Zone euro : les divergences exacerbées

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, les divergences exacerbées de la zone euro.
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi. / DR

La détérioration de la compétitivité coût du sud a joué sans conteste un rôle crucial dans l'enlisement économique de la zone euro.

La résorption des écarts de coûts unitaires depuis 5 ans pourraient dès lors donner l'impression que la zone a retrouvé le chemin de la convergence. Ce serait s'arrêter cependant à une vision bien réductrice de la convergence réelle.

Un appauvrissement durable du Sud

L'écrasement des écarts de coûts a été payé au prix fort par le sud : par une hémorragie des cerveaux, par un sacrifice de l'investissement et un renforcement de l'agglomération des activités à forte intensité intellectuelle au cœur de l'Europe. Ce que l'on appelle convergence consacre au fond un nouvel ordre de domination économique qui scelle des écarts régionaux de développement permanents. Avec l'Allemagne comme épicentre productif de l'Europe.

Principal donneur d'ordre et principale puissance exportatrice de la zone. Avec une périphérie dans ou hors zone euro dont la vocation est de se spécialiser sur les segments low cost et low tech, ce qui intensifie la concurrence par les coûts au sein de la zone.

Une périphérie dont la vocation est aussi de servir de base de sous-traitance pour l'industrie du cœur, en se spécialisant sur les segments de la chaine productive à faible valeur ajoutée.

L'assemblage automobile par exemple dans le cas Espagnol, pour le compte des marques étrangères, française, allemande notamment.

Avec enfin la France et l'Italie, les deux grands pays généralistes concurrents de l'Allemagne, qui peinent à maintenir leurs position lorsqu'ils sont en concurrence frontale avec les industries rhénanes.

La perspective d'un gouvernement économique européen s'éloigne

Ce que l'on appelle convergence recouvre ensuite des divergences d'intérêt entres nations que l'a crise n'a fait qu'exacerber. Des divergences qui éloignent la perspective d'un gouvernement économique alors que ce dernier aurait dû être consubstantiel de la création l'euro pour en assurer le bon fonctionnement.

Le Plan Junker ne peut voiler le fait que, moins que jamais, les pays de la zone sont prêts à mettre en commun des ressources et à gérer collectivement certaines fonctions avec une vision commune. Leurs choix d'investissement collectif d'abord. L'Allemagne, pays au vieillissement le plus avancé, ne peut résoudre son équation des retraites qu'en se désendettant et en concentrant les excédents d'épargne.

Principal créancier, elle veut garder la main sur ses choix d'investissement. Les pays du sud, s'ils veulent poursuivre leur rattrapage, mais même la France ou l'Italie, ont beaucoup plus intérêt à s'endetter pour engranger l'avantage de taux historiquement bas et rehausser leur positionnement productif.

Même absence de vison commune concernant les investissements sociaux, dans la santé et l'éducation notamment.

La France a des besoins à destination de la jeunesse bien plus importants que l'Allemagne

L'Allemagne n'a pas d'intérêt immédiat à financer le capital humain hexagonal ou des pays périphériques réservoirs de main-d'œuvre bon marché. Pas plus que la France n'a intérêt à mutualiser les besoins de santé et de dépendance allemands. Sans parler du projet d'Europe sociale qui fait plus que jamais figure d'utopie, tant les risques liés au chômage ou à la pauvreté sont inégalement répartis entre régions.

Plus emblématique encore, l'Europe, en panne de projet constructif ne parvient même pas à conjuguer ses intérêts sur un mode défensif, que les  menaces soient externes, ou internes : L'absence de  front commun sur le plan militaire ou financier face à la menace terroriste en dit long à nouveau sur notre déficit de cohésion.

La France fait finalement cavalier seul sur les terrains d'opération. Et face aux menaces internes, qu'elles soient sociales ou politiques, l'idée même d'une solidarité intra-européenne  a elle aussi montré ses limites. Pour les plus optimistes qui croient que l'Europe progresse à travers ses crises, le moins que l'on puisse dire, est que le bilan de cette crise paraît bien mince.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 3
à écrit le 29/04/2015 à 9:12
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Pensez vous que les USA négocierai le TAFTA en catimini face a une Union Européenne solide? Mettre une dose de "chaos" leur permet d'être maitre du débat!

à écrit le 29/04/2015 à 8:30
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Taxer le travail favorise le chomage; taxer l'énergie favorise les économies d'énergie.

à écrit le 29/04/2015 à 8:24
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La différence essentielle concerne le système fiscal; nous taxons le travail et les autres taxent la consommation, et plus spécialement la consommation d'énergie

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