Quand George Soros répond à une tribune ... de La Tribune

 Ce texte est une réponse de Georges Soros à une tribune mise en ligne sur notre site et consultable ici :   =>Une sortie de l\'Allemagne de la zone euro ? Pourquoi Georges Soros a tort Hans-Werner Sinn a délibérément déformé mon propos. Je soutiens que l\'état actuel de l\'intégration au sein de la zone euro est insuffisant : l\'euro ne pourra fonctionner à l\'avenir que si la majeure partie des dettes nationales est financée par les euro-obligations et si le système bancaire est réglementé par des institutions qui mettent tout le monde sur un même pied d\'égalité.La solution des eurobonds est la meilleurePermettre au stock de dettes nationales d\'être converti en Eurobonds conduirait au miracle. Cela faciliterait la création d\'une véritable union bancaire, et cela permettrait aux États-membres d\'entreprendre leurs réformes structurelles dans un environnement moins douloureux. Les pays qui ne parviennent pas à se reformer deviendraient des poches permanentes de pauvreté et de dépendance, un peu comme les régions du sud de l\'Italie aujourd\'hui.Si l\'Allemagne et les autres pays créanciers ne souhaitent pas porter la responsabilité liée aux Eurobonds, comme c\'est le cas actuellement, ils doivent se retirer, quitter la zone euro par accord amiable, et permettre au reste de la zone euro de créer les Eurobonds. Ces bons seraient alors comparables à ceux des États-Unis, du Royaume-Uni et du Japon (voire mieux appréciés)  et auraient le même effet parce que l\'euro se déprécierait, la zone euro en récession deviendrait compétitive, même face à l\'Allemagne, et sa dette se dégonflerait à mesure que son économie croîtrait.Mais l\'Allemagne serait bien mal avisée de quitter l\'euro. Les engagements qu\'elle aurait à supporter avec les Eurobonds seraient subordonnés à un défaut de paiement - lui même éliminé par l\'introduction de ces Eurobonds. Et elle bénéficierait de la reprise dans les pays dits de la périphérie. Au contraire, si l\'Allemagne quittait la zone euro, elle souffrirait d\'une monnaie surévaluée et de pertes sur ses actifs libellés en euros.Que l\'Allemagne accepte les Eurobonds ou qu\'elle quitte la zone euro, la situation serait quoiqu\'il arrive préférable à la situation actuelle. Les arrangements actuels lui permettent de poursuivre sa stratégie reposant de manière étroite sur ses intérêts nationaux, mais entraînent la zone euro dans son ensemble vers une dépression de longue durée qui la touchera tout autant.L\'austérité perpétue la criseL\'Allemagne défend la réduction des déficits budgétaires tout en souhaitant conserver une politique monétaire orthodoxe dont le seul objectif est le contrôle de l\'inflation. Cela a pour conséquence de faire sombrer le produit intérieur brut tout en creusant la dette, touchant les pays lourdement endettés qui doivent payer des primes de risque élevées, plus que les pays bien notés, en rendant leur dette passée insoutenable. Régulièrement, ils ont besoin d\'être aidés, et l\'Allemagne remplit ses obligations à cet égard, mais pas plus, en vue de sauver l\'euro. Et chaque fois que la crise se calme un peu, les dirigeants allemands reviennent sur les promesses qu\'ils ont faites. Ainsi la politique d\'austérité menée de front par l\'Allemagne perpétue la crise qui la place en position de domination.L\'Europe entre dans un monde dont le Japon essaie désespérément de se sortirLe Japon a adhéré à la même doctrine monétaire que celle défendue par l\'Allemagne et vécu en stagnation pendant vingt-cinq ans, malgré quelques stimulus budgétaires occasionnels. Le pays s\'est désormais détourné de ce chemin et s\'est lancé dans une politique monétaire accommodante à une échelle sans précédent. L\'Europe entre dans un monde dont le Japon essaie désespérément de se sortir. Et, alors que le Japon est un pays doté d\'une histoire ancienne et unifié depuis longtemps, qui peut supporter un quart de siècle de stagnation, l\'Union européenne est une association incomplète d\'États souverains dont la capacité à supporter une telle situation est improbable.Il n\'y a pas d\'autre conclusion possible que celle selon laquelle la politique menée actuellement est mal conçue. Elle ne sert même pas le propre intérêt de l\'Allemagne. Parce que les résultats sont politiquement et humainement intolérables, ils ne seront finalement plus tolérés. Il y a un danger réel pour que l\'euro finisse par détruire l\'Union européenne et laisse l\'Europe ruminer son ressentiment et ses demandes inassouvies. Le danger n\'est pas peut-être pas imminent, mais plus il arrivera tard, et pire ce sera. Ce n\'est pas dans l\'intérêt de l\'Allemagne.Les pays du sud doivent s\'unir, l\'Allemagne doit jouer son rôle de leader européenSinn évacue cet argumentaire en assurant qu\'il n\'y a pas de base légale permettant de forcer l\'Allemagne à faire un choix entre accepter les Eurobonds et quitter la zone euro. Il suggère que, si quelqu\'un doit quitter la zone euro, ce sont plutôt les pays méditerranéens, pour qu\'ils puissant dévaluer leurs monnaies. Cette recette est celle du désastre. Un défaut leur serait obligatoire, ce qui précipiterait la crise financière qui pourrait dépasser les capacités d\'intervention des autorités.Les pays fortement endettés doivent canaliser le mécontentement grandissant de la population et adopter une attitude plus constructive en s\'unissant pour demander à l\'Allemagne de faire un choix. Le nouveau gouvernement italien est bien placé pour mener un tel effort. Comme je l\'ai démontré, l\'Italie se porterait bien mieux quelque soit le choix fait par l\'Allemagne. Et si cette dernière échoue à répondre, elle devra porter la responsabilité pour les conséquences qui s\'ensuivront.Je suis sûr que l\'Allemagne ne veut pas être responsable de l\'effondrement de l\'Union européenne. Elle ne cherche pas à dominer l\'Europe et qu\'elle ne veut pas supporter la responsabilité qui va avec cette position. C\'est d\'ailleurs l\'une des raisons de la crise actuelle. Mais, bon gré mal gré, l\'Allemagne s\'est retrouvée dans cette position. L\'Europe bénéficierait d\'une position hégémonique assume. Et donc l\'Allemagne aussi.*George Soros est un célèbre financier international. Né à Budapest en 1930, il est président de Soros Fund Management LLC. Il conduit désormais une activité philantropique et se pose en défenseur de la démocratie et des droits de l\'Homme via Open Society Foundations, sa fondation.Traduit de l\'anglais par La TribuneCopyright: Project Syndicate, 2013.
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