Europe  :  le traité, rien que le traité

La semaine écoulée a été éprouvante pour les Européens. Les taux grecs à 2 ans ont atteint 18 %, ceux à 10 ans 10 %, entraînant dans leur sillage les rendements des autres pays fragiles de la zone euro et faisant craindre une contagion de la crise à d'autres pays. Il devenait impératif de réagir. Après une valse-hésitation depuis plusieurs semaines, il convenait, face aux pressions des marchés, de parer au plus pressé ! C'est ce que fit Jean-Claude Trichet en demandant, la semaine passée publiquement à l'Allemagne de prendre une position claire. Un accord semble avoir été trouvé, mais la situation est-elle revenue sous contrôle ?Les marchés se calmeront probablement. Mais il est à craindre qu'ils décident de tester rapidement les dettes des autres « pays périphériques ». L'endettement cumulé de la Grèce, du Portugal et de l'Espagne avoisine 1.500 milliards d'euros, soit l'équivalent de la dette française. Compte tenu de leur taille, chaque dette est peu liquide et les arbitragistes peuvent raisonnablement penser pouvoir influer sur les prix. Il convient de noter que ces pays ne pourront alors emprunter qu'à un taux supérieur à celui prévu dans le plan européen et supportable par la Grèce. Prêter aux Grecs et affecter sa signature est une chose, prêter aux Grecs et générer des coûts de financement pour les contribuables portugais, espagnol, irlandais... en est une autre ! S'endetter quand on est attaqué est difficilement vendable à des électeurs. Alors quid novi ? À court terme, un répit, mais une situation à moyen terme devenue intenable sur les plans économique et politique ! Si devenait grande la perception que les prêts bilatéraux devaient atteindre la somme de 120 milliards d'euros ou plus (l'inconnue à cet égard est tragique), comme évoquée ici et là, au lieu des 30 milliards d'euros retenus pour l'instant, conduisant, nolens plutôt que volens, l'Allemagne à signer un chèque en blanc, alors le risque de contagion envers les plus fragiles des pays européens conduirait l'Europe vers des terrae incognitae particulièrement dangereuses. Déjà, les effets des dégradations de notation par S&P du Portugal et de l'Espagne en montrent un premier aperçu. De plus, et c'est la règle, les prêts européens auraient une exigibilité inférieure à ceux du FMI. Même si le gouvernement grec réussissait à mettre en oeuvre les mesures incontournables du FMI, pourquoi devrait-il emprunter aux Européens à un taux nécessairement supérieur au 3,5 % proposé par le FMI ? Enfin, la Grèce, oubliant les hausses de niveau de vie que l'Europe lui a apportées, s'éloignerait de Bruxelles et se rapprocherait de Washington à double titre, les États-Unis d'une part (la Turquie n'est pas loin !), le FMI de l'autre. Les uns ne voudraient plus prêter et les autres plus emprunter !On se souvient de la théorie du bouc émissaire décrite par René Girard et Hannah Arendt. Ce rôle devait être tenu par le FMI afin que Bruxelles, Berlin et même Athènes ne le jouent pas. Ainsi Angela Merkel aurait-elle dû attendre que soient achevées les négociations entre Athènes et le FMI. Elle a dû donner son accord. Aussi ne peut-on plus douter du souhait des électeurs grecs et allemands de sauver notre maison monétaire commune. On a beaucoup évoqué les ravages politiques en Europe d'une telle situation et d'une solution fondée uniquement sur le FMI. On a longtemps surévalué la réactivité de l'Europe et beaucoup tardé à proposer la solution « naturelle » : le FMI à court terme et, à moyen terme, le renforcement institutionnel de l'Europe dans le cadre d'un traité de Lisbonne. Mais ce n'est qu'à plus long terme que l'on pourra mettre en place une nouvelle gouvernance de l'Europe et de la zone euro.Le traité d'union monétaire « de Maastricht » a été rédigé afin que la situation actuelle ne survienne pas. Raté ! S'agit-il d'un vice caché du traité ? Non, au contraire ! Aussi, au-delà du renflouement d'un pays, il ne reste qu'une issue consistant... à ne rien changer sauf à ce que l'Europe applique et ait les moyens de faire appliquer scrupuleusement le traité d'Union européenne et à laisser la main au FMI à l'avenir. Le seul programme de sortie par le haut, acceptable par tous !Point de vue Dominique Chesneau Président de Tresorisk Conseil.
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