Les pionniers du green (4/8) : Hydrostor stocke l'énergie sous la mer

Par Giulietta Gamberini  |   |  822  mots
Cœur du système, un compresseur d'air, qui utilise l'électricité à stocker pour produire de l'air comprimé, ensuite envoyé dans des ballons sous-marin.
Pour conserver l'énergie issue des ressources renouvelables, uns startup canadienne propose d'utiliser la pression de l'eau. Une station pilote est d'ores et déjà installée sur les rives du lac Ontario.

Le paradoxe est bien connu: propres, potentiellement infinies, les énergies renouvelables (vent, soleil, marée, houle marine) présentent néanmoins le défaut majeur de leur intermittence. Au point que leur succès dépendra du développement de moyens de stockage permettant de garantir une offre continue et adaptée aux besoins.

Le système inventé par une entreprise canadienne, Hydrostor, qui utilise la pression de l'eau marine pour stocker l'électricité, fait partie de ces solutions d'avenir.

La station expérimentale alimente 330 maisons

Cœur du système, un compresseur d'air, qui utilise l'électricité à stocker pour produire de l'air comprimé. La chaleur relâchée est même récupérée et conservée dans des réservoirs d'eau, ce qui accroît l'efficacité du système. L'air comprimé est ensuite envoyé, via de gros tuyaux, dans des ballons fixés sous la mer (voir vidéo en fin d'article). Lorsque l'énergie stockée doit être utilisée, l'air est relâché: la pression de l'eau la repousse alors via les tuyaux vers la centrale. La chaleur stockée au début du processus est réutilisée à ce moment pour chauffer l'air. En passant à travers un expanseur qui commande un générateur, l'air produit de nouveau de l'électricité.

Une station pilote, qui a coûté 6 millions de dollars canadiens (un peu plus de 4 millions d'euros), a été installée en novembre 2015 à Toronto, dans le cadre d'une collaboration entre Hydrostor et le fournisseur d'énergie Toronto Hydro. Six ballons d'une capacité de 100 mètres cubes chacun sont fixés à 50 mètres de profondeur et à 2,5 km de la côte du lac Ontario. Mis en place en soutien d'une centrale éolienne, le dispositif est déjà en mesure d'alimenter 330 maisons.

50% moins cher que les batteries au lithium

Fondé sur le phénomène naturel de la pression hydrostatique (grosso modo, la pression de l'eau sur un corps immergé), ce moyen de stockage ne requiert l'utilisation d'aucun produit chimique et, dans sa version la plus simple, ne produit aucune émission de gaz à effet de serre. Les ballons sont fixés au sol (sous-marin) par un robot et "la station tourne toute seule", "afin de réduire au maximum le besoin en main-d'oeuvre", expliquait en mars à Toronto Cameron Lewis, président de la société, à La Tribune.

La startup canadienne affirme que la durée de vie de son dispositif, sans perte d'efficacité, serait de plus de 30 ans, et que les coûts seraient inférieurs de la moitié à ceux des batteries au lithium. Et le bruit produit par la station pilote à Toronto ne dépasse pas les 67 décibels.

Modulable selon la taille des ballons et leur profondeur

La solution est par ailleurs adaptable au besoins du réseau. La quantité d'énergie stockable peut varier en fonction du volume des ballons comme de la profondeur à laquelle ils sont fixés. De la chaleur peut être ajoutée au moment de l'expansion de l'air. La solution est d'ores-et-déjà commercialisée avec une capacité allant de 5 MW/30 MWh à 100 MW/1.000 MWh.

Si le système est essentiellement conçu pour pallier les inconvénients des énergies renouvelables, l'électricité stockée peut être issue de n'importe quelle source. Il peut ainsi aussi servir à compenser d'éventuelles pannes ou à équilibrer le rapport offre/demande entre heures pleines et heures creuses. La startup assure par ailleurs un service d'assistance complet, avant, pendant et après l'installation: "Le client doit seulement lui signaler combien d'énergie faut-il produire (ou stocker) et quand", lit-on sur le site de la société.

Selon Hydrostor, sa solution pourrait être la panacée des pays insulaires, "les seuls territoires qui adopteront de l'énergie renouvelable à 100% et qui auront donc particulièrement besoin de la stocker", souligne Cameron Lewis. C'est dans une île d'ailleurs que verra le jour la première station vendue par Hydrostor: celle d'Aruba, aux Antilles. La taille de la centrale n'est pas encore déterminée mais elle serait bien plus grande que celle de Toronto.

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[ VIDEO ] Hydrostor: comment ça marche (1/2): le principe

[ VIDEO ] Hydrostor: comment ça marche (2/2): la construction de la station

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>> Retrouvez les autres épisodes de la série "Les pionniers du green" réalisée par Giulietta Gamberini :

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