La Chine devient moins inflexible sur le yuan

Lâchera, lâchera pas ? Il a suffi d'une petite phrase du gouverneur de la Banque populaire de Chine pour que bruissent les pronostics d'abandon prochain du lien fixe non officiel qui unit le yuan au dollar depuis juillet 2008. Zhou Xiaochuan a en effet admis samedi, en marge de la réunion plénière annuelle du Parlement, que l'actuelle politique de change de la Chine constituait la réponse temporaire de Pékin à la crise financière et que « tôt ou tard » les mesures « spéciales » mises en oeuvre devraient être abandonnées. De là à envisager une nouvelle phase d'appréciation du yuan, il n'y a qu'un pas que bon nombre d'experts n'ont pas hésité à franchir, prenant les souhaits de la communauté financière internationale pour des réalités. Le panel de 20 stratèges interrogés par l'agence Bloomberg pronostique une revalorisation de 5 % de la monnaie de l'empire du Milieu d'ici à fin mars 2011. Le désormais incontournable Nouriel Roubini a aussi livré sa propre prophétie, annonçant l'abandon du lien fixe, le « peg », dès le deuxième trimestre, suivi d'une réévaluation de 2 % du yuan, puis un renforcement progressif supplémentaire de 1 % à 2 % d'ici à douze mois.Certes, l'inflexion du discours chinois laisse perplexe. Pas plus tard qu'en décembre, malgré le flot de critiques sur la sous-évaluation du yuan, le premier ministre, Wen Jiabao, faisait valoir que la stabilité du taux de change du yuan était la meilleure garantie de la reprise économique mondiale. Il avait alors lancé : « Nous ne céderons à aucune pression visant à nous contraindre à une appréciation du yuan. »Reste à savoir ce que signifie « tôt ou tard » en chinois. Pékin nous a en effet habitués à ne procéder qu'à son rythme. Lent et mesuré. En juillet 2005, lorsque le renminbi, l'autre nom du yuan qui signifie « monnaie du peuple », fut réévalué de 2,1 %, le marché des changes a été pris totalement à contre-pied, car jamais les autorités monétaires de Pékin n'avaient laissé entrevoir que l'heure de la rupture de l'arrimage du yuan au dollar avait sonné. Au cours des trois ans qui ont suivi, la Chine a laissé le yuan se revaloriser de plus de 20 % face au billet vert, avant de rétablir le « peg », sans la moindre notification. Le marché ne pourra alors que constater qu'elle pilote mois après mois le cours du yuan autour de 6,83 pour 1 dollar, engrangeant au passage des tombereaux de dollars qui feront passer le volume de ses réserves de change de 1.800 milliards à 2.399 milliards de dollars. Aujourd'hui, cependant, les menaces de surchauffe de l'économie chinoise se sont multipliées, contraignant la banque centrale à entamer un début de resserrement des conditions de crédit. Temps fort de la semaine : la Chine va publier les chiffres concernant l'octroi de nouveaux crédits bancaires, qu'elle cherche par tous les moyens à freiner, après leur explosion. Si, comme anticipé, ils affichent un recul de plus d'un tiers, le recours à l'arme du taux de change pour calmer l'emballement de l'économie en sera d'autant différé. n
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