Interdiction d'UberPop : "Le problème du taxi clandestin est désormais réglé" (VTC)

Par Mounia Van de Casteele  |   |  939  mots
Contrairement à UberPop, Heetch ou Mapool, les applications Sharette et BlaBlaCar mettent en contact des passagers avec des conducteurs qui ont décidé de se rendre d'un point A à un point B.
Si la loi interdit le transport de personnes entre particuliers à titre onéreux pratiqué par des applications pour mobile comme Heetch, Mapool ou UberPop, un certain flou demeure dans le code des transports s'agissant de la définition du "covoiturage". En attendant, le cofondateur du VTCiste Marcel estime qu'une partie du problème est réglée.

"Nous ne pouvons qu'être ravis par cette décision qui confirme le fait qu'une profession réglementée doit l'être pour tout le monde sans dérogation (...) Le problème du taxi clandestin est désormais réglé", a confié à La Tribune Bertrand Altmayer, co-fondateur de Marcel Chauffeur, au lendemain de la confirmation de l'interdiction d'UberPop, par la décision du Conseil constitutionnel.

Les Sages de la rue Montpensier ont en effet estimé que l'article 3124-13 de la loi Thévenoud punissant de deux ans de prison et 300.000 euros d'amende "le fait d'organiser un système de mise en relation de clients avec des personnes qui se livrent" au transport de passagers à titre onéreux sans être des entreprises de transport, des taxis ou des VTC, était parfaitement conforme à la Constitution, tandis qu'Uber avançait, dans sa question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qu'il était contraire au principe d'égalité et de liberté d'entreprendre. Les neuf Sages ont en outre considéré que cet article n'avait "ni pour objet ni pour effet" d'interdire le covoiturage.

UberPop, Heetch, même combat ou pas ?

Uber a déploré dans un communiqué la décision du Conseil constitutionnel, tout en se mettant habilement dans le même sac que Heetch, ainsi que "les autres applications de transport entre particuliers en ville":

 Or, Heetch, contactée par La Tribune, n'a pas souhaité réagir. On sait cependant que son fondateur Teddy Pellerin estime ne pas se sentir concerné par la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la QPC introduite par Uber, car selon lui, son application mobile s'inscrit dans l'économie du partage, contrairement à UberPop. Ce qu'il justifie par le fait que le passager donne ce qu'il veut à l'issue de la course, tout comme avec l'application Mapool. Aucun montant n'est exigé. Par ailleurs, les revenus générés par cette activité ne peuvent excéder 6.000 euros par an. Ce, afin de montrer qu'il s'agit bien d'un complément d'activité - un modèle également soutenu par la jeune pousse Mapool - tandis qu'il était reproché à UberPop la possibilité voire l'incitation à exercer une activité à temps plein... C'est d'ailleurs pour cela que Teddy Pellerin avait refusé de suspendre son service après l'arrêté préfectoral exigeant la suspension des "applications de type UberPop". Si bien qu'une centaine de chauffeurs ont été placés en garde à vue puis relâchés et quelques véhicules ont été saisis.

Le covoiturage cherche sa définition

Pour autant, ce plafond suffit-il à distinguer une activité de covoiturage à ce qui s'apparenterait à du "taxi clandestin" ? Pour Yves Weisselberger, co-fondateur du VTCiste SnapCar et président depuis lundi de la FFTPR - la Fédération française de transport de personne sur réservation créée par Benjamin Cardoso (Le Cab) -, la question mérite d'être posée et c'est "aux pouvoirs publics d'en décider", répond-il à La Tribune. D'autres, comme Bertrand Altmayer de Marcel ou comme le patron de la célèbre plateforme BlaBlaCar, sont moins nuancés, estimant que pour pouvoir parler de covoiturage, le conducteur doit initialement avoir prévu de se déplacer d'un point A à un point B. Et ce, quoi qu'il advienne, autrement dit, avec ou sans passagers. Didier Hogrel, président de la Fédération nationale du taxi (FNDT) contacté par La Tribune, abonde dans leur sens, arguant que le covoiturage concerne uniquement "des gens qui se sont donné rendez-vous à un endroit précis et participent aux frais du voyage". Ce qui n'est bien entendu pas le cas des applications telles qu'UberPop, Heetch, ou encore Mapool, dont les conducteurs s'adaptent à la demande. En revanche, si telle était la définition du covoiturage, BlaBlaCar et la jeune pousse Sharette, seraient, quant à elles bel et bien dans les clous semble-t-il...

Reste que selon le code des Transports :

Art. L. 1231-15.-Le covoiturage est l'utilisation en commun d'un véhicule terrestre à moteur par un conducteur non professionnel et un ou plusieurs passagers majeurs pour un trajet commun. En cas d'inexistence, d'insuffisance ou d'inadaptation de l'offre privée, les autorités mentionnées à l'article L. 1231-1, seules ou conjointement avec d'autres collectivités territoriales ou groupements de collectivités intéressés, peuvent mettre à disposition du public des plates-formes dématérialisées facilitant la rencontre des offres et demandes de covoiturage. Elles peuvent créer un signe distinctif des véhicules utilisés dans le cadre d'un covoiturage. Dans ce cas, elles définissent au préalable ses conditions d'attribution.

Sauf que selon ce même code, d'après la décision du Conseil constitutionnel, les prestations de transport "à titre onéreux" seraient admises, au "titre II du livre Ier de la troisième partie du code des transports" uniquement pour "les taxis, les voitures de transport avec chauffeur, les véhicules motorisés à deux ou trois roues ainsi que les entreprises de transport routier pouvant effectuer les services occasionnels".

Cela sous-entend-il qu'un service de "comotorage" (transport de personne par des particuliers à moto et moyennant une certaine indemnisation), tel que le propose la jeune pousse Mapool serait autorisé ? Mais qu'en revanche, le même service est interdit avec une voiture ?

Autant dire qu'un certain flou demeure. D'où les problèmes actuels d'ailleurs. Bref, une clarification s'impose. Et c'est d'ailleurs le but de la concertation avec les organisations professionnelles qui doit avoir lieu début octobre afin d'y voir plus clair et notamment faire le point sur la loi Thévenoud, un an après.