Amazon va embaucher 3.000 CDI en France en 2021, cela suffira-t-il à éteindre la fronde ?

Par Jérôme Cristiani  |   |  845  mots
Fin janvier, la direction d'Amazon France estimait que le groupe était "devenu une cible pour certaines organisations qui souhaitent faire connaître les causes qu'elles représentent". (Crédits : Pascal Rossignol)
Le géant du e-commerce et de la logistique Amazon a annoncé qu'il allait créer 3 000 emplois en CDI en France en 2021, dans une démarche présentée sous le sceau de l'insertion des jeunes dans l'emploi et de l'égalité des chances.

Alors que le chômage atteint des niveaux des plus inquiétant partout en Europe et notamment en France où près d'un jeune sur quatre (23,4%) de moins de 25 ans ne travaille pas, le géant mondial du commerce en ligne Amazon fait une annonce particulièrement bienvenue : au nom de l'insertion des jeunes dans l'emploi et de l'égalité des chances, il prévoit de créer 3.000 emplois en CDI en France en 2021. Des postes qui seront répartis dans tout le réseau logistique d'Amazon en France, ainsi que dans les  bureaux en région parisienne.

Cette giga-offre d'emploi a été lancée en concertation avec Pôle Emploi, par la signature d'une convention dans laquelle l'entreprise américaine "s'engage à soutenir l'insertion des jeunes en recherche d'emploi, le développement des carrières et la promotion de l'égalité des chances".

Emplois directs et indirects : un poids économique et social croissant

Dans son communiqué, Amazon n'oublie pas de signaler que ce n'est pas sa première campagne d'embauche, car ces "emplois s'ajouteront aux 2 200 postes en CDI créés en 2020", des emplois qui fera grimper l'effectif total de l'entreprise en France au-dessus de la barre des 14.500 salariés employés en CDI d'ici la fin de l'année, comme un petit rappel aux pouvoirs publics et autres stakeholders de son poids économique et social à l'intérieur de l'Hexagone.

« Nous avons investi plus de 9,2 milliards d'euros dans nos activités en France entre 2010 et 2019. Par ces investissements, Amazon est devenu un créateur d'emplois majeur dans le pays. À la fin de l'année, nous emploierons plus de 14 500 collaborateurs en CDI répartis sur l'ensemble du territoire », souligne Frédéric Duval, le DG d'Amazon France.

Il rappelle également que son activité profite à tout un écosystème  :

« En outre, notre activité est à l'origine de dizaines de milliers d'emplois indirects supplémentaires en France, créés par les entreprises partenaires qui contribuent à notre chaîne d'approvisionnement ou par les milliers de PME françaises qui utilisent les outils et services que nous mettons à leur disposition pour développer leur activité en ligne. »

Amazon prend soin de préciser que ces embauches ne seront pas comme on s'y attendrait concentrées sur des postes peu rémunérés comme celui des préparateurs de commandes, mais que le programme prévoit d'engager d'autres profils : "ingénieurs, jeunes diplômés, chargés de ressources humaines, informaticiens, spécialistes de la santé et de la sécurité, etc."

"Amazon détruit plus d'emplois qu'il n'en crée"

Cette campagne d'embauche intervient dans un contexte très tendu, qui voit de nombreuses manifestations prendre pour cible l'enseigne internationale. Fin janvier, plusieurs centaines de militants se sont rassemblés dans plusieurs villes de France pour protester contre Amazon, notamment près du Pont-du-Gard, où le géant américain de vente par correspondance projette d'installer un entrepôt de 38.000 m2. Mais aussi près de Nantes, Perpignan et dans le Grand Est.

Ainsi, le samedi 30 janvier dernier, quelque 200 personnes avaient participé à un rassemblement à Carquefou, dans la banlieue de Nantes, devant un entrepôt logistique Amazon. Et Sophie Jallier, porte-parole du collectif pour cet événement, avait expliqué à l'AFP les raisons de la protestation :

"On dénonce le fait qu'Amazon détruise plus d'emplois qu'il n'en crée et qu'il s'agit d'emplois précaires qui rendent malades, notamment en terme de troubles musculo-squelettiques."

 Le même jour, lors d'une manifestation à Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) d'opposants à l'installation d'une plateforme Amazon, Éric Barbier, d'Alternatiba Pyrénées-Orientales, témoignait des motivations de la contestation :

"Amazon pratique une concurrence déloyale à l'égard des commerces qui paient leurs impôts en France". Par ailleurs, dénonçait-il, "la plupart des travailleurs sont en contrat précaire, embauchés en période de pointe comme lors du Black Friday ou à Noël et on les jette ensuite".

Face à ce mur de contestations réparties sur tout le territoire, la direction d'Amazon lançait alors une contre-offensive par voie de communiqué de presse et, on l'a vu récemment sur nos écrans, à coups de spots de publicité vantant les vertus du travail au mérite dans ses entrepôts.

Lire aussi : Des centaines d'opposants à l'implantation d'entrepôts Amazon ont défilé samedi en France

Pratiques anticoncurrentielles et ruine du commerce de proximité

Les problèmes d'Amazon sont loin d'être franco-français. Car la liste des griefs contre le géant américain de l'e-commerce ne s'arrête pas au fait qu'il est accusé de ruiner le commerce de proximité, de générer un intense trafic routier et de maltraiter ses salariés. En effet, Amazon, fait également l'objet de deux enquêtes de la Commission européenne : le 10 novembre dernier, Bruxelles a informé le géant américain de la distribution en ligne qu'il avait « enfreint les règles de l'Union européenne en matière de pratiques anticoncurrentielles en faussant la concurrence sur les marchés de détail en ligne ».

Lire aussi : Pourquoi les pratiques d'Amazon sont dans le collimateur de Bruxelles