Les taxis de Marseille, Nantes et Strasbourg stoppent UberPop

Par Mounia Van de Casteele  |   |  711  mots
L'annonce de l'arrivée du service UberPop à Marseille, Nantes et Strasbourg avait provoqué lundi une levée de bouclier des chauffeurs de taxis qui avaient bloqué des artères des villes concernées avec leurs véhicules.
Les taxis de Marseille et Nantes ont obtenu l'interdiction de l'application UberPop après l'annonce de la disponibilité de ce service controversé dans ces villes du sud et de l'ouest de la France, ainsi qu'à Strasbourg.

Aussitôt arrivées, aussitôt interdites. Alors qu'Uber annonçait lundi l'arrivée de voitures UberPop à Marseille, Nantes et Strasbourg, complétant ainsi son offre régionale bon marché de chauffeurs non professionnels, les taxis de l'Ouest et de la cité phocéenne ont obtenu mardi l'interdiction de l'application si controversée.

Il faut dire que la nouvelle n'avait pas de quoi réjouir les chauffeurs de taxis, particulièrement remontés contre ce service vu comme de la concurrence déloyale. Bien au contraire. Surtout dans un climat particulièrement tendu pour la profession, notamment à Paris avec la décision gouvernementale de leur imposer des forfaits aéroports, et la suspension de leur accès prioritaire sur l'autoroute A1.

UberPop, un service concurrent d'UberX

Pour rappel, l'application mobile Uber présente dans des centaines de villes de 58 pays permet de mettre en relation, via leur smartphone, clients et voitures de tourisme avec chauffeurs (VTC) professionnels (UberX). Mais elle propose également un service de covoiturage (UberPool) ainsi qu'une offre de VTC "low cost" avec des chauffeurs non professionnels (UberPop), censés arrondir leurs fins de mois et non pas exercer un métier à temps plein comme les professionnels du secteur.

Ils sont cependant vus d'un mauvais oeil par tous les autres acteurs qui les accusent de concurrence déloyale, qu'il s'agisse des taxis, des VTCistes, mais également des chauffeurs d'UberX. Cela dit, depuis peu, Uber demande à tous ses chauffeurs (UberPop inclus) de créer un statut d'autoentrepreneur assuré en Responsabilité civile professionnelle, d'obtenir une attestation d'aptitude physique auprès d'un médecin agréé en préfecture. Les chauffeurs doivent en outre effectuer une formation complémentaire, suivie d'un test, approfondi "notamment en matière de sécurité routière lors de trajets avec des passagers".

Maelstrom juridique

Mais pour l'heure, tant que tous les chauffeurs ne seront pas des professionnels, cette activité restera interdite par la loi dite Thévenoud, entrée en vigueur le 1er janvier dernier. C'est d'ailleurs pour cela que diverses préfectures ne se privent pas de déclarer l'illégalité de ce service et d'en interdire l'exercice (comme dans le Nord récemment). Et que le gouvernement multiplie les contrôles - 380 procédures auraient été engagées "contre les chauffeurs sur les grandes métropoles", assure-t-il. Uber a d'ailleurs été condamné à 100.000 euros d'amende par le tribunal correctionnel de Paris fin 2014 pour son service low cost, mais la société a fait appel et la cour d'appel vient de reporter sa décision (initialement planifiée pour le 31 mars) à fin septembre.

Il faut dire que le sujet est plus que sensible. Sachant que pour ajouter un peu plus de complexité au dossier, déjà brûlant, Uber a, en parallèle, porté plainte contre la France auprès de la Commission européenne, accusant notamment la fameuse loi relative aux taxis et VTC d'être contraire au droit communautaire et d'entraver notamment la liberté d'entreprendre. Bruxelles a reconnu étudier le dossier et avoir envoyé une lettre d'avertissement à la France.

Par ailleurs, suite aux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) déposées par le géant américain, les Sages de la rue Montpensier ont tranché en faveur d'Uber concernant sa politique tarifaire, estimant "contraires à la Constitution et à la liberté d'entreprendre" les dispositions de la loi Thévenoud en la matière. De quoi ajouter un peu de piment à ce bras de fer juridique.

Le doute demeure

Bref, c'est un peu à y perdre son latin. Alors en attendant d'y voir plus clair dans ce maelström, les préfectures des départements du Bas-Rhin pour Strasbourg, des Bouches du Rhône, pour Marseille, et de Loire Atlantique pour Nantes, ont donc annoncé mardi des arrêtés interdisant dans ces villes l'activité de transports UberPop et un renforcement des contrôles.

"Ce service ne correspond à aucun type d'activité de transport de personnes autorisé par la loi. Les particuliers qui le mettraient en oeuvre exerceraient illégalement la profession de taxi", a fait valoir la préfecture de Loire Atlantique dans un communiqué, soulignant que la responsabilité pénale des contrevenants pourrait être engagée. Pour l'heure, le doute demeure. Et les quelques clarifications réglementaires ne semblent pas suffire à dépassionner les esprits. Loin de là.