Financement des PME : les banques se défendent de ne pas prêter suffisamment

Par Christine Lejoux  |   |  726  mots
Les crédits bancaires représentent 95% du financement des PME européennes. Copyright Reuters
Lors des Assises européennes du financement des PME, qui se déroulaient ce lundi à Bercy, les patrons du Crédit Mutuel et du Crédit Coopératif ont rappelé qu'eux aussi étaient des entrepreneurs. Et, qu'à ce titre, ils ne prêtaient qu'à des sociétés suffisamment solides pour les rembourser.

A en croire les banques, le financement des PME ne serait nullement un problème, contrairement à ce que prétendent celles-ci. « Au premier semestre, les encours de crédits que nous avons octroyés aux PME ont augmenté de 4%, par rapport à la même période de l'an dernier. Ce qui montre que les choses se passent de façon plutôt correcte », a assuré Michel Lucas, président du Crédit Mutuel, lors des Assises européennes du financement des PME, qui se déroulaient ce lundi à Bercy, sous l'égide du ministère de l'Economie, de la Banque européenne d'investissement (BEI) et de l'association PME Finance. « Les banques coopératives représentent plus de 50% du financement des PME en France », s'est insurgé de son côté Jean-Louis Bancel, le patron du Crédit Coopératif.

Les prêts bancaires représentent 95% du financement des PME européennes

Pourtant, les chiffres sont là : le crédit au secteur privé a fléchi de 0,9% en avril, dans la zone euro, soit un douzième mois de recul d'affilée, selon la Banque centrale européenne (BCE). Certes, les situations sont très différentes d'un pays à l'autre, avec des insuffisances de financement particulièrement graves dans certains pays d'Europe du Sud, comme la Grèce. Mais, globalement, « le crédit bancaire aux entreprises européennes fléchit depuis 2009, et les PME sont les plus touchées », affirme Jean Rognetta, président de PME Finance. Une situation d'autant plus préoccupante que « les prêts bancaires représentent 95% du financement des PME européennes », rappelle Delphine d'Amarzit, chef du service du financement de l'économie, à la direction générale du Trésor. Contrairement aux Etats-Unis, où le financement des entreprises est beaucoup plus « désintermédié », c'est-à-dire assuré par les marchés financiers.

Les grands argentiers se font les avocats des banques

Pour autant, les banques ont trouvé un avocat en Delphine d'Amarzit, pour qui la faible dynamique du crédit aux entreprises ne correspond pas à « une raréfaction de l'offre mais résulte plutôt du mouvement de déstockage entrepris par les PME », et de la frilosité de ces dernières à investir, compte tenu de la mauvaise conjoncture économique. « Si une banque ne prête pas à une PME, ce n'est pas forcément parce qu'elle ne le veut pas », a renchéri Benoît Coeuré, membre du directoire de la BCE, invoquant la future réglementation de Bâle III relative au renforcement des fonds propres des banques, qui pèsera sur la capacité de ces dernières à prêter. « Le système bancaire européen répond presque toujours positivement aux demandes de crédits d'investissement », a insisté Robert Ophèle, sous-gouverneur de la Banque de France. Tout en reconnaissant que « cela était parfois moins vrai pour les prêts à court terme. »

Des banquiers qui se disent aussi des entrepreneurs

« Il faut accepter que nous sommes, nous aussi, des entrepreneurs. Et que nous pouvons parfois estimer que le projet qu'un autre entrepreneur nous demande de financer n'est pas viable », s'est défendu Jean-Louis Bancel, président du Crédit Coopératif. Pour qui « la pire chose qui pourrait arriver serait la création d'un droit au crédit opposable », obligeant par exemple les banques à justifier par écrit tout refus de crédit, comme cela avait été suggéré en 2010 par Nicolas Dupont-Aignan, chef de file de Debout la République (ex-UMP).

Filant lui aussi la métaphore du banquier-entrepreneur, Michel Lucas, président du Crédit Mutuel, a rappelé qu'il avait « démarré dans une PME de 800 salariés, qui en compte aujourd'hui près de 78.000. » Et que si cette PME - en l'occurrence le Crédit Mutuel - était devenue grande, c'est parce qu'elle avait toujours « essayé d'aider les PME, mais sans faire trop de bêtises. » Par exemple sans financer systématiquement toutes les soi-disantes merveilleuses start-up de la fin des années 1990, qui ont été nombreuses « à se casser la figure au moment de la bulle Internet. » Et le patron du Crédit Mutuel d'enfoncer le clou : « Solidarité rime avec solidité. Nous ne prêtons qu'aux entreprises qui ont une colonne vertébrale suffisamment solide pour nous rembourser. » Un argument de bonne gestion qui a valu à Michel Lucas les applaudissements des... patrons de PME présents dans la salle.