Un euro n'est plus égal à un euro

C'était l'axiome de base, l'alpha et l'oméga de la création de la monnaie unique européenne et de sa zone d'émission : un euro, d'où qu'il soit, de Francfort, d'Athènes ou de Dublin, valait un euro de Paris, Rome ou Madrid. Et comment en aurait-il été autrement, puisqu'il s'agit de la même monnaie ? Dans les premières semaines, les nouveaux convertis s'étaient même amusés à regarder l'origine de leurs piécettes jaunes et à constater qu'ils détenaient dans leur bourse un dix-centimes hellène ou un cinquante-centimes transalpin. Très vite, les Européens se sont habitués et cette circulation monétaire transnationale s'est banalisée. Dans les esprits, la religion s'est imposée : plusieurs pays, une seule monnaie. Et vive la simplicité lors des week-ends chez les voisins. Mais ces derniers mois, un doute s'est instillé, même chez l'Européen de la rue. Il a découvert que, sur les marchés, les émissions obligataires des nations de la zone, certes, toutes libellées en euro, n'ont pas la même valeur. Les écarts de taux ont été grandissant entre la dette allemande et celle de pays aux finances publiques nettement plus déséquilibrées, Grèce bien sûr mais aussi aujourd'hui Irlande, Portugal voire Espagne et peut-être demain Italie. Pour les marchés, un euro de dette n'est plus égal à un autre euro de dette. Et comme il faut toujours quelqu'un pour clamer que le roi est nu, Mme Merkel, y compris pour des raisons de politique interne, a fini par dire que ces pays européens fragiles, surnommés un temps outre-Rhin « le Club Med », devraient rembourser sans appui des autres pays de la zone... ou laisser une partie de leurs créanciers en plan. En clair : faites confiance à l'euro allemand, pas à l'euro du « Club Med ». Remplacez le mot euro par ceux de deutsche mark, drachme, livre irlandaise ou escudo et vous aurez le film « Retour vers le futur » en version monétaire. Mais Berlin doit être logique : une telle issue signifierait une réévaluation brutale de la devise allemande et une perte de compétitivité immédiate de ses produits à l'exportation... le moteur de son modèle économique. Est-ce pour cela que, ce lundi, Angela Merkel, devant le congrès de son parti chrétien-démocrate la CDU, s'est livrée à un vibrant plaidoyer en faveur d'une culture de stabilité mais aussi en faveur de l'euro ? [email protected] Olivier Provost,, directeur adjoint de la rédaction
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