'un double choc. Un choc de demande, d'abord, précipité par l'épidémie de coronavirus et ses conséquences sur l'économie. Un choc d'offre, ensuite, en raison du conflit opposant l'Arabie saoudite et la Russie, après l'échec de leurs négociations pour réduire leur production.

L'effondrement des cours pourrait fatal à de nombreux acteurs du schiste américain, qui traversait déjà, après des années fastes, une période difficile. En moyenne, les entreprises du secteur ont besoin d'un baril autour de 50 dollars pour être rentables. Certes, des efforts supplémentaires sur les coûts, comme ceux réalisés en 2014, peuvent permettre d'abaisser ce seuil. Mais le secteur s'est aussi fortement endetté: il devra rembourser 86 milliards d'emprunts sur les quatre prochaines années, selon les calculs de l'agence Moody's.

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Exigences de Carl Icahn

Pour Occidental, ces défis conjoncturels sont renforcés par le rachat, l'an passé, de son rival Anadarko pour 55 milliards de dollars. Pour financer cette opération, le groupe a creusé son endettement, passé de 10 à 50 milliards de dollars. Il a également sollicité l'investisseur Warren Buffett, qui a injecté 10 milliards de dollars. Et à qui ils doit désormais verser d'un dividende annuel de 8%. Début mars, face au plongeon du brut, Occidental avait déjà décidé de réduire le dividende versé à ses autres actionnaires de 86%.

La situation délicate de l'entreprise l'a aussi contrainte à céder à une partie des exigences de Carl Icahn, un autre investisseur phare de Wall Street. Le milliardaire, qui a profité de la forte chute du cours de l'action - passée de 67 dollars à 12 dollars en un an - pour mettre la main sur 10% du capital d'Occidental, réclamait depuis des mois un changement radical de gouvernance, dont le départ de la PDG. Celle-ci ne conservera que son poste de directrice générale. Mais elle sera mise sous la tutelle d'un comité de surveillance, où siégera deux nouveaux administrateurs nommés par Carl Icahn.