Taxis contre VTC : les règles du jeu sont fixées mais restent floues

Par Mounia Van de Casteele  |   |  741  mots
Le texte entend permettre aux taxis d'être géolocalisés, avec la création d'un "registre de disponibilité des taxis" géré par l'Etat, sur la base du volontariat et sans surcoût. A l'inverse, les VTC ne pourront plus recourir à cette maraude électronique et devront s'en tenir au marché des courses avec réservation préalable.
Les députés ont adopté mercredi en commission la proposition de loi Thévenoud sur les taxis et les VTC - rebaptisés voitures de transport avec chauffeur -, telle que modifiée par le Sénat. Mais un certain flou demeure, notamment concernant la géolocalisation et la tarification... Explications.

Voilà VTC et taxis enfin fixés sur leur sort. Les députés ont en effet adopté mercredi 10 septembre en commission la proposition de loi Thévenoud sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur (nouvelle dénomination des VTC) telle que modifiée par le Sénat sur l'article polémique stipulant aux seconds de retourner à leur base entre chaque course.

La proposition de loi, qui vise plus généralement à sortir du conflit des derniers mois entre taxis et VTC en interdisant à ces derniers d'être repérées par les smartphones, doit maintenant être définitivement adoptée en séance par l'Assemblée en seconde lecture le 18 septembre.

Savary remplaçant de Thévenoud

C'est le député (PS) Gilles Savary, qui a repris "au débotté" la fonction de rapporteur du texte qui était jusque là occupée par le désormais célèbre Thomas Thévenoud, auteur de la proposition de la loi avant d'entrer au gouvernement pour neuf jours. Spécialiste des transports, Gilles Savary, cité par l'AFP, n'a pas manqué d'ironiser:


"Je ne doute pas que ma nomination est due à mes qualités personnelles"

A l'origine, les VTC contestaient vigoureusement l'une des dispositions du texte les obligeant après une course à

"retourner au siège de l'entreprise ou dans un lieu, hors de la chaussée, où le stationnement est autorisé".

Pas de retour à la base entre deux réservations

Suite à leurs protestations, le Sénat avait fin juillet adopté un amendement modifiant cette disposition: les voitures de transport avec chauffeur devront retourner à leur base "sauf s'ils justifient d'une réservation préalable ou d'un contrat avec le client final".

Par ailleurs, le texte entend permettre aux taxis d'être géolocalisés, avec la création d'un "registre de disponibilité des taxis" géré par l'Etat, sur la base du volontariat et sans surcoût. A l'inverse, les VTC ne pourront plus recourir à cette "maraude électronique" et devront s'en tenir au marché des courses avec réservation préalable, sous peine de "15.000 euros d'amende et un an d'emprisonnement". Prendre des clients à la volée dans la rue relève en effet de la prérogative des seuls taxis.

"Une escroquerie" ?

"C'est une véritable escroquerie", s'insurge Maxime Bourdon, le fondateur de Drive. Celui-ci déplore en effet un texte en faveur des taxis, auxquels "on apporte sur un plateau une technologie" que ses équipes, comme celles d'autres VTC, développent depuis deux ans.

Le dirigeant ironise en outre :

"Avouez que c'est tout de même curieux: le gouvernement est en train de réformer les professions réglementées (comme les taxis, Ndlr), or là, il fait complètement l'inverse !"

Un certain flou demeure

Cela dit, le texte reste assez flou quant à l'utilisation de la géolocalisation par les VTC. Le texte indique ainsi qu'est interdit:

"Le fait d'informer un client, avant la réservation (...), quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponobilité d'un véhicule"

Ce qui peut laisser entendre que les VTC pourront continuer à afficher sur les applications qu'ils utilisent une carte montrant la localisation des véhicules à proximité, sans préciser la distance à laquelle ils se trouvent du client, note Yann Ricordel, le PDG de Taxis Bleus. Tout réside dans l'interprétation du "à la fois", précise-t-il.

Tarification horokilométrique ou au forfait

Concernant les tarifs praticables par les VTC, le texte précise que:

"Le prix total de la prestation (...) est déterminé lors de la réservation préalable (...). Toutefois, s'il est calculé uniquement en fonction de la durée de la prestation, le prix peut-être, en tout ou partie, déterminé après la réalisation de cette prestation (...)"

Ce qui laisse entendre qu'une tarification horokilométrique, telle qu'elle est pratiquée par Uber, n'est pas incompatible avec la législation.

Lire: Une victoire d'Uber face aux taxis

Autant de subtilités qui risquent de laisser perdurer un certain flou, ou du moins, des différences d'interprétation. D'où la nécessité, selon Yann Ricordel

"d'élever le débat et de clarifier la loi via les décrêts. Il faut travailler sur les moyens à mettre en œuvre pour que l'encadrement subsiste et soit respecté par tous."

Bref. Désormais les règles sont fixées. Reste à voir comment elles seront interprétées et appliquées...

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Article actualisé jeudi 11 septembre.