Le bloc-notes de Stéphane Soumier

STRONG>Collapse"Oui, on était à deux doigts du blocage total, la journée de vendredi a sans doute été l'une des plus tendues de ces deux dernières années. En termes de violence de choc sur quelques heures, c'était presque plus fort que Lehmann. L'intervention décisive des Etats a permis de noyer l'incendie, mais je vous avoue que ça ne tenait pas à grand chose". Voilà ce que me dit, catégorique, en milieu de semaine, un acteur bancaire de poids. Et je veux insister sur un détail : ça tenait sans doute au fait que l'on était... vendredi. Le même choc un mardi ou un mercredi nous menait dans le mur. Parce que les marchés sont ainsi faits qu'ils s'arrêtent. Avouez d'ailleurs que c'est fascinant, c'est peut-être le seul élément de notre monde moderne que l'on puisse réellement mettre sur "pause". Vous pouvez être au bord du crack le pire, vendredi, 22 heures, heure de Paris, tout s'arrête ! Et vous avez jusqu'à 2 heures, heure de Paris, le lundi, l'ouverture à Tokyo, pour régler le problème. 52 heures !! C'est vertigineux. 52 heures pour éteindre un incendie, 52 heures pour monter une digue, 52 heures pour évacuer une ville, 52 heures pour désamorcer une bombe... aucune des menaces du monde moderne n'y résiste. La menace d'asphyxie financière n'y a pas résisté. La retraite de TrichetMais que s'est-il réellement joué pendant ces 52 heures? Dans la semaine je n'ai vu personne qui soit en mesure d'écrire cette histoire là. On vous livre quelques confidences. Celle qui revient le plus régulièrement, c'est que les Allemands auraient cédé, en échange de l'engagement de voir Axel Weber, leur représentant, prendre la succession de Jean-Claude Trichet, à la tête de la Banque Centrale Européenne. Pourquoi pas? Moi je continue à penser qu'il y a dans ces heures décisives de l'histoire, des dimensions humaines et psychologiques qui échappent à tout calcul politique. Quand le pistolet sur la tempe est exclu, il faut autre chose que des pressions classiques, pour que l'homme qui vous dit, raide et droit: "we didn't discuss about that, and i have nothing else to say", devant la perspective d'acheter les dettes des Etats souverains, se mette à le faire 52 heures après, avalant un plat de couleuvres digne d'une pasta party napolitaine. D'ailleurs ce que j'ai vu, c'est quand même une frénésie invraisemblable au fil des déclarations de la nuit de dimanche à lundi. Vous aviez 600 milliards à 2 heures du matin, 700 milliards une heure plus tard, puis 720, puis 750 milliards à 4 heures, l'heure du réveil des opérateurs de marché en Europe. On avait monté la digue, mais chacun se demandait encore si elle était assez haute. Voyelle... consonne...Des chiffres et des Lettres. C'était le jeux de la semaine, non ? On a les chiffres, les centaines de milliards qui s'alignent en matière de déficits publics. On n'a pas les lettres. Parce que le "7 lettres", "rigueur", ne passe pas. Pierre Giacometti, l'un des conseillers du président pour ces affaires d'opinion publique, en parlait assez librement en milieu de semaine: "la rigueur c'est vécu comme la dureté, l'inflexibilité, voire une certaine forme de cruauté. L'idée c'est de remettre en scène des notions positives. Parce que rigueur, c'est aussi sérieux, rectitude, précision, justesse, responsabilité". Retenez ces mots là, ils vont habiller le discours public des prochaines semaines. Épargne salarialeDavid Cameron a demandé à tous ses ministres de réduire leur salaire de 5%. Le geste est resté discret dans la (froide) torpeur de l'Ascension. Certains communicants sont en train de prier pour qu'il le reste. On se demande ce qu'ils vont pouvoir trouver, sinon, pour éviter à nos ministres un sacrifice comparable.
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