Les chaudières à gaz vont-elles être interdites  ? Le gouvernement s'interroge

Par latribune.fr  |   |  933  mots
Actuellement, l'utilisation des bâtiments - hors construction - représente 18% des émissions de gaz à effet de serre en France, et 60% de ce total vient du chauffage au gaz (Photo d'illustration). (Crédits : Reuters)
Dans le cadre d'une éventuelle interdiction progressive des chaudières à gaz pour faire baisser les émissions de CO2 liées au bâtiment, le gouvernement lance une concertation jusqu'au 28 juillet avec des élus et des professionnels. A l'heure actuelle, l'utilisation des bâtiments - hors construction - représente 18% des émissions de gaz à effet de serre en France, et 60% de ce total vient du chauffage au gaz, ajoute le ministère de la Transition énergétique.

La France doit passer de 408 millions de tonnes de CO2 équivalent (Mt CO2e) en 2022 à 270 millions en 2030. Pour y parvenir, le gouvernement a avancé plusieurs pistes selon les secteurs, dont le bâtiment avec une interdiction de l'installation de chaudières à gaz, qui « est une des possibilités mises à la concertation ».

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Une rencontre est prévue la semaine prochaine entre la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu, celui chargé de la Ville et du logement Olivier Klein et les responsables des filières, industriels, fabricants, installateurs, professionnels du bâtiment et de la maintenance, associations de consommateurs, de propriétaires, de locataires, collectivités, et associations de défense de l'environnement.

Les émissions de CO2 du secteur du bâtiment en France se sont élevées à 75 millions de tonnes en 2021. Elles devront baisser d'environ 45 Mt pour atteindre 30 Mt en 2030.

« Ceci implique de réduire drastiquement les émissions liées au fioul et au gaz en accélérant le remplacement des chaudières gaz comme fioul et l'isolation des logements », ajoute le gouvernement.

Actuellement, l'utilisation des bâtiments - hors construction - représente 18% des émissions de gaz à effet de serre en France, et 60% de ce total vient du chauffage au gaz, ajoute le ministère de la Transition énergétique.

Une évolution qui serait « très progressive »

Le cabinet de la ministre de la Transition énergétique a déjà précisé lundi qu'il ne s'agirait pas d'une « obligation de remplacement » et que l'évolution serait « très progressive ». La consultation, annoncée la semaine dernière devant le Sénat par la ministre, s'inscrit « dans le cadre de la planification écologique » lancée par la Première ministre, Elisabeth Borne

L'objectif affiché par le gouvernement de remplacer d'ici quelques années des millions de chaudières à gaz « n'est pas tenable », avait déjà pu assurer le président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), Jean-Christophe Repon, selon lequel Elisabeth Borne a évoqué l'échéance de 2026.

« On ne peut pas dire qu'en 2026, on supprime la chaudière à gaz et qu'on forme 200.000 chauffagistes à la pompe à chaleur. Ce calendrier n'est pas tenable, ça ne tient pas tant que les EPR ne sont pas construits  pour produire, l'électricité nécessaire aux pompes à chaleur. »

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Le sénateur centriste breton, Michel Canévet, avait déjà donné le ton en avril : « Ce qui m'inquiète, c'est que si on veut se passer du gaz, nous ne sommes pas capables de produire toute l'électricité dont on va avoir besoin dans les prochaines années, vu le temps qu'il faut pour construire des réacteurs nucléaires et des champs de production d'énergies renouvelables » avant de mettre en garde contre « une décision prise à l'emporte-pièce ».

Selon France Gaz, quelque 130.000 personnes en France travaillent dans le secteur, dont 38.000 à 45.000 pour l'équipement et le service des chaudières à gaz. 16.000 installateurs sont recensés, dont un certain nombre sont en train de se former sur les pompes à chaleur électriques qui émettent moins de CO2 que les chaudières fossiles

11,2 millions de résidences principales

Selon des statistiques du Centre d'études et de recherches économiques sur l'énergie (Ceren), 11,2 millions de résidences principales recouraient au gaz naturel et gaz de pétrole liquéfié pour se chauffer en France en 2021 (collectif ou individuel). Quelque 2,7 millions de résidences principales étaient chauffées au fioul domestique et 11,2 millions à l'électricité (dont 2,3 millions avec des pompes à chaleur). Enfin, 3,1 millions de logements principaux étaient chauffés au bois et 1,5 million au chauffage urbain.

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Le dispositif Ma Prime Renov', mis en place pour aider au financement des travaux de rénovation énergétique, surtout des ménages les plus modestes, a déjà acté la fin des aides pour l'installation de chaudières à gaz, y compris les plus modernes qui recyclent leurs gaz d'échappement. Outre les chaudières, la concertation portera aussi sur les mesures à mettre en place plus largement pour parvenir à la décarbonation du bâtiment (isolation notamment) : mesures incitatives, d'accompagnement ou contraignantes. Les résultats de la concertation pourront « nourrir les textes de loi à venir », indique-t-on au ministère, en particulier le projet de loi de finances voté à l'automne pour 2024.

 Le transport, un secteur qui doit se décarboner à marche forcée

C'est le premier poste d'émissions du territoire (environ un tiers du total), et la circulation ne cesse d'augmenter. Pour le gouvernement, les émissions liées au transport doivent passer de 129 millions de tonnes de CO2 par an en 2022 à 92 Mt en 2030. Alors que la moitié du problème vient des véhicules particuliers, le plan compte sur leur électrification (-11 Mt), le télétravail, le covoiturage...

Le report des voyageurs sur les transports en commun (-5 Mt) pourra se faire par exemple en favorisant les infrastructures autour des gares (parkings de délestage, bus d'accès), un objet de discussion actuelle pour les prochains contrats de plan Etat-Régions. Avec le boom du e-commerce, la logistique doit se décarboner d'urgence : optimisation du chargement, véhicules lourds électrifiés ou à hydrogène (-5 Mt), fret ferroviaire et fluvial (-4 Mt), « sobriété » dans les marchandises (-7 Mt)... Dans l'aérien, les carburants durables permettraient -2 Mt, comme la maîtrise de la demande.

(Avec AFP)