La crise chinoise met l'Europe face à ses responsabilités mondiales

L'Europe doit cesser de déprimer la demande mondiale par des politiques restrictives. Elle doit jouer un rôle de locomotive aux côtés des Etats-Unis. Par Olivier Passet, Xerfi
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi. / DR

La dégringolade de la bourse de Shanghai ne peut étonner que ceux qui n'ont pas vu l'épuisement inexorable du modèle de croissance extraverti de la Chine. Elle est aussi le révélateur de la fin d'une phase de la mondialisation où les firmes multinationales voyaient dans les pays émergents un stimulant de leur offre par la baisse des coûts de production, et un catalyseur de la demande avec de nouveaux débouchés.

Les émergents sont en panne

Le monde a rebasculé vers les pays occidentaux avancés. Pour autant, pour avoir joué le jeu de la mondialisation sauvage, nombre de pays avancés se sont englués dans des politiques d'offre dont on voit aujourd'hui le caractère vicieux. La généralisation à l'ensemble des pays d'un modèle de croissance exclusivement extraverti, consistant à mobiliser les armes de la dévaluation interne et externe sape in fine la demande mondiale et étend le problème de la déflation rampante. La crainte d'une japonisation du monde qui pointait en 2008, est bel et bien en train de se concrétiser.

L'impasse des stratégies non coopératives de résolution de la crise

La stratégie du chacun pour soi, qui consiste à se refaire une santé sur le dos des autres a provoqué un autre cercle vicieux, qui ne fait que déplacer le problème du déficit de demande mondial sans jamais le résoudre, chacun dévaluant à son tour.

Et au sein même de l'Europe, les pays ont opté pour ce mode de résolution de crise, essayant de reprendre pied à base de dévaluation salariale et fiscale. Mais dès qu'une zone économique va mieux, parce qu'elle siphonne une demande mondiale en décélération, elle met en difficulté une autre région du monde.

Recentrage des grandes entreprises

La panne de l'eldorado chinois et des pays émergents met aussi les firmes multinationales face à un virage stratégique majeur : il leur faut revenir d'urgence vers les pays avancés pour retrouver des relais de croissance et maintenir la profitabilité. Or ces stratégies de recentrage s'inscrivent dans un environnement occidental marqué par des taux d'intérêts historiquement bas et l'absence de vrai moteur pérenne de demande.

Dans ce contexte, la stratégie des grandes entreprises ne peut qu'accorder la priorité à la consolidation du système productif par une fuite en avant dans les fusions-acquisitions. Ce n'est pas bon pour la demande, ce n'est pas bon pour la croissance. Cela signifie de nouvelles destructions de capacités de production, cela signifie de nouvelles érosions de la demande. On voit ici les limites extrêmes, voire les effets pervers des politiques monétaires accommodantes.

On voit là l'immense danger pour l'Europe de s'acharner à contribuer à déprimer la demande mondiale.

Bien au contraire, c'est maintenant à son tour de prendre le relais des Etats-Unis, qui ne peuvent pas rester la seule locomotive de la croissance. Sous cet angle, l'Europe porte une lourde responsabilité : car elle est, pour les années à venir, la seule région capable de stimuler la croissance mondiale.

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Commentaires 5
à écrit le 31/08/2015 à 9:53
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Désolé mais le titre est fallacieux : il n'y a pas de crise en Chine. La crise, par contre, se trouve du côté de Wall Street et de Washington, les États européens dans leur "imposante souveraineté", ne feront que suivre les règles dictées par les pre...

à écrit le 30/08/2015 à 22:59
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Très bonne analyse qui démontre le rôle moteur de la demande. Keynes est plus que jamais d'actualité.

à écrit le 30/08/2015 à 17:24
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L'Europe doit prendre ses responsabilités, ça veut dire quoi ? Augmenter encore et encore l'endettement ? Continuer à dépenser, année après année, plus que ce que l'on gagne ? Nous sommes déjà surendettés, et il faudrait aggraver notre cas ? L'auteu...

à écrit le 30/08/2015 à 1:08
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Les partisans de l'offre contre la demande vont encore ricaner mais ce qui se passe donne raison au point de vue d'Olivier Passet : on est devenu le trou noir de l'économie mondiale. Le jour où l'industrie allemande tombera dans ce trou noir ils rica...

à écrit le 29/08/2015 à 20:42
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Lui , c'est un bon ! Et oui , toute relance par la demande se traduira en importations chinoises ! Depuis 2007 , ils ont racheté un paquet d'entreprises et nous ont pas rendu la main . Alors , laissez les européens apurer leurs comptes publics afin d...

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