Étiquetage alimentaire : ce que va changer le code couleur

Par Giulietta Gamberini  |   |  945  mots
Articulé autour de cinq couleurs allant du vert au rouge selon les caractéristiques nutritionnelles de l'aliment (calories, graisses saturées, sucres, sel ...), le dispositif testé présente tout d'abord l'avantage de faciliter considérablement le choix du consommateur.
L'UFC Que Choisir a testé les nouvelles étiquettes simplifiées, dont le principe est proposé par le projet de loi de santé publique. L'étude révèle que, loin de stigmatiser certains produits, elles restitueraient aux consommateurs la liberté de choisir en fonction de leurs goûts et du prix.

Non seulement il constitue un outil efficace pour lutter contre le surpoids et les maladies associées, mais il ne conduit à la stigmatisation d'aucune catégorie d'aliments. Ce sont les conclusions auxquelles est parvenue l'association de consommateurs UFC-Que Chosir après avoir testé, sur 300 produits alimentaires, le nouveau système d'étiquetage simplifié proposé début 2014 par le professeur Serge Hercberg et dont le principe est consacré par le projet de loi de santé publique.

Articulé autour de cinq couleurs allant du vert au rouge selon les caractéristiques nutritionnelles de l'aliment (calories, graisses saturées, sucres, sel ...), le dispositif testé présente tout d'abord l'avantage de faciliter considérablement le choix du consommateur, souligne l'association.

Jusqu'à présent confrontés au tableaux nutritionnels issus de la réglementation européenne - que huit personnes sur dix avouent ne pas comprendre - les consommateurs disposeraient désormais d'une indication saisissable en un coup d'œil sur la qualité globale de l'aliment. "Une information indispensable pour pouvoir rééquilibrer son alimentation et ainsi réellement assumer la responsabilité de sa  santé", souligne le président de l'UFC-Que Choisir, Alain Bazot.

Un "antidote contre le marketing nutritionnel"

L'étiquetage proposé permet par ailleurs de combattre certaines idées reçues, montre l'étude de l'association. De nombreux plats préparés décrochent en effet une pastille verte, alors que la note globale d'aliments soi-disant allégés ou arborant des mentions valorisantes se révèle être moins favorable que celle d'autres produits "normaux".

"Ainsi, malgré un emballage jouant sur les codes de la minceur, les céréales du petit déjeuner 'Spécial K' ou 'Nestlé Fitness' sont en orange comme la plupart des céréales standard pour enfants. 'Taillefine 0% avec "édulcorants', est en jaune comme la majorité des yaourts", note l'UFC dans son communiqué.

C'est pour cette raison que l'association parle d'"antidote efficace contre le marketing nutritionnel".

"Débarrassé des indications qui l'instrumentalisent, le consommateur retrouve sa liberté d'arbitrer et de choisir en fonction de son goût et du prix", souligne Alain Bazot.

Aucune famille de produits stigmatisée

Le code couleur révèle d'ailleurs une autre surprise: il ne stigmatise aucune catégorie de produits dans son ensemble. Au contraire, à l'intérieur d'une même famille, il semble plutôt refléter la réalité de la diversité de l'offre. Par exemple, "au rayon des pains de type muffins, on trouve aussi bien le produit 'Carrefour à la farine complète' arborant la couleur verte, qu'une version plus riche de 'Pasquier' affichée en rose", détaille l'étude.

Le résultat de l'adoption d'un tel système d'étiquetage devrait donc être celui d'inciter, par le jeu de la concurrence, les producteurs à améliorer leur offre. Un mouvement à rebours qui paraît tout à fait possible, puisque l'attribution des pastilles montre que celui inverse, vers une dégradation progressive de la qualité nutritionnelle, a bien été engagé par les marques : des corn flakes classiques de Kellog's au plus récent produit Trésor, l'augmentation progressive de la teneur en sucres et en graisses se traduit par une dégradation de la note de B à D.

L'UFC mobilisée

Tirant les conséquences de ces constats, l'UFC annonce donc se mobiliser pour la consécration au moins du principe d'un code couleur, qui suscite pourtant encore la perplexité de certains ministres tels que Stéphane Le Foll (Agriculture) et Carole Delga (Commerce, Artisanat, Consommation et Economie sociale et solidaire). Face aux critiques des industriels, insistant le plus souvent sur l'impossibilité d'évaluer un aliment sans tenir compte des portions et de la fréquence d'utilisation, Alain Bazot rétorque :

"Les pastilles permettront justement à tout chacun de décider en quelles quantités et à quelle fréquence consommer chaque aliment (...) Compte tenu du caractère inadapté des anciens systèmes d'étiquetage, on ne peut d'ailleurs pas affirmer que le modèle du code couleur dégrade l'information (...) La note globale est issue d'une analyse fine des valeurs nutritionnelles. Ses critères, d'abord définis par des scientifiques anglais, ont par la suite été adapté par l'équipe du  professeur Hercberg au régime français."

Le format encore à préciser

Une étude réalisée en 2013 par l'Inra confirmait d'ailleurs que, pour être efficace aux yeux des consommateurs, l'information véhiculée par les étiquettes alimentaires doit être globale et fondée sur les couleurs, argumente l'UFC. Un modèle de ce genre a d'ailleurs déjà été adopté au Royaume-Uni, où il a remporté le consensus  des principaux supermarchés et producteurs.

>> Lire : Royaume-Uni : pour bien manger, respectez le feu rouge !

L'association affirme néanmoins rester ouverte quant au format de l'étiquetage nutritionnel (nombre des couleurs notamment), qui devra être défini par décret. Elle admet par exemple que le système adopté de manière autonome par Carrefour, pourtant dénoncé par une partie de la communauté scientifique, "va dans le bon sens", malgré des critiques possibles.

>> Lire : Les médecins contestent le nouvel étiquetage nutritionnel de Carrefour

Le pari de la "concurrence nutritionnelle"

Le système d'étiquetage resterait par ailleurs facultatif, la réglementation européenne ne permettant pas à la France de l'imposer. Il aurait néanmoins l'avantage d'être unique : la diversité de ceux jusqu'à présent adoptés par certains marques constituant une source de confusion.

Et "si le consommateur s'habitue à un tel repère, un air de suspicion finira par planer sur les produits non étiquetés", parie l'association. Elle promet d'ailleurs qu'elle se chargera d'évaluer les produits qui échapperaient à un tel jeu de la concurrence.