Vers une Communauté européenne des réseaux électriques

L'Europe s'est fixé des objectifs communs ambitieux pour la réduction des gaz à effet de serre et l'efficacité énergétique. En vue du sommet Énergie du 4 février prochain, la Commission vient d'estimer qu'un schéma de développement des infrastructures énergétiques à l'horizon 2020 était une priorité. Les réseaux de transport électriques apparaissent ainsi, plus que jamais, au coeur du succès de la stratégie énergétique européenne. Ils concourent en effet à la réalisation de nombreux objectifs : plus d'économies d'énergie, à travers les « réseaux intelligents » ; la nécessité d'accompagner le nouveau bouquet énergétique à venir, en particulier le raccordement des énergies renouvelables ; la sécurité de l'alimentation électrique et l'achèvement du marché interne européen de l'électricité, pour une plus grande efficacité d'un vaste parc de centrales de production.À ce titre, l'initiative de la Commission visant à mettre en oeuvre une planification stratégique à dix ans pour définir, en 2012, les projets prioritaires représentant un intérêt européen (qui seront accompagnés par un financement communautaire) est la bienvenue. Sans même attendre le lancement de cette grande « cartographie » des infrastructures énergétiques vitales, les réseaux de transport électriques progressent déjà, à grands pas, vers l'intégration des marchés.Il y a quelques jours, la France, l'Allemagne et le Benelux ont lancé un mécanisme permettant l'optimisation simultanée des capacités d'interconnexions transfrontalières et la répartition de la production sur l'ensemble des pays de la zone. En l'absence de congestion, ce « couplage des marchés » égalise parfaitement les prix dans tous les pays concernés et, en cas d'« embouteillage » sur le réseau de transport, rapproche les prix et maximise l'utilisation des infrastructures. De même, un guichet unique est maintenant disponible pour tous les acteurs du marché en France, en Allemagne et au Benelux ; ce service sera prochainement élargi à la région Centre-Sud Europe (Italie, Suisse, Autriche, Slovénie, Grèce) dans le cadre d'une société commune : « CASC.EU ».Mais la sécurité d'approvisionnement reste la mission première des réseaux de transport d'électricité. Dès 2009, la France s'est associée avec la Belgique et le Royaume-Uni pour créer Coreso, le premier centre de coordination commun pour l'Europe de l'Ouest. Preuve de son succès, cette entreprise commune s'est élargie le 26 novembre 2010 à l'Italie et au réseau électrique du nord et de l'est de l'Allemagne (dénommé « 50 Hertz Transmission »). 215 millions d'Européens bénéficient aujourd'hui d'une approche de sécurité électrique coordonnée, permettant d'anticiper et d'éviter des incidents susceptibles de créer des coupures majeures en Europe continentale.Toutes ces avancées concrètes bénéficient au développement économique et sociétal de notre vieux continent. Mais sont-elles bien comprises et acceptées par nos concitoyens ? On peut en douter. Ainsi, le principal défi pour des entreprises comme RTE, mais bien au-delà pour nous tous, réside à l'évidence dans l'acceptation par le public de la construction des lignes électriques, et en particulier par les riverains des futurs ouvrages. Les opérateurs de réseaux sont bien conscients de l'utilité et de la nécessité d'associer les citoyens et leurs représentants au processus de décision. La Commission a proposé d'encadrer les procédures nationales d'autorisation administrative dans des délais communs. Nous appelons de nos voeux, en complément, le lancement par l'Union européenne d'un vaste processus d'échange et de dialogue avec les citoyens européens, pour donner de la perspective aux enjeux énergétiques communs et mieux coconstruire l'avenir de l'Union dans ce domaine.Avec l'impulsion politique qui devrait intervenir au plus haut niveau le 4 février prochain, et sous l'égide d'ENTSO-E, l'association européenne des opérateurs de réseaux de transport d'électricité, tous les fondements d'une « Communauté européenne des réseaux électriques » sont en place. Le principal défi est maintenant d'écouter les parties prenantes : l'appropriation par tous des enjeux européens est la condition première de la réalisation de nos succès futurs.(*) Réseau de transport d'électricité.Par Dominique Maillard, président du directoire de RTE (*)
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