La politique française envers les minorités épinglée par l'ONU

Plus de 40 camps de Roms ont été démantelés depuis quinze jours », s'est félicité jeudi matin le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux. Au même moment, à Genève, la radicalisation de la politique française au sujet des Roms et des gens du voyage ces dernières semaines, sur fond de discours sécuritaire, était vivement critiquée par un organisme de l'ONU. Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale (Cerd), passe en revue tous les cinq ans les politiques envers les minorités des pays qui ont ratifié en 1965 la Convention internationale sur l'élimination de toutes les discriminations raciales. Lors de l'examen du cas de la France, mercredi et jeudi, les 18 experts du comité ont d'abord dénoncé la « recrudescence des actes racistes » dans l'Hexagone, de même qu'ils ont pointé un manque de volonté politique, de la part des autorités françaises, pour lutter contre les discriminations raciales. « C'est une situation inédite, s'est réjouie Isabelle Denise, responsable juridique de la Ligue des Droits de l'Homme. C'est la première fois que des experts se détachent de la technique pure et posent des questions globales sur la volonté politique. » Le Cerd a en effet demandé à la délégation française des explications à propos du traitement fait aux gens du voyage et aux 15.000 Roms établis en France, s'inquiétant de l'annonce, le 28 juillet, du démantèlement de la moitié des campements illégaux d'ici à trois mois. Les experts onusiens ont également dénoncé la question de la déchéance de nationalité, envisagée par Nicolas Sarkozy, qui vise directement les Français d'origine étrangère. « Les experts se sont émus de cette question car elle touche aux principes fondamentaux, explique Marc Leyen-Berger, président de la sous-commission chargée du racisme de la CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l'homme), qui a suivi les débats à Genève. Rappelons que la déchéance de nationalité est en contradiction avec l'article premier de la Constitution française, qui veut que tous les Français soient égaux devant la loi. » La France s'est défendue jeudi devant le Cerd, invoquant le droit européen, qui permet, entre autres, aux États de statuer librement sur le droit de séjour des citoyens roumains dans un pays de l'Union. De quoi craindre que les recommandations définitives de l'ONU, qui seront publiées le 27  août, ne soient pas suivies d'effet en France, même si au ministère de l'Immigration on assure que « la France respectera ses engagements internationaux ».« un pays discriminant »Selon Marc Leyen-Berger, la France est « en mauvaise place » parmi les pays examinés sur la question de la discrimination raciale. « La France est un pays discriminant mais qui ne l'avoue pas », déplore l'historienne Esther Benbassa, qui a dirigé le « Dictionnaire des racismes, de l'exclusion et des discriminations » (Larousse, 2010). « Les intellectuels sont dans le déni, tandis qu'une bonne partie de la population est décomplexée », dit-elle, rappelant qu'un tiers des français se déclarent racistes, selon un sondage de la CNCDH publié en 2008.
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