Derrière les mots de... Cécile Duflot

STRONG> - - -OLIVIER DUHAMEL* : « Le double sens de l'expression « gauche solidaire » lui convient »Par ces mots, Cécile Duflot accepte ainsi la dénomination proposée par Martine Aubry pour la nouvelle alliance rose-verte-rouge. Et cette configuration nouvelle qui émerge aux élections européennes et se confirme aux régionales a bien besoin de se nommer, pour se distinguer de « l'Union de la gauche » de jadis et de la « Gauche plurielle » de Lionel Jospin. Le double sens de l'expression « gauche solidaire » lui convient puisqu'elle le reprend : rassemblement et diversité. En clair, elle dit qu'ils sont « Unis mais différents ». Lorsqu'elle ajoute « dans la clarté », elle veut ajouter la petite touche propre à Europe Ecologie, pas seulement l'accord sur les postes, à la proportionnelle, mais aussi des compromis entre les programmes.(*) Politologue et professeur à Sciences po Paris.- - -ROMAIN PASQUIER* : « C'est quand même un peu plus compliqué ! »Martine Aubry veut réitérer le pari de François Mitterrand de la fin des années 1970, qui consistait à réunir l'électorat des classes moyennes urbaines montantes et l'électorat ouvrier. Aujourd'hui, les classes populaires ou moyennes en déclin votent Front de gauche, les classes moyennes hors des grandes métropoles votent PS, et les classes urbaines moyennes supérieures votent Verts. C'est quand même un peu plus compliqué ! Alors que les classes sociales ont implosé depuis les années 1980, qu'il y a plus de fragmentation et de cloisonnement entre les différents groupes sociaux qu'à l'époque, embrasser l'ensemble de cet électorat aux attentes sociales aussi différentes s'annonce complexe ! Quand les uns se demandent s'ils auront un travail demain, les autres n'aspirent qu'à améliorer leur cadre de vie... Ainsi, la définition par Cécile Duflot de cette « gauche solidaire » dit bien toute cette tension sociale fondamentale. Mais, si l'on peut toujours trouver des mots ambigus (et qui n'engagent à rien) pour faire tenir ensemble des groupes sociaux en voie d'éloignement, ce sera à l'évidence difficile à transformer pour construire un projet de société. Par quoi seront remplacés le « changer la vie » de l'Union de la gauche de François Mitterrand, puis le « Je dis ce que je ferai, et je ferai ce que j'ai dit » de la gauche plurielle de Lionel Jospin ? Quel programme peut donc les réunir sachant qu'ils s'opposent sur des dossiers assez stratégiques ? La taxe carbone et la réforme des retraites ? Le Front de gauche n'en veut pas ! Il est très hostile à l'Europe, alors que les Verts sont très européens. Il est encore très favorable au nucléaire, dont les Verts veulent sortir ! On peut toujours trouver des mots qui expriment la diversité et la solidarité, mais quand il va falloir écrire un vrai programme, tout cela risque d'être bien compliqué !(*) Politologue à Sciences po Rennes. - - -DANIEL COHN-BENDIT* : « C'est bien une culture du compromis que la gauche va devoir développer »Cécile Duflot ne dit pas autre chose que le retour de la gauche au pouvoir passera par un rassemblement de toutes les forces de gauche, lequel ne fonctionnera que si toutes ses composantes parviennent à construire un compromis pour rédiger une plateforme commune sur les orientations de sa gouvernance. Et cette plate-forme ne devra pas être construite à partir des seules propositions d'Europe Ecologie, de celles du Front de gauche ou des propositions socialistes, mais bien exprimer la diversité des cultures de la gauche. Cela suppose d'abandonner tout dogmatisme pour entrer dans une démarche d'intelligence et d'ouverture qui nous amène à remettre à plat tous les sujets et de faire ainsi émerger des solutions auxquelles nous n'avions pas pensé. Mais il faut se garder de tout hégémonisme pour se répartir les sièges de députés à l'Assemblée, tant le pouvoir devra se conquérir à tous les échelons : les primaires à gauche ne la conduiront au pouvoir que si les 3 à 4 millions d'électeurs sont amenés à se prononcer sur deux choix distincts : le choix d'un ou une leader pour conduire les présidentielles, et le choix d'une force politique qui permettra de définir le rapport de force à partir duquel seront attribués les sièges à chaque formation. C'est donc bien une culture du compromis dans son acception la plus large que la gauche va devoir développer -- à l'instar de ce qu'ont su faire les Verts et le SPD en Allemagne. La leader écologique n'exprime ainsi que le principe de réalité politique qui veut que, en l'absence d'un parti remportant la majorité des suffrages, l'alliance est incontournable pour reconquérir le pouvoir en 2012.(*) Leader d'Europe Ecologie.
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