n Gouvernance renouvelée

Le 1er janvier 2009, une première vague de 20 universités françaises deviendront autonomes et bénéficieront de « compétences élargies ». Votée au c?ur de l'été 2007, la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) prévoit en effet que, d'ici à 2012, les 85 universités que compte le territoire accèdent à l'autonomie. Les vingt premières universités à sauter le pas, qui représentent 315.000 étudiants et 19.000 enseignants-chercheurs, ont été sélectionnées selon quatre critères de gestion (comptable et financière, ressources humaines, systèmes d'information et immobilière). Dans quelques jours, elles seront responsables de leur propre budget, ce qui implique pour elles de gérer leurs 32.000 emplois et leur masse salariale. Elles maîtriseront donc leur politique des salaires. Si ces 20 premiers établissements essuient les plâtres, la majorité des universités seront dans le bain dès le 1er janvier, puisque toutes ont déjà mis en place un nouveau conseil d'administration.Surtout, elles seront désormais toutes financées en fonction de leur performance. Une réforme d'envergure non exempte de critiques. Mais Valérie Pécresse dispose de quelques avantages sur son confrère Xavier Darcos, le ministre de l'Éducation nationale qui a été contraint de renoncer à sa réforme des lycées à cause de la contestation?: sa réforme, prévue sur cinq ans, se met en place progressivement depuis douze mois déjà et le monde de l'université est quelque peu plus feutré que celui du lycée? Revue de détail des nouvelles dispositions. En avance sur la date prévue par la loi, toutes les universités ont déjà mis en place leurs nouveaux conseils d'administration. Les sièges ont été ramenés de 60 à 30 en moyenne et surtout ouverts aux entreprises. Une centaine d'entreprises (grands groupes et PME presque à parité) sont désormais présentes au sein des conseils d'administration. Une répartition qui « garantit contre le localisme », selon la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse. Le conseil d'administration voit son pouvoir élargi?: il fixe les objectifs stratégiques, approuve le rapport annuel d'activité du président et se prononce sur la répartition des emplois. Quant aux présidents d'université, dont le rôle tend à se rapprocher de celui d'un « manager » d'entreprise, ils se sont fait élire pour quatre ans (et non plus cinq) sur leurs projets de développement. Ce mandat est désormais ouvert aux personnalités étrangères.Les universités géreront désormais leur budget global contre 25 % seulement actuellement. Ce budget inclura donc la gestion des emplois et de la masse salariale, ce qui va, selon la ministre, le « multiplier par 2,5 voire 3 ». Chaque université passera un contrat quadriennal avec l'État. Certaines lignes de budget ne seront plus « fléchées », celle des IUT en particulier. Le budget sera certifié chaque année par un commissaire aux comptes. Les dotations 2009 des universités, rendues publiques récemment, soulèvent de nombreuses critiques. Si elles augmentent en moyenne de 15 % (crédits de mise en sécurité et plan de relance compris), de nombreux présidents d'université s'élèvent contre l'habillage des chiffres et le redéploiement de 150 emplois, certaines universités « surdotées » (qui ont notamment vu le nombre de leurs étudiants baisser) en perdant au profit des « sous-dotées ». « Notre budget de fonctionnement augmente de 16,4 % mais il inclut des transferts de charges, notamment les crédits du plan licence, et une partie sera utilisée pour compenser la perte de 10 emplois », explique ainsi Axel Kahn, le président de l'université Paris-Descartes (Paris V). « On aligne par le bas, sans analyse qualitative. Les universités dépourvues de recherche mais qui ont beaucoup d'étudiants sont mieux traitées. Pour notre part, nous n'avons perdu que 1 % d'étudiants ce qui est peu pour une fac de sciences », dénonce Jean-Charles Pomerol, le président de l'université Pierre-et-Marie-Curie (Paris VI). La ministre annoncera la répartition des crédits du plan de relance (constructions d'infrastructures, plan sur les nanotechnologies?) durant la première quinzaine de janvier. Parallèlement, les universités auront la possibilité de se procurer des ressources supplémentaires en créant, à l'image de leurs homologues anglo-saxonnes, des fondations. Elles sont aussi invitées à utiliser leurs ressources et leurs murs (notamment l'été) pour offrir des prestations en matière de formation continue. Elles peuvent aussi demander à l'État le transfert de leur patrimoine immobilier (Paris VI et Corte l'ont déjà fait, pour le moment sans succès).Les universités seront maîtres de leurs recrutements et de leur politique salariale. Elles auront donc toute latitude en matière d'attribution de primes et d'intéressement mais aussi d'évolution de carrière (détachement, titularisation?). La possibilité de recruter des contractuels est élargie aux fonctions d'enseignement et de recherche et aux emplois de catégorie A. Les enseignants-chercheurs, choisis par des comités de sélection, seront recrutés plus rapidement, en six mois (contre dix-huit auparavant). Quant aux obligations de service des enseignants-chercheurs (ce que l'on appelle la « modulation de service », soit la répartition des heures entre enseignement et recherche), elles seront fixées par le conseil d'administration. Les détracteurs de la loi craignent une mise à mal de la fonction publique, une privatisation des universités et le développement d'un certain clientélisme. « Les primes, promotions, congés, modulations de service? tout sera géré localement en fonction de la proximité des uns et des autres avec le président d'université ou la région », anticipe ainsi Jean Fabbri, secrétaire général du Snesup FSU. La crainte principale est de voir les enseignants-chercheurs mobilisés sur la recherche pour accroître l'image de marque de l'université, et les heures d'enseignement assurées par des contractuels.Pour faire « entrer la culture du résultat dans les universités », comme le martèle Valérie Pécresse, les universités seront désormais financées en fonction de leur performance et selon un nouveau système d'allocation des moyens. Destiné à remplacer le système « San Remo », une usine à gaz vieille de quinze ans et jugée opaque, complexe et dépassée, le système « Sympa » (système de répartition des moyens à la performance et à l'activité) s'appliquera à toutes les universités à compter du 1er janvier. Vingt pour cent en moyenne des crédits seront alloués aux universités en fonction de leur performance, contre 3 % auparavant (5 % au niveau licence, 20 % en master et 40 % dans les laboratoires de recherche). Pour préserver les spécificités des universités, cette part « performance » sera négociée à hauteur de 20 % avec chaque établissement en fonction de la qualité de ses projets et de la réalisation de ses objectifs. Les 80 % restants étant mesurés en fonction de divers critères nationaux (insertion professionnelle, taux de réussite en licence, qualité de gestion, cotation des unités de recherche et des écoles doctorales en fonction du nombre d'enseignants-chercheurs publiant, ou encore étudiants passant réellement les examens et non plus étudiants inscrits?).
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