Les mauvais remèdes de l'administration Obama

Il faut se rendre à l'évidence : la situation économique des États-Unis est grave pour des raisons structurelles durables. Tout d'abord, la solvabilité de beaucoup de ménages américains est très dégradée. 10 % des Américains ayant un crédit immobilier vont faire défaut sur leur crédit (arrêter de le rembourser) en 2010 ; 4 millions de familles auront leur maison saisie par leurs banques ; 11 millions de familles ont une dette immobilière supérieure à la valeur de leur maison, et auraient donc intérêt à faire défaut. La très lente remontée des prix de l'immobilier, qui ont baissé de 30 % depuis le début de la crise, n'améliore pas significativement cette situation, d'où l'absence de redémarrage du crédit aux ménages américains et la stagnation à un niveau extrêmement bas (500.000 par an contre 2.200.000 avant la crise) du nombre de mises en chantier de logements (500.000 contre 2,2 millions avant la crise). La solvabilité des Américains dépend beaucoup de leur richesse, et leur richesse immobilière et financière a baissé de 30 % avec la crise : il faudra donc de nombreuses années pour que les ménages rétablissent leur situation financière.Le second problème grave est la forte détérioration de la situation du marché du travail. Le taux de chômage est de 9,6 %, mais plus de 9 millions d'Américains travaillant à temps partiel déclarent rechercher un travail à temps plein : le taux de chômage au sens large est de plus de 15 %. Ceci vient de ce que les entreprises américaines cherchent à réaliser des gains de productivité très importants (5 % sur un an) et à déformer le partage des revenus au détriment des salariés pour retrouver leur profitabilité d'avant la crise, ce qui est en train de se réaliser. Il en résulte une faiblesse de la création d'emplois, une faiblesse des revenus salariaux et, enfin, une dégradation de la qualité des emplois.Enfin, le troisième problème grave est le besoin de désendettement des ménages et des entreprises. Le désendettement, qui pourrait durer plusieurs années, implique la hausse de l'épargne et la faiblesse de la dépense des ménages et des entreprises.La perspective, à deux ou trois ans, la plus probable pour l'économie américaine est donc celle d'une croissance modeste (2 % par an environ), d'une absence de réduction de chômage et d'un maintien de graves difficultés financières pour beaucoup de ménages. Cette perspective est insupportable pour l'administration Obama, et aussi pour la Réserve fédérale, d'où les annonces récentes de politique économique : nouveau stimulus budgétaire (incitations fiscales à l'investissement à hauteur de 200 milliards, 100 milliards de crédit d'impôt recherche, 50 milliards supplémentaires pour les infrastructures...) et politique monétaire encore plus expansionniste. Le problème est que ces nouvelles mesures de relance seront inefficaces et peut-être même dangereuses. Les ménages et les entreprises américaines veulent se désendetter : même si la liquidité bancaire est encore plus abondante, il n'y aura pas de reprise du crédit, faute d'emprunteurs. Les banques américaines disposent déjà de 1.050 milliards de dollars de réserves de liquidités, et le crédit ne redémarrera pas : à quoi cela servirait-il qu'elles aient 1.200 ou 1.300 milliards de dollars de cash excédentaire ? Inciter les entreprises à investir par des déductions fiscales ne va pas être très efficace dans une situation où le taux d'utilisation des capacités est bas (75 % au lieu de 82 % en moyenne) et où les entreprises n'ont pas besoin d'investir. Ces incitations fiscales vont générer un gros effet d'aubaine et peuvent simplement déplacer de 2010 à 2011 des investissements (comme on l'a vu pour les mêmes raisons pour l'investissement logement et les achats de voitures) : 2011 serait un peu meilleur, et 2012 un peu moins bon.Face aux problèmes structurels de l'économie américaine (désendettement, insolvabilité des ménages, chômage élevé), il est à craindre qu'il faille simplement être patient, et attendre le moment naturel, dans le futur, de reprise du crédit et de l'emploi, sans le handicaper par des déficits publics excessifs (déjà 11 % du PIB probablement en 2011) et l'excès de liquidité, qui pourrait seulement faire apparaître des bulles spéculatives sur les prix des actifs.
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