Horribilis

Sweet bureauD'habitude, ils s'agitent à l'arrivée de l'automne et négocient jusqu'aux premiers frimas. Les chefs de service défilent à la direction générale. Ils élèvent la voix, font de grands gestes, se disent prêts à rendre leur tablier. Nous sommes au spectacle, c'est nous qu'on met en scène. Un an de travail qui mérite une petite récompense à défaut de reconnaissance.C'était avant. Avant la crise et la disette.Nous sommes déjà début décembre et? rien. Il ne se passe rien. La crise a balayé nos petites habitudes. L'an dernier, nous avons accepté de travailler plus en gagnant moins. Nous avons ronchonné, mais nous l'avons fait. Ce n'est pas trop cher payé pour notre CDI et notre treizième mois. Cette année, nous avons retroussé nos manches, et il n'y a pas eu trop de casse. Non sans peine. On nous a transformés en « cost killer ». Il a fallu rogner sur tout, partager les assistantes, les inquiétudes, les crayons. Les gommes aussi, pour effacer les stigmates d'une année de plus en plus horribilis et qui n'en finissait pas. Nous avons traqué les coûts et divisé les charges par deux, voire plus. Tout le monde a participé à l'effort de guerre, et chacun espère en récolter quelques lauriers. L'automne et l'entreprise reprennent des couleurs. L'augmentation ou la prime redeviennent possibles.prime ou augmentation ?Nous attendons. Nous prenons les paris sur le nom du chef qui va ouvrir le bal des négociations. Prime ou augmentation, ils ont le choix. Mais nos chefs restent désespérément accrochés à leur siège. Il n'y a pas d'allers-retours dans les bureaux de la direction générale qui se fait bien discrète. Personne ne le dit, mais chacun le sait, ce sera encore une année sans. Les négociateurs sont aux abonnés absents et surtout sans biscuit. Pas la moindre miette. Pourtant, ça nous aurait aidés à oublier l'année passée et à avaler les couleuvres de celle à venir. Le plus difficile, ce sera pour nos chefs. Ils n'ont plus que le bâton pour nous faire avancer.
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