Macron et Trump à l'épreuve de la ligne sanglante en Syrie

Après avoir défini une "ligne rouge" à ne pas dépasser - l'utilisation de l'arme chimique -, la reculade de Barack Obama en 2013 fut une terrible erreur, celle qui ouvrait la porte à tout, et surtout au pire. La « ligne rouge » est devenue une ligne sanglante. Par Jean-Christophe Gallien, professeur associé à l'Université de Paris 1 La Sorbonne, président de j c g a.
(Crédits : DR)

Voici une épreuve majeure pour Emmanuel Macron, bien au-delà de la pseudo « Guerre du Rail » française, celle diplomatique et militaire d'une vraie guerre, en Syrie.

Quelle terrible erreur, pire, quelle faute que celle commise en 2013 par Barack Obama. Le président star avait fait de l'arme chimique la « ligne rouge » à ne pas dépasser par Bachar al-Assad. Obama, prix nobélisé et globalement adulé, Président de la première puissance mondiale, avait, devant l'obstacle des frappes chimiques syriennes, refusé de prendre ses responsabilités punitives. Chantre d'un incertain « leading from behind », Barack Obama avait ainsi ouvert la porte à tout, partout, et surtout au pire.

Ce fut le repli de trop. Dans ce monde multipolaire et instable, on ne peut affirmer une vision du monde agissante en restant caché à la Maison-Blanche, en moulinant les bras et la voix au Conseil de sécurité ou devant les caméras des grands networks. Le storytelling hollywoodien et la communication politique, même 2.0, ne peuvent rien contre les actes, en particulier violents ou barbares. Donald Trump, Emmanuel Macron, Theresa May et d'autres vont devoir s'en souvenir lorsqu'ils vont décider quoi faire dans les prochaines heures.

Les démocraties à l'épreuve de la gangsta-diplomatie

La  « ligne rouge » de Barack Obama est devenue une ligne sanglante tant elle a été bafouée ! Ils sont quelques-uns, on cite souvent Bachar al-Assad depuis 7 ans, mais ils sont plus nombreux et dans d'autres géographies, à tester une ligne de l'horreur très mouvante et acceptable par le camp des démocraties. Forts de leurs stabilités internes verrouillées, c'est un euphémisme, ils éprouvent, sans relâche, nos faiblesses individuelles et collectives, dans une nouvelle géopolitique de l'épreuve entre terreur asymétrique et gangsta-diplomatie. Ils avancent durablement dans un gagne terrain ciblé et régional en profitant de la crainte obsessionnelle et paralysante des risques de réactions en chaîne internes et externes de nos agora démocratiques.

Dans la crainte d'une onde de choc planétaire

En 2013, la couardise de Barack Obama s'exerça alors que la situation en Syrie était chaotique mais beaucoup plus claire et à l'avantage des puissances occidentales. 2018 propose un équilibre beaucoup plus complexe. La Syrie est comme d'autres espaces, peut-être encore plus que d'autres, l'une de ses régions où se teste l'équilibre global des forces de blocs de puissances rivaux. Dans le désordre, vous les réassocierez, USA, Russie, France, Iran, UK, Turquie, Israël, Arabie Saoudite, Chine... tous alimentent cette géopolitique de l'épreuve, Kosovo, Irak, Syrie, Géorgie, Syrie, Ukraine... Une pratique qui atomise toute réponse d'opposition par crainte d'une onde de choc planétaire.

Quelle solution proposera la néo-diplomatie d'Emmanuel Macron ?

Le stop n'existe plus d'autant que l'autre paralysie est celle de l'ONU. Les 11 vetos russes déposés, depuis 2011, au Conseil de sécurité bloquent toute résolution condamnant le régime de Bachar al-Assad. Moscou désamorce aussi les enquêtes sur des exactions présumées. Nul doute que le veto de la Russie s'opposera encore à la validation d'une intervention collective de punition co-pilotée par les USA et la France.

Voici un test d'envergure pour un Emmanuel Macron, qui tente d'imposer sa marque mondiale méthodiquement depuis son accession à la Présidence. Il fait face à la géopolitique de l'épreuve proposée par des adversaires qui vont jauger la réalité de ses ambitions et de sa détermination comme celle de son allié de circonstance, Donald Trump. S'ils reculent comme Barack Obama, ils perdront individuellement et collectivement une large part de leur crédibilité. S'ils décident de se lancer dans l'aventure de frappes sur la Syrie de Bachar al-Assad, ils poseront un stop à ce gagne terrain mortifère de la terreur mais ils prendront aussi le risque de déclencher une escalade guerrière. La néo-diplomatie d'Emmanuel Macron doit inventer une solution et proposer des actes. Vite, très vite !

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Par Jean-Christophe Gallien

Professeur associé à l'Université de Paris 1-La Sorbonne
Directeur général de ZENON7 Public Affairs et Président de j c g a 
Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals

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Commentaires 17
à écrit le 12/04/2018 à 20:23
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L'empoisonnement de l'ex espion ruso américain, les sois-disant bombardements chimiques, ne sont que des magouilles pour destabliser le mondial de football, car c'est la Russie qui l'organise. Politiquement, Trump n'est pas un modèle à suivre. Il ya ...

à écrit le 12/04/2018 à 9:26
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France, USA, GB veulent donner une leçon à Assad : mais quelles épreuves ont que le homme d'état syrien a employé le gaz ? Il me semble ridicule qu'Assad qui vastement vainc la guerre et maintenant a libéré la Goutha pour le 95% emploie gaz poisons d...

à écrit le 11/04/2018 à 20:32
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Donc si Trump et Macron ne déclenchent pas la guerre maintenant, c'est des lâches ? Belle rhétorique guerrière commune aux néocons étasuniens, ou de cour d'école comme les tweets de Trump. Heureusement une large partie de nos concitoyens est contre .

à écrit le 11/04/2018 à 17:06
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On nous refait le coup des armes de destruction massive qui ont probablement été utilisés mais par qui. Assad et les islamistes de toutes sortes qu'il combat sont parfaitement capables de s'en servir et sont dénués de tout scrupule les uns comme les ...

à écrit le 11/04/2018 à 14:10
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La seule question valable est: "qui peut croire qu'envoyer des missiles et de tuer quelques militaires syriens ou russes vont changer quoi que ce soit à la situation syrienne?". Alors, pour une fois, on va laisser les syriens régler leur problème (le...

le 11/04/2018 à 16:39
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Tout à fait d accord avec vous ! Cela ne risque qu une chose nous entraîner dans une nouvelle guerre mondiale ! Là bêtises des politiques est sans nom on vient de le voir avec le livre et l interview de hollande ! Mon pauvre ! Un an avant l affair...

à écrit le 11/04/2018 à 13:37
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Tout ça c'est un discours qui nous ramène à une seule chose: les USA sont les gentils, les autres sont les méchants, et les méchants sont là où il y a du pétrole . Aucun pays du moyen-orient n'a autant déstabilisé la région autant que les USA. La ...

à écrit le 11/04/2018 à 13:20
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le plus important pour Macron c'est de qualifier les armes face aux systèmes russes afin d'en vendre plein aux démocraties libérales telles que Qatar, ArabieSaoudite, Egypte etc ... PS: au passage, félicitations au Gal De Villiers pour sa promotio...

à écrit le 11/04/2018 à 11:37
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Cette affaire était largement prévisible. La souveraineté syrienne se restaure à grand frais et les dernières poches rebelles sont les anciens alliés de la coalition occidentale, ceux qui "font du bon travail" pour abattre le tyran. La coalition a dé...

à écrit le 11/04/2018 à 11:24
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N'ayons pas la memoire courte,les etats unis nous ont dejà fait le cout de la fausse accusation en irack Heureusement, nous avons eu la sagesse de MR CHIRAC ,,,, jupiter est loin d'etre infaillible

à écrit le 11/04/2018 à 10:14
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Bon alors pour commencer on va arrêter le délire. Attaque chimique ? D'accord montrez moi les preuves. Ensuite montrez moi les preuves que ça vient du régime syrien. C'est marrant rien qu'à cette étape le bat blesse... Mais admettons, attaque chi...

le 11/04/2018 à 10:53
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C'est vrai que la russosphère est vachement présente sur les forums français... Avec la complicité de la fachosphère ? Certainement... Défendre Assad mon pauvre ami à l'heure actuelle ne relève plus que du trollage abjecte exacerbé hein, réveille...

à écrit le 11/04/2018 à 10:11
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Comment un professeur et journaliste peut écrire un article autant dénué de neutralité et bourré d'accusation sans preuve?! Ça me consterne ! C'est l'avenir du monde qui se joue ! Si Macron et trump voulaient vraiment jouer aux justicier , pourquoi i...

à écrit le 11/04/2018 à 10:00
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"La néo-diplomatie d'Emmanuel Macron doit inventer une solution et proposer des actes" Non mais vous voyez de qui vous parlez ? Votre amour aveugle pour le mac vous fait perdre la raison c'est un fait. May et Macron suivent la stratégie de TR...

à écrit le 11/04/2018 à 9:45
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Gallien s'est souvent trompé dans ses analyses

à écrit le 11/04/2018 à 9:29
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Que du suivisme bête et méchant, aucune souveraineté dans les décisions et ce n'est que la parti visible de ce que l'on nous raconte, car pour les réformes que l'on nous impose, c'est la même chose!

à écrit le 11/04/2018 à 9:03
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La france n a rien à faire en Syrie ! Ça serait une bêtise de plus ! Aucune preuve sur l utilisation de gaz chimique juste du blabla pour faire croire que

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