« CitiesIN » : et si les métropoles ébranlaient le Brexit

Par Carlos Moreno  |   |  624  mots
En Angleterre, le « In » de la métropole de Londres avec ses 8 millions d'habitants, 12% de la population, représente 20% du PIB du Royaume uni. Elle s'est exprimée de manière écrasante pour le maintien dans l'Europe. On note les mêmes résultats pour les principales villes telles que Cambridge, Oxford, York, Bristol, Liverpool, Manchester.
À l’heure du Brexit, un rappel historique peut être instructif lorsqu’il s’agit de comparer la pérennité des villes face à l’éclatement des États-Nations et à leur perte de zones d’influence. Évoquons quelques faits.

Les villes survivant à toute sorte d'événements sont, sans conteste, les plus durables des structures socio-territoriales. Elles sont un repère solide, socle majeur de l'expression des habitants face aux défis.

Dans ce XXIe siècle, leur prépondérance n'a jamais été aussi manifeste. Alors que le résultat du Brexit se prononce à la majorité pour la sortie de l'Union européenne, les grandes villes se sont exprimées pour le maintien.

En Angleterre, le « In » de la métropole de Londres avec ses 8 millions d'habitants, 12% de la population, représente 20% du PIB du Royaume uni. Elle s'est exprimée de manière écrasante pour le maintien dans l'Europe. On note les mêmes résultats pour les principales villes telles que Cambridge, Oxford, York, Bristol, Liverpool, Manchester. Oui, animés par la peur de « l'autre », c'est le NON des campagnes anglaises et d'une frange de la population senior qui l'ont emporté. Paradoxalement, cela met en exergue le rôle majeur que les villes monde ont à jouer dans ce siècle des villes.

Le maire de Londres Sadiq Kahn appelle à construire une métropole ouverte au monde, prenant parti contre l'isolationnisme. Il a signé un manifeste avec la maire de Paris, Anne Hidalgo, pour aller de l'avant dans le renforcement des liens entre ces deux « global cities ».

Ce n'est pas seulement la voie de l'avenir, c'est aussi la question de l'anticipation d'un avenir urbain. Cela exige que les grandes villes européennes se consolident et travaillent en étroite concertation pour exister dans une planète urbanisée, et faire face aux profondes transformations en devenir.

#londonindependence

Le succès de la pétition #Lexit, partie d'un mouvement d'humour, traduit cette force qui réside dans les métropoles avec la montée en puissance de la voix des maires du monde.

Les villes monde sont devenues des acteurs politiques, économiques, culturels, sociaux à part entière, et ce, bien au-delà de leur sphère d'influence territoriale. Cette évolution irréversible se traduit par des transformations structurelles, qui vont impacter les décennies à venir. Être maire d'une grande métropole, génératrice d'un PIB supérieur à celui d'un État, est un élément majeur dans les changements géostratégiques qui impactent la politique du monde, et va inéluctablement se renforcer à l'avenir.

À l'horizon 2030, les 750 plus grandes métropoles mondiales représenteront plus de 60% du PIB mondial. Parmi elles, aujourd'hui, 139 villes européennes comptent pour 44% du PIB européen, avec une taille moyenne de population de 1,7 million d'habitants.

Nos villes européennes sont en concurrence, mais elles doivent aussi coopérer étroitement, car les enjeux internationaux et les problématiques sont aussi communes : la lutte contre l'exclusion sociale, l'emploi, le développement économique, les nouvelles maladies urbaines, la pollution, la qualité de l'air et de l'eau, les ressources énergétiques et bien d'autres défis.

En même temps, face à elles, le centre de gravité du monde urbain s'est tourné irréversiblement vers l'axe Est-Sud de la planète : rien que les 150 premières villes chinoises représentent un cinquième des 750 plus grandes villes du monde aujourd'hui par leur population. D'une taille moyenne de 6,4 millions d'habitants, elles portent environ 90% du PIB chinois. Soulignons aussi que 90% de la croissance mondiale urbaine a lieu aujourd'hui en Afrique et en Asie, et que plus d'un tiers se concentre dans seulement trois pays, l'Inde, la Chine et le Nigeria, avec toujours un PIB porté majoritairement par les grands centres urbains.

La construction d'une nouvelle donne européenne est à venir. Elle passe par le renforcement des villes. La voix de Londres comptera lourdement. Un axe Londres- Paris renforcé par d'autres villes européennes pèsera face aux États-Nations. À l'heure du Brexit, la revanche est au « CitiesIN ».