Protéger des forêts produira bientôt des crédits carbone

Chacun s'accordant sur le rôle des forêts dans le stockage de CO2, la nécessité d'intégrer la déforestation évitée dans ce qui remplacera le protocole de Kyoto, dont elle est exclue, fait consensus. Pas moins de 13 millions d'hectares disparaissent chaque année, notamment dans les principaux bassins forestiers de l'Amazonie, du Congo ou de l'Indonésie. C'est trois fois la Chine, 36 terrains de foot par minute, et près de 20 % des émissions mondiales. En cause : l'agriculture, les biocarburants, mais aussi le bois de chauffe ou l'agriculture sur brûlis. Or, dans le cadre des mécanismes de développement propre (MDP), seules sont aujourd'hui prises en compte pour la délivrance de crédits carbone les nouvelles plantations. Encadrées par des procédures si complexes que les projets certifiés se comptent sur les doigts des deux mains, et ne sont pas utilisables sur le marché européen des quotas. Le mécanisme de la REDD (« reducing emissions due to deforestation and degradation »), qui devrait être décidé à Copenhague, attribuerait aux forêts un prix correspondant au carbone qu'elles stockent en restant en vie, une tonne de carbone préservé donnant droit à des crédits échangeables sur le marché global du carbone. Le principe semble acquis, mais toutes sortes de questions restent ouvertes. L'approche nationale, par opposition à celle par projet, évite le déplacement du problème à l'intérieur d'un même pays, mais implique l'élaboration d'une stratégie nationale, puis celle des outils nécessaires à sa mise en ?uvre (mesure de l'existant et suivi de la situation, formation des populations, etc.). Les ONG à l'affûtMalgré le risque lié à l'instabilité politique et à la corruption de certains pays, « les investisseurs sont très intéressés », affirme Clément Chenost, directeur du développement de l'ONF International. Autre difficulté, élaborer un « scénario de référence » censé illustrer ce qui serait advenu en l'absence de tout projet, à comparer avec celui constaté à l'issue du projet REDD. Plutôt que le taux de déforestation historique, trop avantageux pour ceux qui ont déjà beaucoup détruit, il devrait prendre en compte le stock sur pied. Se pose alors le problème de la mesure du carbone stocké dans une forêt primaire et celui de la simulation d'une déforestation future, surtout si elle est due à plusieurs causes.Quant au risque d'un afflux massif de crédits venant perturber le marché du CO2, Clément Chenost se veut rassurant. « Le potentiel de la forêt est gigantesque, mais la réalisation de projets est complexe et les volumes générés devraient rester limités. » Suffisants néanmoins pour intéresser jusqu'aux ONG. A priori sceptiques devant un mécanisme qui ne permet pas de réduction nette des émissions et favorise les plus gros pollueurs, elles guettent avec intérêt une manne susceptible de financer des projets à forte composante d'aide au développement. Reste à savoir comment en répartir les bénéfices entre communautés locales et porteurs de projets?
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