Autoroutes : la hausse des péages ne dépassera pas 3% en 2024 promet Clément Beaune

Par latribune.fr  |   |  935  mots
Le ministre délégué aux Transports a réaffirmé que la taxe prévue par le gouvernement sur les sociétés de concessionnaires d'autoroute « n'a aucun impact sur l'évolution des péages ». (Crédits : BENOIT TESSIER)
La hausse annuelle des péages d'autoroutes sera « inférieure à 3% » en 2024, a assuré ce mercredi le ministre délégué aux Transports Clément Beaune. Contre +4,75% en 2023, mais +0,44% en 2021. La faute à l’inflation qui, bien qu’en baisse, reste élevée. Cette annonce intervient dans un contexte de tensions entre le gouvernement et des sociétés concessionnaires au sujet d'une augmentation de la fiscalité.

[Article publié le mercredi 29 novembre à 8h46, mis à jour à 13h22]

3% : c'est l'augmentation maximale qui sera appliquée aux péages d'autoroutes à partir du 1er février 2024. « L'année prochaine, il y aura une hausse qui sera limitée, une hausse qui sera inférieure à 3% », a, en effet, promis Clément Beaune à l'antenne de RMC ce mercredi.

C'est bien moindre que les +4,75% de cette année 2023, mais bien au-dessus des +2% de 2022 et surtout des +0,44% de 2021. Les raisons de telles différences ? L'inflation. Les prix des péages sont, en effet, revalorisés tous les ans selon un calcul qui prend en compte au minimum 70% de l'inflation (hors tabac) sur douze mois jusqu'en octobre, et d'éventuelles augmentations en fonction des travaux prévus par les différents concessionnaires. Pour rappel, la hausse des prix a atteint +4% sur un an ce mois d'octobre.

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Interrogé sur la possibilité d'une hausse plus importante des péages en 2025, le ministre a botté en touche. « On verra ce qu'est l'inflation en 2024, les indications qu'on a (...) c'est une inflation qui tourne autour de 2,5%, donc on aura peut-être des hausses l'année suivante, mais qui seront modérées aussi », a-t-il indiqué.

Une taxe qui ne passe pas

Cette déclaration du ministre intervient alors que des tensions couvent depuis plusieurs mois entre le gouvernement et les sociétés d'autoroutes. Car l'exécutif envisage sérieusement de les taxer ces dernières, estimant leur rentabilité trop élevée. L'objectif affiché avec cette manne supplémentaire est de financer la transition écologique et le transport ferroviaire.

Dans son budget 2024, le gouvernement prévoit ainsi une nouvelle taxe sur les concessions d'autoroute ainsi que sur les grands aéroports. Cet impôt « sur les infrastructures de transport de longue distance » doit rapporter 600 millions d'euros par an dès 2024. Les trois quarts des recettes viendraient du secteur routier et un quart de l'aérien, selon le ministre de l'Économie Bruno Le Maire.

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Cette enveloppe servira à financer « des investissements dans les bornes électriques » mais aussi « le leasing social pour que cela soit moins cher d'avoir une voiture électrique et l'achat de nouveaux trains », a expliqué Clément Beaune ce mercredi.

Reste que pour les acteurs des autoroutes, hausse des taxes signifie « inévitablement une hausse des tarifs des péages », dixit le président de Vinci Autoroutes Pierre Coppey fin septembre.

Vinci menace d'une hausse de 5%...

Mi-novembre, il s'est d'ailleurs fait plus précis. Pour lui, augmenter les taxes sur les autoroutes est un « contresens ».

« C'est inévitablement moins d'investissement au moment où il y a besoin d'en faire beaucoup et c'est inévitablement aussi une hausse de tarifs que nous évaluons aujourd'hui de l'ordre de 5% compte tenu d'une taxe de 4,6% sur le chiffre d'affaires des autoroutes », a-t-il déclaré.

Des propos que Clément Beaune balaie d'un revers de la main. « Il y a eu beaucoup d'intox, il y a eu beaucoup parfois de mensonges liés à cette taxe sur les sociétés de concessionnaires d'autoroute. Elle n'a aucun impact sur l'évolution des péages », a-t-il affirmé ce mercredi. La hausse évoquée par Vinci, « c'est non », a martelé le ministre. « C'est l'État qui à la fin prend un texte juridique qui valide cette évolution des péages ». Ceux qui évoquent une répercussion de la taxe « ne disent pas la vérité aux Français ».

... et de recourir à la justice

Celui qui est aussi directeur général adjoint de Vinci a tout de même menacé de recourir à la justice pour avoir gain de cause. « C'est une mauvaise idée que nous contestons et que nous contesterons par tous les moyens si le gouvernement n'y renonce pas ou si le Parlement persiste à voter ce projet. Cela va se jouer sur le terrain de la justice administrative, de la justice constitutionnelle et le cas échéant de la justice européenne, mais peut-être trouvera-t-on une solution avant », a-t-il prévenu.

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Son concurrent Eiffage avait lui aussi indiqué fin septembre avoir l'intention de « mettre en œuvre toutes les voies de recours et tous les moyens appropriés afin de faire valoir ses droits, notamment quant au respect du contrat » avec l'État. Argument de ces entreprises : « en cas de modification, de création ou de suppression (...) d'impôt, de taxe ou de redevance spécifique aux sociétés concessionnaires d'autoroutes », ces dernières ont droit à « des mesures de compensation, notamment tarifaires ».

Les aéroports, fédérés par leur association UAF, ont eux aussi laissé planer la possibilité d'un recours contre cet alourdissement de la fiscalité, au moment où le secteur aérien revient tout juste dans le vert et reste encore très endetté après la profonde crise due au Covid-19.

Un sujet de tension récurrent

La hausse des péages autoroutiers constitue en tout cas un feuilleton politico-économique récurrent. En 2015, Ségolène Royal, alors ministre de l'Écologie, avait obtenu un gel des tarifs, mais il avait été contrebalancé par des hausses de 2019 à 2023 dans le cadre d'un accord qui avait aussi prévu un allongement de concessions et un plan de relance autoroutier de 3,2 milliards d'euros. Selon le régulateur des activités ferroviaires et routières (Arafer, devenu depuis ART), ce gel avait en fait coûté 500 millions d'euros aux usagers.

(Avec AFP)