Une solution à la grève de la SNCF !

Par Philippe Mabille  |   |  709  mots
Et si demain une simple application sur votre smartphone vous permettait de tout savoir, en temps réel, sur le meilleur moyen de rentrer chez vous ?

Retour de week-end, de congés, ou trajets domicile-bureau, dans nos villes encombrées et polluées, avec des transports publics congestionnés et aux grèves imprévisibles, c'est clair, un peu d'intelligence ne ferait pas de mal ! Cette solution vers une mobilité plus fluide n'existe pas encore, mais on en a les bases. Avec Velib' et Autolib', JCDecaux et Bolloré ont montré la voie, celle d'un partenariat public-privé, sous un format de concession, et apporté de nouveaux services urbains.

L'application Transilien en région parisienne en est une autre ébauche. Ce chantier n'en est qu'à ses débuts, mais une chose est sûre!: alors que nous serons de plus en plus nombreux à vivre en ville ou autour des grandes métropoles, le gisement de création de valeur économique mais aussi de bien-être à venir de la smart city est considérable.

Le temps perdu dans les embouteillages, à Paris, représente près de 6 milliards d'euros par an, soit 1.000 euros par an en moyenne par habitant. Pour avancer vers cette ville intelligente, il faut que tous s'y mettent. Or, les grands acteurs traditionnels de la ville, publics et privés, sont encore très en retard en France dans cette démarche, essentiellement par manque de vision à long terme. L'enjeu est de rendre la ville plus efficace et la vie en ville plus smart. Si les grands acteurs, publics - comme EDF, la SNCF, la RATP ou ses équivalents dans les grandes métropoles régionales - et privés, maîtres des réseaux, comme Veolia, GDF-Suez, Vinci, Bouygues, Schneider ne s'y mettent pas, d'autres le feront à leur place.

Dans un contexte de disette budgétaire pour les collectivités locales, les élus, sous la pression des électeurs, finiront par accéder à la demande d'ouverture des données publiques, libérant un immense champ pour de nouveaux entrants : une multitude de start-up, mais aussi, en embuscade, les géants du Net comme Google, Apple, Facebook et autres, qui sont très en avance sur le plan technologique et ont l'avantage d'être en contact permanent avec des millions de clients, qui sont aussi des citadins.

Imaginez si, demain, une appli vous permet d'organiser un voyage, porte à porte, de votre domicile à votre lieu de week-end tout en vous proposant de réserver les billets, la voiture (électrique) de location ou tout autre service utile, que restera-t-il à la SNCF ? Guillaume Pépy a conscience du danger, lui qui appelle les cheminots à "se remettre au travail" et se prépare déjà à vivre dans un monde plus concurrentiel.

Comme les hôteliers, les taxis et tous ceux qui pensent vivre dans une position établie, la numérisation va bouleverser les rentes et modifier la chaîne de valeur. La smart city, c'est avant tout améliorer la qualité de vie en ville. Il n'y pas que les transports: les services publics en réseau, le logement, les loisirs peuvent être rendus beaucoup plus accessibles à tous, en gérant mieux les flux.

Cela peut aussi permettre de réduire les coûts, de faire des économies de personnel ou de dépenses d'énergie, donc de baisser les impôts. C'est un enjeu clé pour l'attractivité des villes, au niveau mondial comme au niveau national. Bien sûr, tout cela relève encore un peu de la science-fiction. Pourtant, les premières Google Car sans conducteur arriveront d'ici à 2020 aux États-Unis. L'ouverture à la concurrence dans les transports est une réalité que même un mois de grève à la SNCF ne brisera pas.

Et surtout les habitants des villes ont désormais pris conscience du pouvoir que peut leur apporter le numérique et exigeront que les services urbains accompagnent ce mouvement. Dans la ville intelligente et connectée, le pouvoir va changer de mains. L'avenir appartient aux plus visionnaires, comme Vincent Bolloré ou le groupe JCDecaux, qui ont été les pionniers. La suite devrait assez rapidement donner tort à tous ceux qui pensent qu'il n'y a pas de modèle économique rentable dans la smart city. Les entreprises de diligence pensaient la même chose au moment de l'arrivée du train à vapeur.

Lire notre dossier : "Qui gagnera la bataille de la smart city". La Tribune Hebdo du 20 juin 2014.