Les entreprises davantage exposées à la faute inexcusable

Une entreprise ne peut pas échapper à sa responsabilité pour indemniser un salarié victime d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail. Même si elle avait cédé son activité à haut risque à une autre société, elle reste condamnable sur le terrain de la faute inexcusable. Dans un arrêt passé inaperçu du 3 juin 2010, la 2e chambre civile de la Cour de cassation a été claire sur ce point : « La victime peut poursuivre l'employeur qu'elle estime auteur de la faute inexcusable à l'origine de la maladie sans avoir égard aux conventions conclues entre ses employeurs successifs. » La protection du salarié, victime par exemple de l'amiante, est donc fortement renforcée.Dans l'affaire jugée, une personne a été employée de janvier 1972 à décembre 1989 par la société Ascometal. Puis son employeur a confié, par un contrat du 28 décembre 1989, en location-gérance à la société Valdunes tous les éléments corporels et incorporels composant la branche d'activité de fabrication, transformation et commercialisation des produits destinés au secteur ferroviaire de l'Usine des Dunes. Les contrats de travail sont également transmis au nouvel employeur. Et dans le cadre d'une convention d'apport partiel d'actifs, Ascometal a transféré définitivement le 5 novembre 1993 la branche d'activité à la société Valdunes.Par la caisse primaire d'assurance-maladie de Dunkerque, le salarié a été reconnu atteint d'une maladie professionnelle liée à l'inhalation de poussières d'amiante. Il a décidé de saisir le tribunal des affaires de Sécurité sociale pour faute inexcusable à l'encontre de la société Ascometal afin d'être indemnisé de son préjudice. Le tribunal lui a donné gain de cause. La société Ascometal a alors décidé de faire appel du jugement. Dans un arrêt du 29 mai 2009, la cour d'appel de Douai a retenu les arguments de cette entreprise. Autrement dit, les juges du fond ont considéré que le salarié victime aurait dû agir à l'encontre de la société Valdunes. Car la convention d'apport partiel d'actifs avait subrogé la société Valdunes d'une manière générale dans tous les droits et actions de l'entreprise Ascometal. Pour la cour d'appel de Douai, le salarié aurait dû engager une action en justice à l'encontre de Valdunes.Contestant l'arrêt du 29 mai 2009, le salarié victime a saisi la Cour de cassation. La haute juridiction lui a donné gain de cause le 3 juin 2010. Le salarié a le droit de rechercher l'employeur qu'il estime à l'origine de sa maladie professionnelle. Il n'est pas lié par les conventions passées entre ses employeurs successifs. Par conséquent, ces conventions ne permettent pas aux entreprises de se protéger contre l'action en justice d'un salarié sur le terrain de la faute inexcusable. Avec l'arrêt du 3 juin 2010, l'employé victime d'une maladie professionnelle n'est pas démuni puisqu'il pourra choisir parmi ses anciens ou actuels employeurs. Si la société à l'origine du préjudice n'existe plus, il pourra toujours agir contre son actuel employeur qui a repris la branche d'activité en cause. Seule solution des entreprises pour se prémunir : prendre un maximum de mesures préventives pour la sécurité et la santé de leur personnel.Frédéric Hasting
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