Le grand écart Fed-BCE fait bondir l'euro

C'est peu de dire que Ben Bernanke ne facilite pas la tâche de son collègue Jean-Claude Trichet, ni d'ailleurs des autres présidents de banque centrale. La Fed a renforcé son dispositif de crise, en annonçant son deuxième programme de rachat de titres de dette publique la veille du jour où la BCE, tentée d'accélérer sa stratégie de sortie de crise, tenait son propre conseil. Non seulement la BCE est mise en porte-à-faux dans sa tentative de grand écart stratégique avec la Fed, mais elle doit encaisser la violente hausse de l'euro, très dommageable pour la compétitivité des exportations des Seize, qu'a provoquée la décision de la Fed. La monnaie unique s'est en effet retrouvée propulsée jusqu'à 1,4280 face à un dollar affaibli contre presque toutes les grandes monnaies avec l'avalanche de billets verts que va déverser la Fed dans l'économie. L'euro se retrouve ainsi à quelques fractions de son point haut de l'année atteint début janvier, à 1,4515. Et le Brésil a accusé la Fed de « déprécier le dollar ».Car, si au programme de rachat de 600 milliards de dollars de dette d'ici à fin juin 2011 annoncé mercredi soir, on ajoute les 35 milliards d'emprunts d'État que la Fed acquiert chaque mois depuis août au titre du réinvestissement du produit de son portefeuille de titres hypothécaires, ce sont 900 milliards de dollars qui vont venir inonder le circuit financier au cours de la période.Hautement périlleuxC'est donc à un exercice hautement périlleux qu'a dû se livrer Jean-Claude Trichet lors de sa traditionnelle conférence de presse mensuelle. Car, outre la montée déstabilisante de l'euro face au dollar, il lui fallait éviter d'aggraver les tensions, qui ont récemment resurgi sur les rendements longs des pays les plus faibles de la zone et de provoquer une remontée supplémentaire des taux du marché monétaire. L'Euribor 3 mois, le taux interbancaire de référence, se traite désormais à 1,05 % - soit au-dessus du principal taux directeur de la BCE maintenu jeudi à son plancher de 1 % - contre 0,63 % en mars, son plus faible niveau historique. C'est certes un signal de normalisation, mais une remontée trop rapide serait très pénalisante pour les banques de la zone euro.Avec le doigté qui le caractérise, le patron de la BCE a su se démarquer des faucons du conseil qui réclament la mise en oeuvre rapide d'une normalisation de la politique monétaire et en particulier l'interruption des achats de titres de dette des pays dits périphériques de la zone euro. Le mot d'ordre était clairement : pas de vagues. Tout en donnant un diagnostic modérément positif de la situation économique de la zone euro (les prévisions de la BCE seront remises à jour le mois prochain), en dépit des incertitudes qui demeurent, Trichet a donné rendez-vous à ses interlocuteurs et aux marchés le 2 décembre. Après avoir martelé que les mesures exceptionnelles prises pour conjurer la crise étaient par nature transitoires, il s'est quasiment engagé à annoncer un calendrier de levée progressive du programme de rachat de dette mis en place en pleine crise souveraine en mai et de retrait des opérations de refinancement à un et trois mois, qui permettent actuellement de fournir aux banques des quantités illimitées de liquidités, dispositif qui avait été prorogé jusqu'à la mi-janvier.
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