Le Parti travailliste a « perdu le désir de vivre »

Royaume UniIl règne une ambiance de fin de règne sur le palais des congrès de Brighton, où se tient actuellement le congrès annuel du Parti travailliste. Devant une salle amorphe et à moitié vide, ses leaders se succèdent, récitant sur un ton mécanique leurs « réalisations » et « la nécessité de se battre pour les prochaines élections ».Mais, à huit mois du scrutin, plus grand monde, même chez les militants les plus aguerris, ne semble croire à une vic­toire possible. Implacables, les enquêtes d'opinions se succèdent et se ressemblent : le Labour stagne à 23 %, tandis que les conservateurs frôlent 38 %, selon la dernière d'entre elles. « Les travaillistes se dirigent vers leur pire défaite depuis 1918, souligne Andrew Cooper, de l'institut de sondages Populus. Dans l'histoire politique britannique, jamais aucun Premier ministre ne s'est remis d'aussi mauvais sondages. »Mo Marsh, conseil­lère municipale à Brigh­ton et membre des travaillistes depuis quarante ans, confirme cette impression sur le terrain. « Je n'ai jamais vu autant de colère contre le Labour quand je fais du porte-à-porte, reconnaît-elle. Les gens tiennent Gordon Brown pour responsable de leurs problèmes. » Selon elle, trois raisons expliquent cette défaite annoncée : la crise économique, le scandale des notes de frais des députés, « et puis, cela fait douze ans que nous sommes au pouvoir et les gens ne veulent plus entendre nos arguments ».Mark, conseiller municipal dans l'est de Londres, se désespère, lui aussi. « Les membres du gouver­nement sont compétents mais si ennuyeux, si incapables de transmettre le moindre message et la moindre émotion. » Pour ces deux militants de longue date, le meilleur résultat possible est désormais d'éviter que les conservateurs n'emportent une majorité absolue lors des élections, dont la date probable est le 4 mai 2010. Un tel vote permettrait aux travaillistes de former une coalition, peut-être avec les libéraux-démocrates.Pourtant, même les responsables du Parti travailliste n'ont plus vraiment l'air d'y croire. Alistair Darling, le chancelier, compare le Labour à une équipe de football « qui a perdu le désir de vivre ». Et ce n'est pas son annonce d'une prochaine loi pour limiter les bonus des banquiers [reprenant les principes entérinés au G20]qui va changer les choses. Le texte, que le gouvernement espère faire adopter dans les semaines à venir, signifiera la « fin des bonus automatiques pour les banquiers année après année », a prévenu le chancelier. Mais son discours a été mollement accueilli par des délégués travaillistesaccomplir des prouessesIl aura finalement fallu hier toute la rage de vaincre de Peter Mandelson, le ministre de l'Industrie, pour brièvement réveiller la salle. L'ancien stratégiste de Tony Blair, grand survivant de la politique britannique, après avoir été forcé à deux reprises à démissionner du gouvernement, a fourni un bref électrochoc : « Électoralement, nous faisons face à la bataille de notre vie. Eh, oui, nous ne sommes pas les favoris. Mais laissez-moi vous dire : si j'ai réussi à revenir, nous pouvons revenir aussi. » Il faudra que Gordon Brown accomplisse des prouesses oratoires similaires lors du grand discours qu'il doit prononcer aujourd'hui pour espérer renverser la vapeur. Mais l'Écossais n'a jamais été à l'aise dans cet exercice. n
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