Comprendre les usages et enjeux de la Tech pour mieux maîtriser l’avenir

Rédouane Bellefqih, directeur général de Deloitte Conseil France, membre du comex France et du comex consulting mondial du cabinet d'audit et de conseil, livre son expérience telle qu'il la vit auprès de ses clients. Selon lui, la tech doit servir un dessein plus large, pensé au plus haut niveau de l'entreprise, et prendre en compte l'humain et la responsabilité des organisations en tant que fondamentaux. D'autant que c'est aussi la tech qui permettra aux entreprises d'agir en matière de décarbonation de leurs activités.
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Faire de la tech pour la tech ? Cela n'a aucun sens pour Rédouane Bellefqih, directeur général de Deloitte Conseil France, membre du comex France et du comex consulting mondial du cabinet d'audit et de conseil. C'est pourtant sa spécialité au sein du leader mondial des services professionnels, incluant, au sein du Deloitte Conseil une practice Tech qui représente la moitié des activités et des effectifs de son activité.« Les enjeux de la transformation des entreprises par la tech recouvrent bien plus que la simple technologie. Ils comprennent aussi bien l'avenir des entreprises, leur sécurité, leur productivité, leur gestion des écosystèmes internes et externes, la protection des données, et le capital humain que leur compétitivité et l'économie dans son ensemble, dans un univers en mutation accélérée et très concurrentiel », déclare-t-il d'entrée de jeu. Sans oublier des enjeux encore plus larges que sont la souveraineté européenne et la géopolitique, dont la forte rivalité pour l'hégémonie entre les Etats-Unis et la Chine... Conséquence de tout cela, la transformation numérique des organisations requiert une vision stratégique, pensée puis impulsée par la direction générale ainsi que ses instances managériales. C'est d'ailleurs à ce niveau que l'expert de Deloitte travaille. Afin, en France, de sensibiliser les dirigeants, principalement ceux des grands groupes cotés, à la tête bien faite et au parcours impeccable, certes, mais souvent peu rompus aux nouvelles technologies - de l'intelligence artificielle (IA) au cloud en passant par la cybersécurité... Et il a des arguments.

Retour sur investissement

Tout d'abord, les entreprises qui se sont le mieux sorties de la crise Covid sont celles qui, précisément, étaient le plus en avance au point de vue technologique. Ensuite, au lieu de s'arrêter simplement aux investissements à consentir, mieux vaut s'intéresser aussi aux gains que la tech va apporter. Ils sont énormes, aussi bien au point de vue innovation et productivité qu'en matière d'expérience client et d'expérience employés. « Avec le cloud, par exemple, sur un euro dépensé en tech, au lieu que 90 centimes aillent à la maintenance issue de l'obsolescence et à la gestion de la dette technique, et 10 centimes seulement à l'innovation et aux nouveaux projets, c'est progressivement et à terme 50/50 : le retour sur investissement est quasiment immédiat », assure-t-il.

D'ailleurs, l'acquisition annoncée des sociétés Neoxia et Skale 5, du groupe Neoxia, expert en technologies cloud, confirme la volonté de Deloitte de jouer un rôle clé auprès de ses clients dans ce domaine. Et pas question pour eux, puisque la tech englobe toutes les activités et tous les métiers des organisations, de travailler en silo. « La somme de bonnes initiatives ne fait pas une stratégie », tranche-t-il ainsi. Il s'évertue donc à convaincre les directions générales d'améliorer ce qu'il appelle le quotient technologique de l'entreprise, pour que la tech, cette facilitatrice de profonde transformation, descende dans toutes les strates de l'organisation et jusqu'aux utilisateurs finaux.

Autre type d'activité de conseil à destination des grands groupes, la rationalisation des ressources Tech consommatrices de capital. L'expert en consulting tech prend en exemple un grand groupe français qui, au fil de nombreuses acquisitions, connaissait une multitude de process, d'outils informatiques, d'applicatifs... « Il a fallu retrouver une colonne vertébrale, qui a permis une prise de conscience unifiée de la part de tous les salariés de la raison d'être de l'entreprise et de sa projection sur son marché », indique-t-il. L'humain revient d'ailleurs toujours dans le discours tech de cet expert.

Si les dirigeants des grands groupes français ont encore un peu de mal avec la tech, la France a quand même de sérieux atouts pour réussir. Au-delà de poids lourds mondiaux, d'une grande diversité, puisqu'ils vont du luxe au transport, de la grande distribution à la banque-assurance, l'Hexagone bénéficie d'un écosystème riche de sa recherche et de ses start-up. Rédouane Bellefqih cite en exemple les avancées françaises dans le domaine de la médecine, qui permettent, grâce à l'IA, aux professionnels de santé de mieux prédire, voire de prévenir l'arrivée de certaines maladies. De même, en agritech, en cybersécurité, en décarbonation et en durabilité, les prouesses des spécialistes français, même si certains travaillent en Amérique du Nord, sont reconnues. « Malgré un contexte législatif et social compliqué, malgré un état d'esprit moins optimiste que dans d'autres pays, il suffirait que la France (et l'Europe) décident d'investir collectivement et massivement dans ces domaines pour faire des merveilles », dit-il.

De quoi, également, permettre aux entreprises de jouer pleinement leur rôle dans un autre domaine, connexe, celui de la lutte contre le dérèglement climatique et la décarbonation des activités économiques. « La compréhension des enjeux tech va de pair avec ceux de la durabilité, remarque-t-il. En outre, c'est en partie grâce à la tech, qui permet notamment de mesurer l'empreinte carbone, pour la réduire ensuite, que les organisations vont assumer leurs responsabilités vis-à-vis des citoyens et des générations futures. »

A cet égard, Deloitte France, qui dispose d'environ 300 ingénieurs spécialisés dans ce domaine, a une longueur d'avance sur d'autres entités du cabinet dans le monde. Et si Redouane Bellefqih entend bien continuer à investir sur des Talents en prise avec ces sujets (environ 750 recrutements par an), il espère également qu'au-delà de ses clients français, ce sont toutes les grandes entreprises, partout dans le monde, qui opéreront leur révolution digitale et environnementale à l'avenir, au regard notamment de leur responsabilité économique et sociétale et de l'impact de leurs décisions dans ce domaine...

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