Se loger et investir, l'obsession des jeunes couples chinois

Tous les matins, Xu Qiang dépose sa femme devant son agence de décoration d'intérieur avant de se rendre à son bureau chez IBM. Le trajet dure une heure en scooter, mais le double en bus. À eux deux, ils gagnent plus de 1.200 euros par mois. C'est un revenu correct mais ces cols blancs ont dû se résoudre à vivre à Jiading, loin du centre de Shanghai. « Le mètre carré est trois fois plus cher en ville, nous n'avions pas le choix », explique ce jeune homme de 27 ans. Aujourd'hui, Xu Qiang veut croire que son appartement de 60 mètres carrés, acheté 70.000 euros, restera un bon investissement à long terme, mais les questions qu'il pose courent sur toutes les lèvres?: quand vendre, quand acheter??À Shanghai, les prix sont toujours orientés à la hausse, de 30 % à 40 % entre juin 2009 et juin 2010. À Pékin, pour le seul mois de mars, la valeur du mètre carré s'est appréciée de 30 %. Avec un tel renchérissement du logement, de nombreux citadins dorment dans des dortoirs fournis par leur entreprise. « Le Conseil d'État se devait d'agir mais on est loin d'un scénario de bulle immobilière américaine, car le ratio des emprunts pour les logements rapporté au PNB reste bas, environ de 15 % », affirme Yan Jin, analyste chez Standard Chartered, à Shanghai.« Mesures fatales »En juin, la hausse des prix a marqué un coup d'arrêt suite aux mesures prises par Pékin, « les plus strictes de l'histoire », selon la presse chinoise. Depuis avril, les banques ne peuvent plus accorder de prêts hypothécaires pour l'achat d'un troisième logement?; elles doivent en outre exiger un acompte de 60 % et appliquer des taux d'intérêt élevés pour l'acquisition d'une résidence secondaire. Conséquence, entre le 15 et le 18 avril, l'agence immobilière pékinoise Zhongyuan a perdu 80 % de ses acheteurs. « Nous attendons une correction de 20 % des prix d'ici à la fin de l'année mais la baisse ne pourrait être que temporaire », tempère toutefois Yan Jin.À travers le pays, les ménages chinois se font économistes, anticipant le trajet de la courbe de l'immobilier. Les « mesures fatales » d'avril agitent l'Internet chinois. Selon le blogueur Shuoyan Wuji, cette politique ne vise pas uniquement les riches promoteurs, elle « pousse la grande majorité de la classe moyenne hors du rang des spéculateurs ». En l'absence de produits alternatifs, la pierre reste l'investissement préféré des ménages chinois. Les jeunes hommes se doivent aussi d'être propriétaires s'ils veulent trouver une épouse. Enfants uniques, ils peuvent compter sur l'aide de leurs parents.Mais cela ne suffit pas toujours, à l'exemple de Xiao Na et Li Bin. Il y a trois ans, leurs parents avaient proposé de les aider à s'installer à Shanghai en vue d'un mariage. Le couple avait refusé, se considérant, à 25 ans, trop jeunes. Aujourd'hui, la jeune fille le regrette amèrement, la tontine familiale suffit à peine à payer un appartement en lointaine banlieue?: « Je déteste la spéculation immobilière, s'énerve Xiao Na. Ces prix fous nous mettent sous pression. Ils augmentent mais on ne sait pas si, au final, ils ne risquent pas de s'effondrer et d'engloutir nos économies. »Émilie Torgemen, à Shangh
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