La bataille de l'Arctique fait rage entre les majors du pétrole

Portées par le prix élevé du baril, fortes de leur expertise technologique, les majors multiplient les projets en zone arctique, provoquant des sueurs froides chez les défenseurs de l'environnement.
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Rosneft n'aura pas mis longtemps à trouver d'autres prétendants. Deux semaines après l'échec de son partenariat d'exploration arctique avec BP, le numéro un du pétrole russe serait déjà en négociations avancées avec Shell pour remplacer la compagnie britannique. « Ce serait un partenaire très appréciable pour nous », a déclaré vendredi le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, précisant néanmoins que « le travail avec BP n'est pas encore terminé ». L'empressement de Shell à se substituer à BP traduit un mouvement de fond. Les plus grandes compagnies pétrolières du monde se ruent sur la zone arctique, et multiplient les projets au grand dam des défenseurs de l'environnement.

Le dernier appel d'offres organisé par le Groenland pour l'attribution de concessions offshore dans la baie de Baffin, surnommée l'« allée des icebergs », a ainsi attiré le gotha de la profession. L'américain ConocoPhillips, Shell, le norvégien Statoil, GDF Suez entre autres ont remporté des blocs d'exploration. Le même Statoil a récemment découvert en mer de Barents son plus grand champ depuis plus de dix ans. Shell, encore elle, fait actuellement le siège des autorités américaines pour obtenir l'autorisation de forer sur ses concessions en mer de Chukchi, au large de l'Alaska. Total est pour sa part engagé dans deux projets gaziers en Russie, Yamal LNG - l'un des rares projets onshore de l'Arctique - et Chtokman. Exploré de longue date, avec un pic d'activité après le second choc pétrolier de 1979, l'Arctique avait perdu de son attrait avec le développement de la mer du Nord et de l'offshore profond. Mais le prix élevé du baril, la rareté des ressources disponibles et la fonte accélérée des glaces expliquent le regain d'intérêt des pétroliers pour cette région.

Écosystèmes très fragiles

Pour en exploiter le potentiel, les majors, fortes de leur expertise technologique, sont prêtes à se lancer dans des développements complexes et coûteux qu'impliquent les conditions climatiques de cette zone souvent qualifiée d'« ultime frontière ». Car l'Arctique, encore largement sous-explorée, est un territoire prometteur. Selon l'Institut d'études géologiques américain, la zone recèlerait 90 milliards de barils de pétrole récupérables, soit un peu moins que les réserves du Koweït, qui représentent 7,5 % des réserves prouvées de la planète.

En gaz, la zone est bien plus riche encore, avec près de 300 milliards de barils équivalent pétrole. Les défenseurs de l'environnement crient à l'hérésie devant ces projets d'exploitation pétrolière dans un sanctuaire aux écosystèmes fragiles, déjà altéré par le réchauffement climatique. « Les mêmes facteurs qui contribuent aux risques de marée noire de pétrole, comme le manque de lumière, le froid extrême, les icebergs, les vents violents et la faible visibilité, peuvent aussi rendre les opérations de lutte contre ces marées extrêmement difficiles voire totalement inopérantes, souligne James Leaton, de WWF. L'Arctique présente le plus haut niveau de sensibilité environnementale et la plus faible possibilité de nettoyage après un accident. »

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