Un thème ultrasensible dans l'opinion

Au fil des semaines, le soutien de l'opinion publique ne se dément pas. Alors que l'intersyndicale appelle, ce mardi, à une cinquième journée d'actions contre la réforme des retraites depuis la mi-juin, près de 70 % des Français soutiennent le mouvement, selon un sondage CSA-« Le Parisien ». Et 66 % se disent favorables à un durcissement du conflit, selon une enquête BVA-M6.Le phénomène n'est pas nouveau. Dans le passé proche ou plus lointain, chaque réforme des retraites a suscité une réaction épidermique dans l'opinion publique. Et déclenché les grèves les plus dures ? comme en 1953 ou en 1995 ? ou alimenté des cortèges fournis comme en 2003 ou aujourd'hui. À l'origine de cet attachement très fort, la place de la retraite par répartition dans le « contrat salarial » né après la Seconde Guerre mondiale. « Les retraites sont, aux yeux des Français, le patrimoine de ceux qui n'ont pas de patrimoine, ce qui permet de sortir la vieillesse de la misère. Jusqu'à la création du régime par répartition, en effet, seuls vieillissaient bien ceux qui avaient du patrimoine », précise Jean-Marie Pernot, chercheur et auteur de « Syndicats : lendemains de crise ? », en cours de réédition chez Gallimard. « Après 1945, la retraite crée un horizon nouveau : il y a une existence possible après le travail. C'est à ce moment-là que la question devient sensible dans l'opinion », renchérit Stéphane Sirot, historien spécialiste des syndicats, enseignant à l'université de Cergy-Pontoise.La remise en cause du « pacte social » est d'autant plus mal vécue qu'elle s'est inscrite, ces vingt dernières années, dans un contexte de chômage de masse et de précarisation du travail. « L'attachement au symbole des 60 ans est une réaction face au durcissement du travail. La retraite apparaît comme une délivrance. C'est pour cette raison que les arguments du gouvernement autour des bornes d'âge ne passent pas », reprend Jean-Marie Pernot.BlocageJusqu'à ce mardi, qu'ils manifestent ou pas, qu'ils cessent le travail ou pas, les Français ont affiché leur solidarité. Pas sûr, comme l'a montré le conflit de 2007, que ce soutien se poursuive si des grèves reconductibles commençaient à bloquer le pays. Conscients de ce risque d'impopularité, les syndicats ? CGT en tête ? ont d'ailleurs refusé, pour l'instant, d'appeler à la grève illimitée. A. L.
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