Pratiques commerciales étonnantes

Nous contestons vivement cette décision que nous jugeons déplorable et qui fait fi de la réalité d'un marché où règne une très forte concurrence, caractérisée par une innovation constante, des produits toujours plus performants et des prix en baisse. » La réaction de Paul Otellini, le PDG d'Intel, ne pouvait guère être différente. « Les consommateurs n'ont été lésés en rien, poursuit-il dans son communiqué. Nous allons faire appel. » Passé le côté spectaculaire de l'amende record de 1,06 milliard d'euros, la sévérité de la démonstration infligée par la Commission européenne frappe. Les services de Neelie Kroes, la commissaire à la Concurrence, ne sont pas rentrés bredouilles de neuf années de procédures, auditions, perquisitions, etc.jusqu'à la gratuitéJuridiquement, ce sont donc « des pratiques anticoncurrentielles illégales visant à exclure les concurrents du marché des puces informatiques, les processeurs x86 » qui justifient cette amende record. Bruxelles retient dans sa condamnation deux des trois griefs soulevés lors de l'instruction (celui de la vente à perte est abandonné). L'exécutif européen relate ainsi comment la politique de « remises et de paiements conditionnels » auprès des constructeurs informatiques, tels Acer, Dell, HP ou Lenovo, permettait de cantonner AMD aux franges d'un marché estimé à 22 milliards d'euros. Ainsi, Intel a accordé à un fabricant d'ordinateurs « une remise de novembre 2002 à mai 2005, à la condition que ce fabricant lui achète au minimum 95 % des processeurs x86 dont il avait besoin ».Le gendarme européen « ne conteste pas les remises elles-mêmes, mais les conditions auxquelles Intel les a accordées ». De fait, la Commission note que le seul moyen pour un concurrent de gagner un contrat aurait été « d'offrir pour ses processeurs un prix inférieur aux coûts de production ». Selon les documents retrouvés par les limiers de Bruxelles, le système a parfois dépassé l'entendement. Dans le cas d'un fabricant de PC, « AMD a proposé gratuitement un million de processeurs. Si le fabricant les avait tous acceptés, il aurait perdu la remise d'Intel [?] et été lésé pour le seul fait d'accepter cette offre hautement concurrentielle ». Finalement, le fabricant « n'a accepté gratuitement que 160.000 processeurs ».L'enquête a également démontré que pendant cinq ans, « Intel a effectué des paiements directs au grand distributeur Media Saturn à condition qu'il ne vende que des PC équipés de ses processeurs dans tous les pays où il exerce ». De même, le géant américain a versé de l'argent à plusieurs constructeurs informatiques pour qu'ils reportent les lancements de produits équipés de puces AMD. Bref, l'acte d'accusation semble fourni, et Bruxelles ne semble pas inquiete d'une procédure d'appel. J.-B. J.
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