Rénovation : nouvel avantage fiscal dans l'ancien

Par César Armand  |   |  738  mots
Julien Denormandie, ministre de la Ville et du Logement. (Crédits : Reuters)
Le gouvernement crée une nouvelle niche fiscale pour les investisseurs prêts à se lancer dans des chantiers de rénovation destinés à la location dans les zones détendues.

Crédit d'impôt à la transition énergétique, éco-prêt à taux zéro, aides de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), certificats d'économie d'énergie, pacte énergie solidarités, aides locales... Selon une étude OpinionWay-Teksial rendue publique début novembre, 78 % des Français sont incapables de citer une subvention contribuant à mener des travaux de rénovation énergétique.

Il faut y ajouter une nouvelle aide pour les investisseurs qui souhaitent acheter un bien existant pour le mettre en location, annonce ce 3 décembre Julien Denormandie chez nos confrères des Echos.

« À condition de réaliser un montant de travaux représentant 25% du total de l'opération dans la limite de 300.000 euros, ils pourront déduire de leurs impôts sur le revenu entre 12 et 21% de leurs investissements, selon qu'ils loueront leur bien pendant 6, 9 ou 12 ans », a expliqué le ministre de la Ville et du Logement.

Ce nouveau dispositif s'inscrira dès le 1er janvier 2019 dans les 222 communes sélectionnées par l'État dans le cadre de l'opération Cœur de ville  ainsi que dans celles qui revitalisent déjà leur territoire. « C'est une bonne chose ! », s'exclame la députée (LREM) Marjolaine Meynier-Millefert, co-pilote du plan de rénovation énergétique.

« Ça permettra d'accélérer la rénovation des centres des villes moyennes ».

Vendredi dernier, c'était son collègue ministre de la Transition écologique et solidaire qui annonçait, sur BFMTV, « une réforme de notre système d'aides qui n'est pas efficace » et « la mobilisation de financements privés ».

François de Rugy évoquait même un « package » co-construit avec les acteurs du bâtiment, qu'il doit réunir cette semaine.

"Il faut des résultats de performance et de volume !"

Dans le contexte des manifestations des "Gilets jaunes", « cela sera difficilement compris, les propriétaires n'ayant bien souvent pas besoin d'aides pour rénover », estime Danyel Dubreuil, coordinateur de l'initiative Rénovons ! de l'ONG Cler-Réseau pour la transition énergétique.

« S'il n'y a pas d'obligation en face, cela risque aussi être de l'ordre de l'intention non suivie d'effet. Or, il faut des résultats de performance et de volume. »

La plateforme TravauxLib, intermédiaire entre particuliers et opérateurs, calcule les aides auxquelles sont éligibles ses clients et génère même les documents administratifs nécessaires.

« Ça change tout le temps entre le prélèvement à la source et des micro-détails comme la TVA. Est-ce que les gens sont prêts à faire des efforts pour l'écologie ? » s'interroge son co-fondateur Mathieu Burin. 
« En réalité, ce sont ceux qui le pouvoir d'achat nécessaire qui peuvent faire des travaux... »

Avec Axa, la jeune pousse lancera en 2019 une garantie de 15% sur tous les chantiers jusqu'à 500.000 euros maximum qui prendra le relais en cas de défaillance de la première entreprise sélectionnée.

« Notre objectif est de faire baisser toutes les factures d'énergie en rendant accessible des produits d'une gamme supérieure au même prix », poursuit le trentenaire.

Une centrale d'achats permet en effet aux entrepreneurs présents sur le site d'optimiser leurs dépenses de matériaux.

Vers un "permis de louer" conditionné à la réhabilitation ?

Le ministre Julien Denormandie promet que « l'aide aille bien aux travaux éligibles et ne serve pas à rénover une piscine ou à simplement rafraîchir des logements qui auraient besoin de travaux beaucoup plus lourds », mais il ne précise pas quelle sera la nature des vérifications. Dans le même temps, lors de l'examen du projet de loi de finances 2019, le gouvernement a retiré les fenêtres du crédit d'impôt bénéficiant aux particuliers.

Le responsable associatif Danyel Dubreuil propose donc comme « moyen de contrôle » un « permis de louer » conditionné à la réhabilitation du logement.

« Il manque un signal politique comme une date d'échéance à laquelle les passoires énergétiques ne pourraient plus être louées » justifie-t-il.

Une idée de malus en ce sens avait d'ailleurs été évoquée par l'ex-ministre Nicolas Hulot.

Entre l'annulation mi-septembre d'une prime qui aurait pu aider les familles plus modestes à se lancer et le lancement mi-octobre d'une initiative visant à rénover 684 copropriétés dans 26 collectivités ciblées, il n'est pas sûr que la multiplication de ces annonces tous azimuts convainque les « gilets jaunes » à revêtir leurs « gilets verts ». D'autant que les niches fiscales représentent encore 15 milliards d'euros... dans le domaine du logement.