Pourquoi Issoudun est un enjeu majeur du macronisme municipal

POLITISCOPE. Pour Macron, la guerre des municipales serait d'abord réussie si LREM réussissait à récupérer le maximum de grands électeurs en vue des sénatoriales. Par Marc Endeweld, journaliste (*).
Pour les macronistes, déboulonner André Laignel (à dr.) à Issoudun dégagerait de la vice-présidence de la puissante Association des maires de France l'un des plus virulents opposants au président.
Pour les macronistes, déboulonner André Laignel (à dr.) à Issoudun "dégagerait" de la vice-présidence de la puissante Association des maires de France l'un des plus virulents opposants au président. (Crédits : Ludovic Marin / AFP)

Maintenant, il faut finir le boulot.. Pour tuer les partis traditionnels une bonne fois pour toutes, pour ne pas être uniquement présenté comme un simple accident de l'histoire -ou pire, une parenthèse- Emmanuel Macron se doit de les pulvériser une seconde fois... mais, cette fois-ci, localement.

Quelle gageure pour l'ex-ministre de l'Économie qui osait, dès 2015, affirmer à ses collègues que passer par les élections dites « intermédiaires » pour accéder à la première marche était un « cursus d'un ancien temps ». Cette conviction, l'ambitieux réussira à l'incarner deux ans plus tard. Disposant désormais du pouvoir suprême de la Ve République, le jeune président aime croire, et faire croire, que par la seule volonté tout est possible, qu'il suffit de faire tabula rasa. C'est le fantasme originel des « marcheurs », l'idée qu'un « nouveau monde » est possible, qu'il suffit d'appuyer sur la touche reboot.

Les Français ne l'entendent pourtant pas de cette oreille. Avec la présidentielle, ils considèrent que les municipales sont les élections reines, que la démocratie locale signifie, encore, quelque chose. De leur côté, les partis traditionnels, notamment le PS et LR, ne sont pas prêts à rendre les armes. « Pour ces partis, ce sont des élections vitales. Le PS s'est toujours reconstruit à partir des villes. La social-démocratie à la française, c'est le socialisme municipal », nous confie un dirigeant socialiste. Jouissant d'un ancrage historique, les élus de ces partis sont encore bien implantés. Mieux, beaucoup n'ont pas rougir de leur bilan.

Étrange période donc où celui qui s'est fait sur son seul nom doit s'implanter aux quatre coins de France. Se faire transplanter même, tant LREM est apparu, parfois, hors sol. Au sein du parti présidentiel, les troupes semblent attendre d'y voir plus clair. Comme un parfum de drôle de guerre : à défaut d'une stratégie d'ensemble, les situations se règlent au cas par cas. Dans chaque ville, cela négocie sec avec les forces compatibles. Pour ne rien arranger, le bal des prétendants est loin d'être terminé, comme on peut le voir avec le choc Griveaux-Villani à Paris. Mais Macron semble s'en désintéresser car il voit au-delà.

Son obsession reste la présidentielle de 2022, sa réélection. Alors, bien sûr, les regards se tournent vers les métropoles - ne sont-elles pas le terreau premier du « macronisme », persiflent ses contempteurs ? L'objectif de Macron pour ces prochaines élections est pourtant moins spectaculaire, car difficilement médiatique. Loin de chercher à établir de nouvelles baronnies, il souhaite d'abord casser d'une manière irréversible l'hégémonie historique des vieux partis.

On retrouve cette obsession présidentielle contre les élus PS et LR dans cette confidence estivale - en apparence surprenante - d'un de ses supporters : « Issoudun est un des enjeux majeurs des prochaines municipales. » Issoudun, petite bourgade du Berry, n'est autre que le fief du socialiste André Laignel et vice-président de la puissante Association des maires de France (AMF), qui ne manque jamais une occasion pour critiquer l'Elysée : « Battre Laignel, c'est le dégager de l'AMF. »

Mais dans le viseur de Macron on trouve surtout l'un des rares contre-pouvoirs institutionnels, le Sénat, qu'il considère comme un obstacle à « la modernisation » du pays. Ce Sénat qui a eu l'outrecuidance de s'emparer de l'« affaire Benalla ».

Sur son chemin pour 2022, les héritiers de Gaston Monnerville sont un obstacle de taille. Pour Macron, la guerre des municipales serait d'abord réussie si LREM réussissait à récupérer le maximum de grands électeurs en vue des sénatoriales. Dans cette perspective, Anne Hidalgo à Paris pourrait en profiter, laissant Macron réorganiser le Grand Paris à sa guise, en fusionnant les départements des Yvelines et des Hautsde-Seine pour mettre la main sur le vrai coffre-fort de la droite française. Hidalgo aurait par ailleurs l'avantage, pense Macron, de ne pas lui faire de l'ombre si cette dernière avait des velléités, elle aussi, présidentielles. Comme quoi, on en revient toujours à 2022...

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NOTE SUR L'AUTEUR

Marc Endeweld, auteur de L'ambigu Monsieur Macron (Éditions Flammarion), et de Le grand manipulateur - Les réseaux secrets de Macron (Éditions Stock), tiendra désormais chaque semaine une chronique politico-économique dans La Tribune intitulée "Politiscope".

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Commentaires 2
à écrit le 30/09/2019 à 17:45
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Lâchez le Macron, vous voyez bien qu'il est au bout du rouleau et que c'est pas lui qui décide... Puis vous aimez tellement toutes ces stratégies de prises du pouvoir, vous ne vivez tous que pour ça et au final en avez tous oubliés vos administré...

à écrit le 30/09/2019 à 15:48
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je croyais , bètement surement , que le président de la république était celui de tous les français et non pas celui d'une caste et donc n'avais pas a s'immicer dans des élections locales !

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