La chimie européenne toujours en convalescence

Sauvée, la chimie européenne ? Pas complètement. « Nous attendons une très légère croissance, à un chiffre, pour 2010 », pronostique Myriam Affri, analyste chez Fitch Ratings. « En France, la reprise sera tirée par les exportations, avec une hausse des volumes de l'ordre de 5 % », indiquait début janvier Jean Pelin, directeur général de l'UIC (Union des industries chimiques). Les chimistes, qui aiment à se qualifier d'« industrie de l'industrie», car leurs clients vont de la sidérurgie à la grande consommation en passant par l'automobile et les emballages, viennent en effet de vivre « une crise sans précédent », souligne Myriam Affri. « La dernière récession datait de 2001/2002, mais elle n'avait pas touché l'ensemble des marchés comme celle-ci », rappelle-t-elle. Conséquence : en 2009, les industriels ont connu des baisses de volume allant jusqu'à 20 % en moyenne, soit ? 30 à ? 40 % pour certaines sociétés. « Le déstockage a été massif à partir du quatrième trimestre 2008 et la chute de la demande a aggravé le phénomène », analyse l'experte.Mesures d'économiesDepuis le début de l'année, avec l'amélioration de la conjoncture économique, le sort des BASF, Rhodia, Solvay et autres Lanxess s'améliore progressivement. « De plus, les industriels ont mis en place des mesures d'économies que certains comptent prolonger jusqu'en 2011 ou 2012 », ajoute l'analyste. Reste que, dans un secteur particulièrement hétérogène, la situation varie beaucoup d'une activité à l'autre. Pour l'experte, les producteurs de « commodités » (chimie de base) vont continuer à souffrir, de même que les pétrochimistes. « Ils pâtissent à la fois des surcapacités européennes et du renchérissement de leur matière première (naphta) par rapport aux groupes américains qui produisent à partir de gaz naturel », explique-t-elle. Leur défi majeur demeure la montée en puissance des pétrochimistes du Moyen-Orient et de la concurrence asiatique. « Dans l'éthylène par exemple, ces nouveaux acteurs représentent moins de 25% des capacités de production. Ils en possèderont plus de 60% à l'horizon 2012 », calcule Myriam Affri.Dans la chimie de spécialité, qui produit des volumes moindres pour des applications à plus forte valeur ajoutée, « les groupes orientés sur les marchés les moins cycliques tireront leur épingle du jeu », estime Myriam Affri. Et d'opposer les déboires de l'automobile et de la construction aux segments qui devraient rebondir plus rapidement, comme la peinture. « AkzoNobel nous semble bien placé », note-t-elle. Quant à l'agrochimie, elle affiche une belle résistance (lire ci-dessous).En tout état de cause, la période de convalescence du secteur n'est pas terminée. Le timing de la reprise dépendra de la demande, donc de la consommation du client final. « On ne retrouvera pas les volumes de production de 2007 avant 2012 ou 2013 », prévient Myriam Affri. Pas de quoi favoriser les rapprochements entre acteurs européens. « Les industriels cherchent à conserver leurs liquidités et les valorisations boursières ne plaident pas en faveur d'opérations de fusions », estime l'experte. En revanche, elle s'attend à des alliances avec des groupes des pays émergents, notamment asiatiques, où se trouve la croissance. Le belge Solvay, qui va récupérer 5,2 milliards d'euros après la vente de sa branche pharmacie à l'américain Abbott, « aurait tout intérêt à augmenter son exposition aux marchés en croissance d'Asie et d'Amérique latine» , souligne-t-elle. A. T. FOCUS. Le suisse Syngenta tire son épingle du jeuLa chimie phytosanitaire (pesticides, engrais) fait traditionnellement partie des segments les plus résistants de l'industrie. Le suisse Syngenta l'a prouvé ce vendredi en publiant ses résultats 2009. Le chiffre d'affaires a baissé de 5 % (10,9 milliards de dollars) et le bénéfice net a reculé de 1 %, à 1,37 milliard de dollars, mais les analyses s'attendaient à bien pire. Le leader mondial de l'agrochimie récolte surtout les fruits de sa politique de recherche et développement, pour laquelle il a dépensé près de 10 % de ses revenus l'an dernier (1 milliard de dollars). Syngenta commercialise depuis 2008 aux Etats-Unis un maïs OGM « à trois traits » (trois propriétés), résistant aux herbicides et aux pesticides. Le groupe attend une hausse de son bénéfice en 2010.
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