Les sacrifiés de la rupture

La France du milieu a du mal à suivre, dans tous les sens du terme. Du mal à suivre la hausse du coût de la vie, comme le montre l'enquête de la CFDT Cadres que publie " La Tribune ". Et du mal à suivre la politique de Nicolas Sarkozy qu'elle a largement contribué à élire il y a un an et demi. Le président de la République a dû le sentir : il a ciselé son intervention d'hier de manière à rassurer cette catégorie qu'on appelle par commodité les classes moyennes et à laquelle entre la moitié et les trois quarts des Français, selon les études, disent spontanément appartenir. Ce vaste groupe social a pu se sentir laissé pour compte lors des grandes réformes du début du quinquennat. Pour ce qu'en retient l'opinion, le bouclier fiscal met à l'abri les plus riches - bien que les porte-parole du pouvoir s'époumonent à expliquer que la majorité des bénéficiaires sont des ménages modestes. Il en va de même pour les aménagements de l'impôt sur la fortune et des droits de succession. À l'autre bout de l'échelle, le futur revenu de solidarité active (RSA) doit aider à remettre en selle les plus défavorisés, qui bénéficient par ailleurs d'avantages sociaux antérieurs comme la couverture maladie universelle (CMU) ou, en Île-de-France, la gratuité des transports. Et au milieu, alors ? Rien que du punitif. Les franchises hospitalières et le déremboursement de médicaments, l'escamotage des 35 heures particulièrement pour les cadres, l'allongement des années de cotisation pour la retraite qui pénalise ceux qui ont commencé à travailler tard... Et, pour couronner le tout, la nouvelle taxe de 1,1 % sur les revenus financiers destinée à lever des fonds pour le RSA. Là encore, les " gros " s'en tirent bien puisque le bouclier fiscal s'applique pour eux, et les " petits " qui n'ont d'épargne que le livret A ne sont pas concernés (fort heureusement). Les mesures ciblées " classes moyennes ", pas de chance pour le gouvernement, se sont évanouies en même temps que la bonne conjoncture. Les heures sup défiscalisées, les intérêts d'emprunts immobiliers déductibles, le droit de débloquer son épargne d'entreprise, tout a été dévoré par la hausse des prix de l'année écoulée. Quant aux mesures plus qualitatives, comme l'assouplissement de la carte scolaire, la réforme des universités, la fiscalité écologique ou la modernisation du service public de l'emploi, elles n'ont pas encore produit d'effets tangibles. L'État aux poches vides ne peut guère gratifier des millions de ménages. Faute de mieux, il incite donc les entreprises à se montrer généreuses.
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