« Plus les universités sont autonomes,

jean-marc rapp, président de l'european university association (EUA)Quel regard portez-vous sur la réforme en cours dans les universités françaises ?La loi LRU sur l'autonomie s'inscrit dans ce que l'on observe dans de nombreux pays européens : accorder plus d'autonomie aux universités en échange de plus d'efficacité, de réactivité et de créativité. En Europe, il est avéré depuis plusieurs années que plus les systèmes sont autonomes, mieux ils fonctionnent. Pourquoi ? Parce que même si l'autonomie s'accompagne souvent de contraintes budgétaires, les universités étant complexes à gérer, mieux vaut les faire fonctionner de l'intérieur.Beaucoup d'universités françaises se plaignent finalement que l'Etat ne leur lâche pas assez la bride...Il est vrai qu'il y a une tradition de défiance réciproque en France. Dans beaucoup de pays, d'ailleurs, l'Etat éprouve de la peine à faire confiance et maintient sa laisse assez courte. Mais il y a suffisamment d'intelligence pour permettre aux universités de se prendre en charge. N'oublions pas que l'autonomie, c'est la créativité, donc le droit à l'erreur !Quels sont les grands défis qui attendent les universités ?Selon notre dernier rapport « Trends 2010 », l'un des sujets de préoccupation des universités européennes est l'internationalisation. En France, si l'on parle de l'attractivité des cursus, les réformes en cours vont dans le bon sens. A l'inverse, si l'on parle de l'attractivité du système pour les professeurs, il est clair que les conditions faites aux enseigants-chercheurs ne sont pas suffisantes. Dans ce contexte, l'autonomie et les regroupements sont des atouts pour pallier ces faiblesses. Deuxième défi, où la France a une carte à jouer, l'apprentissage tout au long de la vie. Dans ce domaine, l'université française bénéficie de son expérience en matière de validation des acquis. Mais le principal défi est celui de la massification : on demande aux universités de jouer la carte de l'excellence tout en formant de plus en plus de jeunes ! C'est un défi permanent. Si l'on avait une définition moins réductrice de l'excellence, on progresserait. L'EUA a par exemple un programme pour mesurer l'excellence en prenant en compte la recherche collaborative entre universités et industrie, au-delà des seules publications. Mais nous manquons encore d'instruments de mesure.Pour beaucoup, l'excellence se mesure à l'aune des classements, pourtant critiqués...Les classements engendrent beaucoup d'hypocrisie : tout le monde les récuse, mais les met aussi en avant. Or, ces classements, de par leurs méthodologies et leurs critères, sont réducteurs et se résument à de simples compilations de données, souvent limitées aux publications. L'EUA va d'ailleurs publier à partir de 2011 une évaluation annuelle des classements internationaux. Plutôt que d'investir dans ces concours de beauté, les pouvoirs publics feraient mieux d'investir dans la qualité de l'enseignement.Dans ce contexte, le grand emprunt vous paraît-il un atout ?L'objectif du grand emprunt est de replacer la France dans la compétition internationale. Saluons au passage que dans un contexte où la plupart des pays désinvestissent dans leur enseignement, seules l'Allemagne et la France font exception. Mais face à cet objectif d'excellence, de nombreuses questions restent posées : les universités pluridisciplinaires doivent-elles le rester ou non ? Quelle implication des régions ? Quelle part laisser à la recherche libre ? Enfin, il faut assurer aux projets une durée de financement suffisante. Propos recueillis par Clarisse Jay
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