Une réunification économique éclair

Helmut Kohl était persuadé que l'intégration économique rapide était la clé de la réussite de la réunification. Il a donc mené ce chantier tambour battant, sans se soucier ni de la situation objective de la « dixième économie du monde », comme s'autoproclamait la RDA, ni des risques pour l'économie de l'Ouest. Dès le 1er juillet, trois mois avant la réunification politique, est ainsi signé le traité d'union monétaire et économique, qui prévoit un taux de change entre le mark de la RDA, l'ostmark, et le deutsche mark de 1 pour 1. Pour les dettes des entreprises et les plus importants montants, le taux est fixé à 1 DM pour 2 ostmarks. C'est un formidable cadeau politique : au marché noir, 1 DM vaut 6 à 9 ostmarks. En échange, la RDA accepte de s'intégrer dans le système économique et social de la RFA et perd ainsi toute indépendance financière. Elle n'a d'autre choix que de rejoindre la RFA. privatisationsCette victoire politique d'Helmut Kohl va coûter cher à l'Allemagne. L'État fédéral doit en effet désormais apurer les dettes est-allemandes, mais aussi payer les prestations sociales au prix fort. D'autant que, avec l'aide des Länder de l'Ouest, s'engage une modernisation des infrastructures de l'ex-RDA. Le processus de privatisation est fortement soutenu par l'État. Un organisme spécifique, la Treuhandanstalt, doit privatiser quelque 13.000 VEB, les entreprises « propriétés du peuple ». Compte tenu du faible niveau de compétitivité, d'endettement et de pollution de ces entreprises, l'État allemand doit accompagner les rachats d'immenses subventions. Pour chaque DM versé, on accordera en moyenne 3 DM à l'acheteur. Entre 1991 et 1994, 900 milliards de marks ont été dépensés pour l'intégration de la RDA.Lors des élections fédérales de 1990, Oskar Lafontaine, candidat du SPD, met en garde contre ce processus. Helmut Kohl, triomphalement réélu, compte sur la croissance liée à la reconstruction de l'Est. Mais la RDA aura besoin de plus de temps que prévu pour contribuer à l'économie allemande. Parallèlement, la croissance mondiale s'effondre. L'orthodoxe Allemagne est contrainte de présenter des déficits record. Jusqu'en 2006, sa compétitivité recule, les salaires sont gelés, les performances patinent. Avec les réformes Schröder, le pays retrouve au milieu des années 2000 sa puissance exportatrice, mais son marché intérieur reste atone. La nouvelle Allemagne, issue des choix de la réunification économique, bat désormais au rythme de la mondialisation.R. G., à Francfort.
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