Le russe Gazprom déloge TNK-BP d'un gisement sibérien stratégique

La majorité des analystes ne s'y attendait pas. Mais c'est finalement Gazprom qui a mis la main sur le vaste gisement gazier sibérien de Kovykta, à la barbe de Rosneftegaz, propriétaire de son rival Rosneft. En offrant 567 millions d'euros, le numéro un mondial du gaz a mis un terme à une longue bataille pour un gisement de deux mille milliards de m2 de gaz, suffisant pour satisfaire la consommation mondiale de gaz pendant huit mois. En octobre dernier, le PDG de Gazprom, Alexeï Miller, affirmait pourtant ne pas être intéressé par Kovykta. « D'après nos prévisions, il est absolument certain qu'il n'existe aucune nécessité (pour Gazprom) de développer ce gisement », avait-il assuré...Jusqu'à présent, la licence sur le champ de Kovykta, situé dans la région d'Irkoutsk en Sibérie orientale, était détenue par Rusia Petroleum, une filiale du russo-britannique TNK-BP. La coentreprise russe du Britannique BP espérait développer ses exportations de gaz vers la Chine. Mais TNK-BP n'a jamais obtenu de licence d'exportation auprès du gouvernement russe. La société fondée en 1992 pour développer et exploiter le gisement a donc été mise en liquidation en juin 2010 pour protéger les investissements déjà réalisés par ses actionnaires.Dans l'impossibilité d'atteindre le marché de prédilection de Kovykta, TNK-BP attendait le moment opportun pour s'en séparer. La mort dans l'âme probablement, puisque les analystes valorisent ce gisement autour de 1,44 milliard d'euros. Le directeur financier de TNK-BP, Jonathan Muir, s'est toutefois déclaré satisfait du prix obtenu. Des enchères fermées avaient été organisées, à la russe : seuls deux participants y ont été conviés - deux groupes d'État - dont les offres ont été transmises dans des enveloppes cachetées. Selon l'agence Interfax, l'offre de Gazprom s'est révélée supérieure de 40 % à celle de Rosneftegaz, ce qui a surpris les médias du pays.Manque d'infrastructuresBien que le producteur de gaz indépendant Novatek et Rosneft « semblaient a priori plus intéressés par Kovykta, il est plus logique que Gazprom en devienne finalement l'acquéreur », commente Ildar Davletchine, analyste chez Renaissance Capital. Car Kovykta va augmenter d'environ 5 % les réserves prouvées de Gazprom. Parmi les gisements stratégiques, il est le plus proche de la frontière chinoise (500 kilomètres) et se trouve à un stade de développement plus avancé que les autres gisements de Gazprom dans la région. Il est donc le plus approprié pour alimenter la Chine, pays auquel Gazprom s'est engagé à livrer 38 milliards de m3 de gaz par an à partir de 2018. Dans ce contexte, le prix payé par Gazprom est équitable puisqu'il « couvre pratiquement les dépenses effectuées jusqu'ici par TNK-BP pour développer le gisement », remarque Ildar Davletchine.« Cette nouvelle est marginalement positive pour Gazprom », pondère Elena Savtchik, analyste chez Aton à Moscou. « Les perspectives du gisement apparaissent lointaines et nous n'avons guère de visibilités sur la manière dont le projet sera développé », souligne l'experte. En effet, Moscou et Pékin sont loin d'être parvenus à un accord sur le prix du gaz. De plus, les infrastructures visant à transporter du gaz russe vers la Chine n'existent toujours pas.
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